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Économie - Liban - Éclairage

« L’Institut de la vigne et du vin », ou le relais incontournable de la renaissance du vignoble libanais

Attendu depuis 2000, l'Institut national de la vigne et du vin reste encore aujourd'hui un projet en gestation en raison de l'insouciance des responsables. Sa mise en place est pourtant plus que nécessaire pour un secteur en plein essor.

Dix ans après le vote au Parlement d'une loi régissant le secteur du vin au Liban, l'Institut national de la vigne et du vin (INW) - une autorité de supervision indépendante dont la création est stipulée par l'article 18 de cette loi - n'a toujours pas vu le jour. L'existence de cet organisme indépendant qui a la tâche de contrôler, protéger et développer le secteur revêt pourtant une importance capitale, notamment dans le contexte actuel d'essor de l'activité viticole dans le pays.
Prolifération des producteurs, rétrécissement des surfaces cultivables, durcissement des normes internationales de qualité, etc., le secteur du vin - un des rares au Liban qui continue d'exporter massivement dans le monde entier - a plus que jamais besoin d'une autorité qui puisse l'aider à mieux relever les nombreux défis qui le guettent autant sur le plan interne qu'au niveau international...

Un long imbroglio juridico-politique
Tout a commencé lorsqu'en 2000, les parlementaires ont voté une nouvelle loi, après 17 ans de vide sur le plan juridique (la loi de 1938 ayant été abolie en 1983), réglementant tous les aspects de la production et de la commercialisation de vin au Liban.
Cette initiative avait emboîté le pas à la création, quelques années plus tôt, par un groupe de producteurs locaux de l'Union vinicole du Liban (UVL) grâce à laquelle le Liban est devenu membre de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV).
Ces démarches publiques et privées visaient à redonner vie à un secteur à fort potentiel de croissance, miné par les longues années de guerre, et à replacer le Liban sur la carte internationale des pays producteurs de vin.
La mise sur pied de l'Institut de la vigne et du vin s'inscrivait ainsi dans le cadre de cette politique. Sauf que le processus, amorcé au lendemain du vote de la loi, a été maintes fois freiné par des obstacles essentiellement administratifs et à caractère politique.
« Au début, la question était de savoir si cet institut allait être sous la houlette de l'État ou du secteur privé (...) », se rappelle Serge Hochar, président de l'UVL et PDG de Château Musar, dans un entretien avec L'Orient-Le Jour. « Il a finalement été convenu de créer un institut de droit privé reconnu d'utilité publique », dont le conseil d'administration serait formé de trois membres représentant l'État et de quatre membres du secteur privé (dont le président), indique-t-il.
La concrétisation de cet accord nécessitant l'élaboration d'un décret d'application, une sous-commission fut formée à cette fin. Celle-ci présenta quelques mois plus tard un projet de décret au ministère de l'Agriculture qui le soumit au Conseil d'État pour évaluation. Ce dernier donna alors un avis négatif, « essentiellement pour des raisons de forme », selon Charles Ghostine, administrateur délégué de Ksara.
Après de longues tergiversations, une guerre en 2006 suivie d'une quasi-paralysie de la vie institutionnelle en raison des tensions sur le plan interne, le décret n° 596 est finalement soumis en août 2007 au Conseil des ministres. Celui-ci est approuvé, mais le feuilleton est loin d'être fini. « Il s'est avéré plus tard que la clause concernant le financement des activités de l'autorité a été purement et simplement rayée du texte approuvé par les ministres », indique Charles Ghostine. Nonchalance ou facétie de la part des autorités, l'affaire vire au ridicule, mais cela n'empêche pas les producteurs locaux de poursuivre leur combat. S'ils n'ont toujours pas obtenu gain de cause, l'affaire, reléguée aux calendes grecques depuis 2007, a récemment été remise sur le tapis et semble être sur la « bonne voie », selon l'administrateur délégué de Ksara, qui espère un nouveau vote d'ici à la fin de l'année.

De la nécessité d'accompagner un marché en plein boom
Sur le plan économique, la création de l'Institut de la vigne et du vin constitue une étape essentielle dans la consolidation d'un secteur en pleine renaissance, qui représente une part essentielle des exportations libanaises à l'étranger et contribue à hauteur de plusieurs dizaines de millions de dollars au produit intérieur brut (PIB). Avec une production annuelle avoisinant les 7 millions de bouteilles l'an dernier, contre 5 millions au début des années 2000, et près de trente domaines viticoles, contre moins de cinq il y a 20 ans, l'industrie locale du vin n'a pas en effet cessé de se développer depuis la fin de la guerre civile. Ce marché est devenu d'ailleurs un pôle d'attraction pour de nouveaux investisseurs, comme le PDG de Renault-Nissan, Carlos Ghosn.
Il n'en reste pas moins que le Liban reste un très petit producteur comparé aux grands exportateurs de vin, comme l'Argentine, le Chili et l'Afrique du Sud. Le pays du Cèdre peut toutefois concurrencer ces géants par la qualité de ses produits et une politique de différenciation, « que seule une autorité à l'instar de l'INW peut mettre en application », souligne Serge Hochar. « En effet, outre les aspects légaux, l'Institut du vin et de la vigne est chargé du contrôle de qualité des vins et de la mise en place des appellations d'origine contrôlée (AOC) », explique-t-il. La création des AOC - une démarche suivie un peu partout dans le monde, sauf au Liban - rend les produits labellisés plus reconnaissables et permet d'aider les producteurs locaux d'un pays à mieux percer les marchés internationaux. « Le lancement de l'INW revêt ainsi un caractère d'urgence, d'autant que la loi-cadre sur les indications géographiques (IG) et les AOC est sur le point d'être votée au Parlement et que le décret d'application propre aux vins ne peut être émis en l'absence de l'institut », indique à cet égard Charles Ghostine.
D'autres questions, non moins primordiales, comme le cadastre des terrains agricoles (qui suivrait la création des IG et des AOC), ou encore la révision de certaines taxes appliquées au secteur du vin, figurent également au menu des objectifs de l'INW, dont la mise en place vise non seulement à aider les producteurs locaux à s'armer contre la concurrence externe, mais à réorganiser également le secteur sur le plan interne.
En attendant, les responsables et les représentants du secteur privé, qui ont encore beaucoup de pain sur la planche, devraient s'activer pour amorcer le processus permettant à la viticulture de prendre son envol. Une prise de conscience s'impose donc pour appuyer un des secteurs économiques les plus prometteurs et redorer l'image d'un des plus vieux sites de production de vin au monde.
Dix ans après le vote au Parlement d'une loi régissant le secteur du vin au Liban, l'Institut national de la vigne et du vin (INW) - une autorité de supervision indépendante dont la création est stipulée par l'article 18 de cette loi - n'a toujours pas vu le jour. L'existence de cet organisme indépendant qui a la tâche de contrôler,...

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