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Europa Jaratouna: l'action de l'Europe dans 8 pays sud-méditerranéens - Rapport d’avancement

L’UE exhorte les dirigeants libanais à débloquer le processus de réforme

L'objectif principal de la PEV est de renforcer les capacités de l'État au Liban.

Et rebelote. Pour la deuxième année consécutive, le Liban s'est vu attribuer une mauvaise note pour son faible rendement et son manque d'implication dans la mise en œuvre du plan d'action de la Politique européenne de voisinage (PEV).
Présenté le 12 mai par le chef de la Délégation de l'Union européenne, Patrick Laurent, le troisième « rapport d'avancement » depuis le lancement du plan d'action de l'Union européenne (UE), en janvier 2007, souligne d'emblée que « l'année 2009 a connu de très lents progrès dans l'adoption des réformes politiques, économiques et sociales ». Ce rapport, divisé en huit chapitres, aborde des dossiers aussi variés que le dialogue politique et la gouvernance, l'intégration économique et le commerce ou encore la coopération dans divers domaines allant de la justice à la sécurité, en passant par l'énergie, les transports, l'environnement, l'éducation et la santé.
Pour Patrick Laurent, « le rapport de l'année 2009 précise que les ré-  formes n'ont pas avancé en 2009. Les Libanais étaient concentrés sur la préparation et le déroulement des élections législatives, puis sur la formation du gouvernement qui est restée bloquée durant cinq mois ». Ainsi, au cours de l'année écoulée, les réformes et les lois nécessaires pour que le Liban profite à plein de la Politique européenne de voisinage au Liban n'ont avancé ni à travers le gouvernement ni à travers le Parlement. « L'agenda des réformes a marqué le pas dans de nombreux domaines, puisqu'il y a un paquet de 69 actes législatifs adoptés durant la période de crise politique entre novembre 2006 et mai 2008, du temps du Premier ministre Fouad Siniora, et qui sont toujours bloqués au Parlement libanais », a précisé Patrick Laurent lors de la présentation du rapport.
La tonalité globalement négative du rapport est néanmoins tempérée par les intentions du nouveau cabinet de Saad Hariri, illustrées par le plan de réformes tel qu'il a été adopté par la déclaration gouvernementale du 10 décembre 2009 et que l'UE considère comme très intéressante. « Il s'agit d'une déclaration bien charpentée, peut-être l'une des meilleures qu'a faites le Liban », selon le chef de la Délégation européenne. « La déclaration est bien ciblée sur les besoins des citoyens libanais, plus ciblée sur les réformes et peut-être même plus réaliste que les précédentes. » En ce qui concerne la mise en œuvre de cette politique, M. Laurent indique que le Premier ministre s'est engagé à accélérer les réformes et que l'Union européenne « suivra avec intérêt comment certains ministres clés s'efforceront de faire avancer les choses et de mettre en œuvre la PEV ».

Le Liban reste engagé
Une tendance confirmée par Hazar Caracalla, chef de l'unité des relations avec l'UE à la présidence du Conseil des ministres, qui réaffirme la volonté du Liban à œuvrer en vue d'un partenariat réel et profond avec l'Europe. « Nous avons signé l'Accord d'association (AA), nous sommes engagés dans la PEV et nous voulons participer activement au sein de l'Union pour la Méditerranée (UPM) », affirme Mme Caracalla. Selon elle, le Liban est peut-être perçu comme un mauvais élève concernant la mise en œuvre des réformes envisagées par le plan d'action, mais ceci n'est pas dû à un manque de volonté de la part des autorités libanaises. « Au contraire, nous croyons fermement que le processus de réformes initié par la PEV est un instrument idéal pour relever les performances de notre économie et de nos institutions au niveau et aux standards européens », ajoute-t-elle. La responsable précise que l'ambitieux programme de réformes lancé par la déclaration ministérielle prouve la volonté du Liban d'aller de l'avant dans ce domaine et sa mise en application atteindra les objectifs mentionnés dans le plan d'action de l'UE.

