En raison de la récession économique, « nous sommes assis sur une poudrière d'inégalités, d'injustice et d'insécurité qui est sur le point d'exploser », écrit dans le préambule Irene Khan, la secrétaire générale de l'organisation, dont le siège est à Londres. « Ce n'est pas simplement une crise économique, c'est une crise des droits humains », a-t-elle expliqué dans une interview à l'AFP. « Il y a des problèmes sociaux, politiques et économiques qui ont été aggravés par la crise économique, c'est comme une bombe à retardement. » « Ces dernières années, on a vu que les questions de sécurité avaient sapé les droits humains. Aujourd'hui, avec la crise économique, ces droits se retrouvent mis en veilleuse », déplore Mme Khan.
En Afrique, la crise alimentaire a « eu un impact disproportionné sur les populations vulnérables », note le rapport. « Avec la crise économique qui affecte de plus en plus les populations en Afrique, nous redoutons qu'un grand nombre de gens tombe de nouveau dans la pauvreté et que ceux qui vivent déjà en marge endurent des difficultés croissantes », a déclaré le directeur d'Amnesty pour l'Afrique, Erwin Van der Borght, à l'AFP. La crise a entraîné sur tout le continent des manifestations qui ont souvent été durement réprimées, notamment en Tunisie, au Zimbabwe, au Cameroun ou au Mozambique.
Dans ce sombre tableau, Amnesty voit une lueur d'espoir : la possibilité d'une réforme en profondeur qui mettrait les droits de l'homme au cœur d'un système économique plus équitable. L'ONG lance notamment un appel aux pays du G20, qui ont jeté les bases d'une réforme économique en profondeur au sommet de Londres début avril. « Nous leur adressons ce message : vous ne pourrez trouver une solution aux problèmes économiques sans trouver une solution aux problèmes des droits de l'homme », conclut Mme Khan, qui les appelle à « investir dans les droits humains avec autant de détermination que dans la croissance économique ».
En matière de non-respect des droits de l'homme, l'Europe n'est pas épargnée. Amnesty dénonce notamment l'usage de bombes à sous-munitions et les pillages pendant le conflit entre la Géorgie et la Russie. « Le déclenchement de cette guerre a montré que l'idée d'une sécurité définitivement acquise, dans l'Europe au lendemain de la guerre froide, était un présupposé fragile », souligne le rapport. L'ONG relève également, dans de nombreux pays européens, un « climat de racisme et d'intolérance » qui vise notamment « les migrants, les Juifs, les musulmans et les Roms ». Ces derniers restent « largement exclus de la vie publique dans tous les pays ».
Aux États-Unis, Amnesty salue la décision du nouveau président Barack Obama de fermer la prison de Guantanamo et de briguer un siège au Conseil des droits de l'homme de l'ONU (voir par ailleurs). Mais « il est trop tôt pour savoir si le gouvernement américain saura faire pression sur des pays comme Israël ou la Chine pour qu'ils respectent les droits fondamentaux de la personne - comme il le fait sur d'autres États, tels l'Iran et le Soudan ».