D'ailleurs, poursuit-il, comment des fractions libanaises peuvent-elles soutenir que la 1559 est désormais hors de propos, alors que de ses multiples mesures, seul le retrait des troupes syriennes a pris corps ? Les Israéliens, également concernés, sont toujours là, au Sud. L'on ne peut oublier non plus que la 1559, qui ordonnait une présidentielle dans les règles constitutionnelles et sans immixtion étrangère, a été foulée aux pieds le lendemain de sa promulgation par la reconduction du mandat d'Émile Lahoud. Plus avant, la résolution exige « le respect absolu de la souveraineté, de la sûreté régionale, de l'unité comme de l'indépendance politique du Liban, sous la seule autorité de son gouvernement et sans rival, sur l'ensemble du territoire libanais ». Des dispositions restées lettre morte, autant que la dissolution des milices libanaises et non libanaises que la 1559 édicte également. À ce propos, le Hezbollah s'était déclaré pas concerné, du moment que son bras armé constitue à ses yeux une force de résistance légitime et non une milice. Une logique que les organisations armées palestiniennes, dans les camps et en dehors, reprennent évidemment à leur compte.
Le diplomate européen se demande ensuite qui est derrière la manœuvre dirigée contre la 1559. Serait-ce la Syrie ? Ce pays a considéré que la résolution le visait tout particulièrement. Et, à l'époque, ses fidèles du cru avaient accusé Rafic Hariri ainsi que Marwan Hamadé et Ghassan Salamé d'avoir initié le texte onusien. D'où, selon certains, l'assassinat de Hariri, l'attentat dont Hamadé avait réchappé à Beyrouth, où Salamé n'a plus mis les pieds par la suite. En tout cas, après la 1559, la Syrie avait tiré un trait sur les précédentes promesses faites à Rafic Hariri pour qu'il forme un nouveau gouvernement à sa guise. Il avait donc dû se récuser en précisant dans un communiqué prémonitoire qu'il devait « prendre congé auprès du Tout-Puissant du cher Liban. »
Aujourd'hui, le général Michel Aoun, qui avait bataillé pour le retrait des troupes syriennes, se lave les mains de la 1559 en allant jusqu'à soutenir, au sujet de la dissolution des milices, que l'ONU n'a pas à se mêler de l'armement du Hezbollah, qui est une question libanaise interne. À ce propos même, les observateurs craignent que le débat sur la 1559 ne tourne au conflit au sein du Conseil des ministres et ne conditionne le sort du gouvernement dit d'union. En principe, toute décision devrait être prise à une majorité des deux tiers. Sauf que cette règle, on ne le sait que trop, a été gommée au profit de la décision prise obligatoirement à l'amiable. Mais, juridiquement, le Liban n'a pas son mot à dire car seul le Conseil de sécurité de l'ONU, qui en est l'auteur, peut abolir la 1559.
Ce qui semble d'autant moins probable que, dans la foulée, on gommerait également la 1681. Un texte qui se focalise sur le tracé des frontières entre la Syrie et le Liban, avec forte allusion à Chebaa, ainsi que sur l'établissement de relations diplomatiques entre ces deux pays. La résolution presse en outre la Syrie de prendre, à l'instar du gouvernement de Beyrouth, des mesures frontalières « contre les opérations de transfert d'armes en direction du territoire libanais. » Elle conclut en invitant les États et parties concernés « à coopérer entièrement pour la concrétisation de tous les impératifs de la 1559 ».