Des progrès réalisés
Au chapitre des bonnes nouvelles, le rapport PEV 2009 revient sur certains progrès réalisés par le Liban en matière de droits de l'homme. Le Liban a notamment ratifié le protocole optionnel de la Convention contre la torture, et l'on note quelques avancées dans la modernisation de la justice libanaise. Le rapport relève également qu'en 2009, aucun enregistrement d'association n'a été bloqué, ce qui révèle un certain progrès concernant ce sujet. Tout en saluant « l'environnement médiatique le plus ouvert et le plus diversifié du Moyen-Orient », l'UE regrette toutefois que « l'indépendance » des médias libanais reste limitée. « Il y a une grande liberté d'expression, mais la plupart des médias sont liés au clan, au chef, aux " zouama ". Et la ligne politique du média suit en général la ligne politique du zaïm », regrette Patrick Laurent.
Le rapport note, en outre, des progrès concernant l'intégration des migrants domestiques, suite à l'établissement d'un contrat unifié. Mais là aussi, le rapport PEV 2009 regrette que la mise en œuvre reste très limitée et que les conditions de travail restent très mauvaises. Le rapport note, par ailleurs, que les conditions des réfugiés palestiniens au Liban n'ont pas changé en 2009.
Par ailleurs, l'UE a noté que le Liban a maintenu de facto le moratoire sur la peine capitale, bien que plusieurs condamnations à mort aient été prononcées en 2009. « L'UE soutient d'une manière très forte l'abolition formelle de la peine de mort telle que proposée par le ministère de la Justice », a affirmé M. Laurent.
Sur le plan économique, le Liban a connu en 2009 une croissance assez impressionnante et une stabilité du secteur bancaire, sans oublier une saison touristique très réussie, précise le rapport d'avancement. « Cette situation est un atout pour le Liban », a estimé Patrick Laurent lors de sa conférence de presse, ajoutant qu'il faut « faire le meilleur usage de ces résultats pour introduire des réformes économiques et financières substantielles ».
Malheureusement, un grand nombre de projets de loi liés notamment à l'application de Paris III et à l'adhésion du Liban à l'Organisation mondiale du commerce, mais aussi un projet sur la protection de la propriété intellectuelle, sont restés bloqués. « L'UE regrette ce blocage dû au manque d'accord politique entre le gouvernement et le Parlement sur ce sujet. Et ce d'autant plus qu'il s'agit de la mise en œuvre de règles et de lois qui sont tout à fait précises, claires et transparentes, pour assurer aux hommes d'affaires la stabilité et la protection nécessaires pour investir au Liban », explique M. Laurent, qui ajoute : « Nous regrettons beaucoup cette situation, d'autant que nous soutenons activement le processus de négociation du Liban pour adhérer à l'OMC. »

Le secteur privé et la société civile
Alors que les institutions étatiques ont été immobilisées durant les trois dernières années, le secteur privé se fait remarquer par son dynamisme. « Les gens investissent, font de l'argent, et donc, dans ce secteur, nous notons des progrès » souligne l'ambassadeur Laurent. Ce constat est également valable pour la société civile. « Mais notre objectif principal est de renforcer les capacités de l'État libanais, et nos efforts se concentrent sur ce sujet », nuance le responsable européen.
Selon Hazar Caracalla, le secteur privé est l'épine dorsale de l'économie et le moteur de son développement. « Il n'est pas surprenant qu'un secteur connu pour son dynamisme et son esprit entrepreneur dépasse le secteur public en matière de réformes et de modernisation », affirme-t-elle. De plus, selon Mme Caracalla, les organisations de la société civile bénéficient d'une législation relativement libérale, ce qui leur a permis d'être plus actives sur le plan politique, social et économique.
Mme Caracalla précise, en outre, « qu'il est naturel que les réformes politiques soient plus difficiles à réaliser par rapport aux réformes d'ordre social et économique. Au Liban, cette tâche est encore plus laborieuse puisqu'il faut un très large consensus politique afin de maintenir l'équilibre social et politique du pays ».
Ceci dit, Hazar Caracalla énumère certaines avancées mentionnées également dans le rapport de l'UE, comme l'adhésion du Liban à la Convention des Nations unies contre la corruption.
En définitive, tout le monde est conscient du blocage presque total au niveau des réformes politiques, économiques et sociales en 2009. « Mais cette année, il n'y a pas d'excuse. Le pays a toutes les possibilités d'avancer en 2010 et les choses se devraient de bouger plus vite (cf plus bas).»
Soulignant que « l'UE ne contraint personne à faire des réformes », M. Laurent exhorte les dirigeants libanais à débloquer les projets de lois en suspens et le gouvernement à « monter dans le train des réformes », car « il y va de l'intérêt du Liban ».

 

A.A.

Et rebelote. Pour la deuxième année consécutive, le Liban s'est vu attribuer une mauvaise note pour son faible rendement et son manque d'implication dans la mise en œuvre du plan d'action de la Politique européenne de voisinage (PEV).Présenté le 12 mai par le chef de la Délégation de l'Union européenne, Patrick Laurent, le...