Force est de relever, d'entrée de jeu, que le président Sleiman a réussi, en un laps de temps relativement court, à réintroduire le Liban dans l'arène internationale. En moins de douze mois, il a ainsi rendu visite à 18 pays, prononçant au total 55 discours devant un auditoire étranger ou devant les membres des communautés libanaises qu'il a rencontrées au cours de son périple. Pour le chef de l'État, il était vital que le Liban impose à nouveau sa présence sur l'échiquier international du fait que, plus que jamais, la situation dans le pays est tributaire de la conjoncture étrangère. Et pour cause : certaines factions locales liées à des puissances régionales s'emploient à transformer le Liban en un vaste champ de manœuvre exploité par ces puissances régionales au gré de leurs intérêts propres. Ces pays en question perçoivent le Liban comme une simple carte de pression ou une boîte aux lettres dans la rude partie de bras de fer géopolitique dont le Moyen-Orient est le théâtre.
Parallèlement à ce volet - essentiel - de politique étrangère, le président Sleiman paraît déterminé à lancer, après les élections législatives du 7 juin prochain, un vaste chantier de réformes. La nouvelle Assemblée nationale serait ainsi appelée à se transformer en une véritable ruche de travail afin de mettre sur les rails une série de projets de réformes qui couvriraient non pas tant le domaine politique, mais plutôt les secteurs administratif, économique, financier, social et pédagogique. Les réformes requises nécessiteraient, à l'évidence, d'amender et de développer la législation en vigueur dans les différents secteurs susmentionnés. Cela implique la mise en place d'un chantier de réformes legislatives, qui devrait être encadré par les institutions étatiques concernées.
C'est fort du bilan largement positif de la première année de son sexennat que le chef de l'État affiche sa détermination à lancer son projet de réformes. Ce bilan a été réalisé en dépit du fait que les embûches sur le plan local étaient loin d'être négligeables. De fait, les factions de l'opposition (le 8 Mars) n'ont rien fait, et ne paraissent pas vouloir faire grand-chose, pour faciliter la tâche du chef de l'État. Cela est apparu clairement à l'occasion du débat relancé par Baabda au sujet de la politique de défense. Le Hezbollah a été pratiquement la seule partie participant au dialogue national à s'être abstenue de présenter par écrit sa conception de la politique de défense, comme l'ont fait les autres chefs de file participant au dialogue.
L'un des ténors de la coalition du 14 Mars souligne sur ce plan qu'il ne faut pas s'attendre à voir le directoire du Hezbollah présenter un document écrit exposant sa vision de la politique de défense requise car un tel document risquerait, aux yeux des dirigeants du parti chiite, d'être utilisé par la suite pour contraindre le Hezbollah à se placer sous la bannière de l'État central. Auquel cas, le parti chiite perdrait beaucoup de sa marge de manœuvre, ce qui diminuerait d'autant son rôle de pièce maîtresse dans la stratégie régionale de l'axe syro-iranien. Afin d'éviter de se laisser entraîner sur ce terrain miné, le Hezbollah pourrait, dès le lendemain des élections, prendre les devants et tenter de gagner du temps en créant de nouveaux et faux problèmes - tels que, à titre d'exemple, l'élargissement de la conférence de dialogue à des fractions alliées à la Syrie et à l'Iran ou aussi le degré de représentativité des ténors qui prenaient part jusqu'à présent aux réunions de la conférence de dialogue. Mais en définitive, la capacité du Hezbollah à se livrer à un tel jeu politique dépendra sans doute des résultats, sous le double angle qualitatif et quantitatif, du scrutin du 7 juin. D'où le caractère clairement crucial, voire existentiel, de cette prochaine échéance électorale.