Noir / jaune ; rouge / vert ; noir / rouge ; ou rouge / jaune /
vert ? Il ne s'agit pas là d'un jeu pour enfants mais plutôt d'un débat, imagé, qui a animé ces dernières semaines les milieux politiques et journalistiques en Allemagne dans le cadre des supputations sur l'issue des élections législatives qui se sont déroulées dans les seize Länder (États autonomes) de la RFA le 27 septembre dernier et qui ont débouché sur l'émergence d'une coalition Noir / Jaune pour la formation du gouvernement.
À l'occasion de ce scrutin législatif, la Fondation Friedrich Ebert - relevant du Parti social-démocrate, SPD - a organisé à l'intention d'un groupe de quatre journalistes libanais un voyage d'information d'une semaine à Berlin, axé sur l'examen de la loi électorale et des pratiques politiques, électorales et médiatiques en Allemagne. Une étude comparative sur ce plan avec le Liban serait, certes, irréaliste, en raison du contexte historique et sociopolitique totalement incomparable. Il reste que certaines observations incitent quand même à la réflexion...
En Allemagne, les cinq principaux partis politiques qui se partagent présentement le Parlement (le Bundestag) sont représentés chacun par une couleur : le noir pour la démocratie chrétienne (CDU/CSU), le rouge pour le SPD, le jaune pour le Parti libéral FDP, le mauve pour la Gauche radicale (Die Linke) et le vert (à l'évidence...) pour les Verts. D'où la combinaison de couleurs à laquelle font très souvent référence les milieux politiques et les journalistes allemands pour exprimer les coalitions et les alliances possibles aussi bien au sein du Bundestag qu'au niveau de l'Exécutif.
Le Parlement allemand (qui comprend 598 sièges) est élu suivant un système mixte mêlant le suffrage majoritaire et le suffrage proportionnel. Chaque électeur bénéficie de deux voix. Il vote pour un candidat unique dans sa circonscription et pour la liste (fermée) d'un parti au niveau du Länder. Les députés représentant une circonscription sont élus à la majorité relative. Ils peuvent être indépendants, mais généralement ils sont affiliés à un parti. Ils constituent la moitié du Bundestag. Le mode proportionnel détermine les députés élus sur base de la liste fermée établie par un parti au niveau du Länder. Ils forment la seconde moitié du Parlement. Un parti politique doit obtenir au moins 5 pour cent des voix afin de pouvoir faire son entrée au Parlement, mais il pourrait être présent au Bundestag même s'il n'obtient pas ce pourcentage si certains de ses candidats sont élus à la majorité relative à l'échelle des circonscriptions.
Ce système mixte combinant le mode majoritaire et le mode proportionnel avait été adopté et adapté aux réalités libanaises par la commission Fouad Boutros chargée par l'ancien gouvernement de Fouad Siniora de plancher sur une nouvelle loi électorale. Mais indépendamment de l'incontournable paramètre confessionnel qui constitue un obstacle majeur à un tel système, force est de reconnaître que le mode mixte majoritaire /
proportionnel nécessite, entre autres, une profonde maturité et des coutumes politiques ainsi que des pratiques démocratiques liées à une vieille culture d'édification d'État de droit qui font largement défaut au Liban.
La pierre angulaire du système politique en Allemagne - à l'instar de la quasi-totalité des pays occidentaux - est l'action des partis politiques dont le rôle privilégié est prévu explicitement dans la Constitution. La Loi fondamentale fixe en effet pour mission aux partis de contribuer à la « formation de la volonté politique du peuple ». Cela entraîne pour conséquence pratique une subvention publique aux partis qui reçoivent ainsi de l'État des fonds pour financer leur campagne électorale. Ce remboursement par l'État des frais de campagne se fait au prorata du pourcentage de voix obtenues, de sorte que l'épineux problème de « l'argent politique » qui finance pratiquement sans plafond les campagnes et la publicité électorales - comme c'est le cas au Liban - ne se pose pas. À ces subventions publiques dont bénéficient les formations politiques viennent en outre s'ajouter les cotisations des membres, les dons (qui restent très limités) ainsi que les recettes tirées des biens du parti.
