Le trio, qui figure parmi les 587 candidats en lice aux élections, est conscient qu'il voit grand, mais insiste qu'il mènera la bataille jusqu'au bout.
« Nous avons vu ce que les hommes politiques ont fait de ce pays durant les 40 dernières années », affirme Ghassan Rahbani, qui fut le premier à introduire le hard rock au Proche-Orient. « Le Liban ne peut plus être gouverné par la corruption et les mafieux. Il est temps de changer les choses », dit-il. La star du rock, fils du musicien Élias Rahbani et neveu de la diva libanaise Feyrouz, est soutenu par le député Michel Aoun. Il affirme ne pas être gêné par l'alliance entre M. Aoun et le Hezbollah, bien qu'il n'adhère pas aux principes islamistes du parti de Dieu.
« Je crois au rêve américain et je n'ai aucun problème à traiter avec nos frères chiites, assure le musicien âgé de 44 ans. Tout ce je demande, c'est que ma voix soit entendue. » Il reconnaît toutefois être plus à l'aise sur scène que lors d'une campagne électorale. « Je n'ai pas de costume, je me suis marié en jeans et j'ai acheté ma première cravate à l'occasion de ma nomination comme candidat », explique-t-il en arborant un tee-shirt siglé Harley Davidson.
Le pêcheur Mahmoud Khaled, alias Abou Karam, entend, lui, mener son combat en faveur des pauvres. « Je n'ai ni bureau ni argent », affirme cet homme moustachu de 47 ans, père de 15 enfants.
Conscient que ses chances de remporter un siège au Parlement sont infimes, il espère néanmoins que sa campagne obligera les hommes politiques à s'occuper davantage des habitants de la région du Akkar (Nord), où beaucoup vivent sous le seuil de pauvreté.
Pierre Hachache, célibataire de 37 ans sans emploi fixe, adopte le même discours.
« Mon message, c'est que les fils des pauvres ont également le droit de se présenter aux élections et d'exprimer leur point du vue », dit M. Hachache, qui passe la plupart de son temps libre dans un café avec des amis au bord de la mer à Batroun, sa ville natale dans le nord du Liban. Il a déjà essayé à trois reprises d'entrer au Parlement et a gagné en popularité grâce à des slogans politiquement incorrects. L'un d'eux promet aux électeurs qu'ils auront « du goudron jusqu'aux genoux » s'ils votent pour lui, raillant les travaux d'infrastructure très opportuns entrepris par les candidats dans leurs régions avant chaque scrutin.
Mais s'il n'est pas sûr que les Libanais iront voter pour l'un de ces trois candidats, beaucoup estiment qu'ils auront au moins réussi à donner un peu de couleur aux élections. « Moi je voterai pour le pêcheur parce qu'il représente l'antithèse des autres hommes politiques, qui n'ont rien fait de bien pour nous depuis des années », affirme Hiba Sahyouni, une anthropologue de 28 ans. « Il a le courage de les affronter et mérite une chance », dit-elle.