Vue générale du village de Rosia Montana. Photo AFP
Déjà exploité par les Romains, l'or de cette coquette bourgade attire les convoitises alors que les cours mondiaux flambent. Il en resterait encore 300 tonnes, un des plus grands gisements d'Europe, selon la compagnie canadienne Gabriel Resources qui vise ce pactole, à travers sa filiale à plus de 80 %, la Rosia Montana Gold Corporation (RMGC). En 1999, elle a obtenu la concession. Mais son projet d'extraction à ciel ouvert n'a toujours pas les permis archéologiques et environnementaux requis, malgré le soutien du ministre de l'Économie roumain, Adriean Videanu.
Outre l'opposition des défenseurs de l'environnement, de la Hongrie voisine et des Églises, des scientifiques du monde entier dénoncent les menaces que ce projet fait peser sur « un des plus vastes réseaux de galeries minières romaines » découvert dans les monts où se ferait la mine.
Une accusation que dément RMGC. Cette année, architectes et historiens soutenus par l'Icomos, l'un des trois organismes consultatifs de l'Unesco, ont officiellement demandé au ministère de la Culture d'inscrire Rosia Montana sur sa liste de sites proposés pour être classés au patrimoine mondial.
« Rosia Montana a conservé des témoignages exceptionnels de l'histoire des exploitations minières romaines, médiévales et modernes », indique à l'AFP Virgil Apostol, architecte au Musée national d'histoire de Roumanie, qui a préparé la demande. « Les experts du ministère étudient actuellement le dossier. C'est évidemment un site très intéressant », a indiqué à l'AFP Csilla Hegedus, conseillère du ministre.
Le maire soutient que « toute la communauté locale s'oppose » à cette idée. Mais le village est divisé, à l'image de la place centrale où se côtoient fondations pour et contre la mine.
« Je suis contre. On a l'impression d'être occupés par les Canadiens », dit l'épicier Sorin Jurca en montrant les multiples panneaux de RMGC sur les maisons-monuments historiques rachetées par la compagnie. « Ici, les gens étaient tous mineurs. On ne sait faire que ça. Il n'y a rien et on a besoin d'emplois. La mine de la Gold, c'est la meilleure solution », affirme à l'AFP Eusebiu Cosa, ex-mineur de 37 ans.
Comme lui, les « pros » invoquent les créations d'emploi en temps de crise. Après avoir promis 1 200 emplois durant les deux ans de construction de la mine, RMGC parle maintenant de 2300, sans détailler. Durant les 16 ans d'exploitation, 880 personnes seraient employées.
Eugen David, 45 ans, fermier à Rosia Montana et figure de l'opposition au projet, met en garde contre « une destruction de l'environnement irréversible » pour quelques années de profit. Il croit au contraire à l'agriculture et au tourisme durable, basé sur le patrimoine, comme solution de développement à long terme. « Mais les autorités locales font tout pour bloquer les initiatives, du coup on a raté des fonds européens pour développer la zone », dit-il.
Le maire lui ne croit pas au tourisme bien que plusieurs habitants ayant ouvert une pension, dont un couple d'une vingtaine d'années, indiquent à l'AFP y trouver un revenu intéressant.
En attendant l'Unesco, la bataille Rosia se poursuit. Si environ 651 foyers ont choisi d'être relocalisés, des gens comme Eugen, Sorin ou Ovidiu Plic ne veulent pas partir ni vendre pour laisser place à la mine d'or.