Mais le plus significatif - et ce qui devrait constituer matière à réflexion pour les Libanais - demeurent les conditions dans lesquelles se déroule le scrutin. À l'extérieur des bureaux de vote, à titre d'exemple, point de gendarme, de forces de l'ordre ou d'unités de l'armée. Et, surtout, point de partisans des différents candidats ou partis qui au Liban encombrent par dizaines le périmètre des centres électoraux. C'est le même calme plat à l'intérieur même des bureaux de vote : là aussi, les délégués et les partisans des candidats ou partis sont inexistants. Les opérations de vote sont organisées et contrôlées exclusivement, dans le calme et le silence absolus, par cinq civils ou fonctionnaires désignés au hasard par le conseil municipal de la circonscription. Cela reflète non seulement un haut degré de civisme, mais surtout une réalité, malheureusement, totalement étrangère aux Libanais : la possibilité de fraude électorale ou de manipulation du vote au niveau des urnes n'effleure même pas à l'esprit des candidats et des partis, elle est carrément inexistante dans la culture et les pratiques politiques du pays, de sorte que la présence de délégués représentant les candidats ou les listes n'est nullement nécessaire et n'a pas de raison d'être. C'est lorsque la méfiance règne et que la volonté de fraude et de manipulation du vote existent que la présence de délégués partisans devient nécessaire ...
L'une des caractéristiques du scrutin du 27 septembre dernier en RFA a été une relative désaffection, notamment au niveau des jeunes, à l'égard des deux grandes formations traditionnelles, le SPD et le CDU / CSU. Mais cela ne signifie nullement un désintérêt vis-à-vis de la chose publique, comme l'illustrent le rôle central joué par la presse et les médias ainsi que par les diverses fondations, notamment celles relevant des grandes formations politiques, dans la promotion et la défense de certaines grandes valeurs ou certaines grandes causes politiques et sociales. C'est peut-être à ce niveau précis que les Libanais peuvent tirer quelques leçons ou matière à réflexion...
vert ? Il ne s'agit pas là d'un jeu pour enfants mais plutôt d'un débat, imagé, qui a animé ces dernières semaines les milieux politiques et journalistiques en Allemagne dans le cadre des supputations sur l'issue des élections législatives qui se sont déroulées dans les seize Länder (États autonomes) de la RFA le 27 septembre dernier et qui ont débouché sur l'émergence d'une coalition Noir / Jaune pour la formation du gouvernement.
À l'occasion de ce scrutin législatif, la Fondation Friedrich Ebert - relevant du Parti social-démocrate, SPD - a organisé à l'intention d'un groupe de quatre journalistes libanais un voyage d'information d'une semaine à Berlin, axé sur l'examen de la loi électorale et des pratiques politiques, électorales et médiatiques en Allemagne. Une étude comparative sur ce plan avec le Liban serait, certes, irréaliste, en raison du contexte historique et sociopolitique totalement incomparable. Il reste que certaines observations incitent quand même à la réflexion...
En Allemagne, les cinq principaux partis politiques qui se partagent présentement le Parlement (le Bundestag) sont représentés chacun par une couleur : le noir pour la démocratie chrétienne (CDU/CSU), le rouge pour le SPD, le jaune pour le Parti libéral FDP, le mauve pour la Gauche radicale (Die Linke) et le vert (à l'évidence...) pour les Verts. D'où la combinaison de couleurs à laquelle font très souvent référence les milieux politiques et les journalistes allemands pour exprimer les coalitions et les alliances possibles aussi bien au sein du Bundestag qu'au niveau de l'Exécutif.
Le Parlement allemand (qui comprend 598 sièges) est élu suivant un système mixte mêlant le suffrage majoritaire et le suffrage proportionnel. Chaque électeur bénéficie de deux voix. Il vote pour un candidat unique dans sa circonscription et pour la liste (fermée) d'un parti au niveau du Länder. Les députés représentant une circonscription sont élus à la majorité relative. Ils peuvent être indépendants, mais généralement ils sont affiliés à un parti. Ils constituent la moitié du Bundestag. Le mode proportionnel détermine les députés élus sur base de la liste fermée établie par un parti au niveau du Länder. Ils forment la seconde moitié du Parlement. Un parti politique doit obtenir au moins 5 pour cent des voix afin de pouvoir faire son entrée au Parlement, mais il pourrait être présent au Bundestag même s'il n'obtient pas ce pourcentage si certains de ses candidats sont élus à la majorité relative à l'échelle des circonscriptions.
