Dans une déclaration à la presse, M. Mitri a d'emblée souligné l'existence de discours « qui sont en accord avec la concurrence électorale », avant de constater que le dernier discours de Hassan Nasrallah était « pour le moins triste et surprenant, sinon tragique ». Il a rappelé l'accord de Doha, qui met en garde contre le recours à la violence et aux armes pour régler les conflits qui peuvent survenir et contre le recours aux accusations et aux dissensions confessionnelles dans le but d'enregistrer des acquis politiques.
Selon M. Tarek Mitri, le discours de sayyed Nasrallah est loin de rassurer les Libanais sur le fait que les armes de la Résistance ne seront pas utilisées au niveau local. « Le jour glorieux pour la Résistance était le 25 mai (2000, lorsque les Israéliens se sont retirés du Liban-Sud) mais je n'arrive pas à comprendre le rapport entre le 7 mai et la Résistance. Combattaient-ils Israël à Ras- Beyrouth ? Est-ce que Nasrallah veut dire que le jour où il a blessé et humilié son prochain est un jour glorieux ? Les Libanais sont en droit de demander au secrétaire général du Hezbollah et à son parti de réaffirmer leur engagement selon lequel ils ne porteront pas les armes contre leurs compatriotes. Un engagement sérieux doit aussi être crédible », a-t-il affirmé.
M. Mitri a insisté sur le fait que le discours de sayyed Nasrallah « ne donne pas aux Libanais le sentiment qu'ils sont à l'abri de nouvelles violences si celles-ci peuvent favoriser de nouveaux acquis politiques ». Il a aussi considéré que ses propos ne peuvent pas se situer dans le cadre des discours électoraux « dans la mesure où ils ne tiennent pas compte des alliés chrétiens (du Hezbollah) surtout lorsqu'il a dit que la Résistance peut gouverner le Liban ». « Ce discours institue une sorte de coupure avec l'autre et n'a pas un grand rendement électoral », a-t-il estimé, jugeant que le Liban est « tiraillé par deux logiques : la première appelle à l'édification d'un État et l'autre essaie de maintenir ce projet en suspens et de faire en sorte que le pays reste une scène ouverte aux conflits régionaux ». Soulignant que le pays ne peut pas se redresser si les plaies du passé restent ouvertes, M. Mitri a invité les Libanais à « tourner la page du passé et à œuvrer pour guérir leur mémoire, non pour la raviver de la manière avec laquelle sayyed Nasrallah s'est exprimé ».
Le ministre a ensuite estimé que « deux dictionnaires sont employés pour le vocabulaire électoral : le premier se rapporte au monde animal et le deuxième au monde militaire ». « S'il y a une conviction selon laquelle la décision de ne pas employer les armes à des fins politiques internes est irrévocable, abstraction faite des intentions, il reste que les propos qui comportent une violence morale pavent la voie à des violences physiques », a-t-il observé, avant de critiquer « les vendeurs d'illusions » apparus, selon lui, durant la campagne électorale. Il s'est arrêté dans ce cadre sur la Troisième République, promise par le CPL, s'interrogeant sur son sens et estimant que son institution nécessite un amendement de la Constitution, nécessitant à son tour les deux tiers des voix au Parlement. « Est-ce que les partisans d'une Troisième République auront les deux tiers des voix à l'Assemblée pour pouvoir changer le régime », s'est-il interrogé.
M. Mitri a par ailleurs estimé que le rôle du président de la République se renforcera après les élections et qu'un gouvernement ne peut pas fonctionner tant que le veto est de rigueur. « Ce qui s'est passé au cours du dernier Conseil des ministres soulève de nombreuses interrogations », a-t-il conclu.