Ce système mixte combinant le mode majoritaire et le mode proportionnel avait été adopté et adapté aux réalités libanaises par la commission Fouad Boutros chargée par l'ancien gouvernement de Fouad Siniora de plancher sur une nouvelle loi électorale. Mais indépendamment de l'incontournable paramètre confessionnel qui constitue un obstacle majeur à un tel système, force est de reconnaître que le mode mixte majoritaire /
proportionnel nécessite, entre autres, une profonde maturité et des coutumes politiques ainsi que des pratiques démocratiques liées à une vieille culture d'édification d'État de droit qui font largement défaut au Liban.
La pierre angulaire du système politique en Allemagne - à l'instar de la quasi-totalité des pays occidentaux - est l'action des partis politiques dont le rôle privilégié est prévu explicitement dans la Constitution. La Loi fondamentale fixe en effet pour mission aux partis de contribuer à la « formation de la volonté politique du peuple ». Cela entraîne pour conséquence pratique une subvention publique aux partis qui reçoivent ainsi de l'État des fonds pour financer leur campagne électorale. Ce remboursement par l'État des frais de campagne se fait au prorata du pourcentage de voix obtenues, de sorte que l'épineux problème de « l'argent politique » qui finance pratiquement sans plafond les campagnes et la publicité électorales - comme c'est le cas au Liban - ne se pose pas. À ces subventions publiques dont bénéficient les formations politiques viennent en outre s'ajouter les cotisations des membres, les dons (qui restent très limités) ainsi que les recettes tirées des biens du parti.
Mais le plus significatif - et ce qui devrait constituer matière à réflexion pour les Libanais - demeurent les conditions dans lesquelles se déroule le scrutin. À l'extérieur des bureaux de vote, à titre d'exemple, point de gendarme, de forces de l'ordre ou d'unités de l'armée. Et, surtout, point de partisans des différents candidats ou partis qui au Liban encombrent par dizaines le périmètre des centres électoraux. C'est le même calme plat à l'intérieur même des bureaux de vote : là aussi, les délégués et les partisans des candidats ou partis sont inexistants. Les opérations de vote sont organisées et contrôlées exclusivement, dans le calme et le silence absolus, par cinq civils ou fonctionnaires désignés au hasard par le conseil municipal de la circonscription. Cela reflète non seulement un haut degré de civisme, mais surtout une réalité, malheureusement, totalement étrangère aux Libanais : la possibilité de fraude électorale ou de manipulation du vote au niveau des urnes n'effleure même pas à l'esprit des candidats et des partis, elle est carrément inexistante dans la culture et les pratiques politiques du pays, de sorte que la présence de délégués représentant les candidats ou les listes n'est nullement nécessaire et n'a pas de raison d'être. C'est lorsque la méfiance règne et que la volonté de fraude et de manipulation du vote existent que la présence de délégués partisans devient nécessaire ...
L'une des caractéristiques du scrutin du 27 septembre dernier en RFA a été une relative désaffection, notamment au niveau des jeunes, à l'égard des deux grandes formations traditionnelles, le SPD et le CDU / CSU. Mais cela ne signifie nullement un désintérêt vis-à-vis de la chose publique, comme l'illustrent le rôle central joué par la presse et les médias ainsi que par les diverses fondations, notamment celles relevant des grandes formations politiques, dans la promotion et la défense de certaines grandes valeurs ou certaines grandes causes politiques et sociales. C'est peut-être à ce niveau précis que les Libanais peuvent tirer quelques leçons ou matière à réflexion...
Noir / jaune ; rouge / vert ; noir / rouge ; ou rouge / jaune /vert ? Il ne s'agit pas là d'un jeu pour enfants mais plutôt d'un débat, imagé, qui a animé ces dernières semaines les milieux politiques et journalistiques en Allemagne dans le cadre des supputations sur l'issue des élections législatives qui se sont déroulées dans les seize Länder (États autonomes) de la RFA le 27 septembre dernier et qui ont débouché sur l'émergence d'une coalition Noir / Jaune pour la formation du gouvernement. À l'occasion de ce scrutin législatif, la Fondation Friedrich Ebert - relevant du Parti social-démocrate, SPD - a organisé à l'intention d'un groupe de quatre...
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