Rechercher
Rechercher

Liban - Éclairage

L’ouverture vers la région selon Obama, vue par un spécialiste libano-américain

La tenue, mardi, de la réunion sur l'Afghanistan, à laquelle doit participer l'Iran sur la base d'une invitation américaine, ainsi que la dernière visite du secrétaire d'État américain adjoint pour les Affaires du Moyen-Orient, Jeffrey Feltman, au Liban et en Syrie soulèvent de nombreuses questions. Y a-t-il un réel changement dans la politique américaine vis-à-vis de la région ? Ou bien s'agit-il de modifications de pure forme ? Les réponses sont encore un peu floues, car il est un peu tôt pour analyser la politique de la nouvelle administration américaine. De plus, au Liban, les spécialistes étant le plus souvent engagés dans un camp ou dans l'autre, il est difficile d'obtenir une analyse dépassionnée.
Akram Élias, Libano-Américain, président de la Capital Communications Group, une boîte de consultants établie à Washington, se défend, lui, d'être dans un camp ou l'autre. Il se contente de décortiquer les signaux lancés par le président Obama, dans un souci d'explication, non de militantisme. Souvent chargé par le département d'État d'expliquer la politique de cette grande puissance à des délégations étrangères de passage à Washington, il confie à L'Orient-Le jour que, pour bien comprendre ce qui se passe aux États-Unis, il faut revenir au choc du 11 septembre 2001. Les Américains ont été pris de court et ils n'avaient pas défini une véritable stratégie. La grande question était à l'époque : comment affronter ce phénomène de terrorisme qui se cache derrière l'islam ? Comme il y a plusieurs centres de décision au sein de l'administration, plusieurs idées ont été avancées, parmi lesquelles l'expansion de la démocratie dans les pays musulmans, pour à la longue produire des changements de régimes. Cette idée a été avancée par les néoconservateurs qui y ont ajouté le projet de provoquer une discorde entre les sunnites et les chiites pour affaiblir tous les musulmans. Elle a été adoptée par le président Bush et surtout par Dick Cheney. Les troupes américaines ont ainsi envahi l'Irak en quelques semaines et menacé ses deux voisins, la Syrie et l'Iran. C'est dans ce cadre qu'Akram Élias place la décision stratégique de la Syrie de retirer ses troupes du Liban au printemps 2005. Assad avait compris que la menace était sérieuse et il a préféré se dégager du bourbier libanais pour se consacrer à l'Irak. 2006, explique le consultant américain, a été une année charnière. En Irak, les troupes américaines étaient sérieusement mises en difficulté et la situation risquait d'échapper à tout contrôle, alors qu'au Liban, Israël n'a pas réussi à détruire la puissance du Hezbollah ni à provoquer une nouvelle guerre civile entre les Libanais. La pression interne a commencé à se faire sentir sur le président Bush, lequel a ainsi remplacé Donald Rumsfeld par Robert Gates au secrétariat d'État à la Défense et il a commencé à chercher une issue à la présence américaine en Irak.

Pas question de bombarder l'Iran
Akram Élias rapporte une réunion qui s'est tenue à la Maison-Blanche en 2007 et qui a regroupé autour du président une vingtaine de députés républicains. Ces derniers ont clairement déclaré au président, selon ce qui avait été rapporté dans la presse, que s'il menait une attaque contre l'Iran, ils rejoindraient les rangs des démocrates. En dépit des menaces relayées dans les médias, il n'était donc déjà plus question d'une guerre contre l'Iran. Il n'était même pas question de laisser Israël bombarder ce pays, car les États-Unis ont interdit aux avions israéliens de survoler l'Irak. De plus, les Israéliens n'avaient pas les moyens de faire un « carpet bombing » sur les installations nucléaires iraniennes, dispersées sur l'ensemble du territoire.
Le changement dans la politique américaine a donc commencé à cette époque, estime Akram Élias. Mais il est devenu évident avec le président Obama qui a ouvertement annoncé son intention de nouer le dialogue avec tout le monde. Le message qu'il a adressé aux Iraniens est ainsi une grande première. Il a choisi le 19 mars, fête du Norouz, le nouvel an iranien, qui est aussi le jour où les troupes américaines avaient envahi l'Irak. Il a évoqué à plusieurs reprises la République islamique d'Iran, montrant ainsi que, pour la première fois, l'administration américaine reconnaît le régime des mollahs. Il s'est aussi adressé aux dirigeants iraniens, alors que jusqu'à présent, les Américains ne s'adressaient qu'au peuple. C'est donc un changement radical.
De même, contrairement à ses prédécesseurs qui préféraient une approche séparée pour les dossiers régionaux, Obama se lance dans une politique globale et établit des liens avec les joueurs principaux, notamment l'Iran et la Syrie. Mais comme il s'apprête à entamer un dialogue avec Damas, il préfère conserver ses cartes pour les négociations futures. D'où la visite de Feltman à Beyrouth et en Syrie, accompagné de l'homme de la Maison-Blanche Shapiro. Feltman a adressé un message d'encouragement aux piliers du 14 Mars pour qu'ils ne croient pas que tout est déjà joué avec la Syrie. Mais ce message rassurant ne va pas, affirme Akram Élias, jusqu'à souhaiter que les élections n'aient pas lieu si l'opposition risque de les remporter. Avec l'élection d'Obama, le plus grand changement, précise l'expert, est que la politique des États-Unis n'est plus dictée par l'idéologie, mais par le pragmatisme. Et le dialogue reste son principal credo. Obama souhaite ainsi parvenir à une entente avec la Syrie et l'Iran notamment pour assurer un retrait digne de ses troupes d'Irak à la fin de 2010. Cela ne se fera sans doute pas au détriment du Liban, mais il ne souhaite pas non plus, selon Élias, intervenir aussi directement qu'auparavant dans les affaires libanaises.
Une équation difficile à respecter ?...
La tenue, mardi, de la réunion sur l'Afghanistan, à laquelle doit participer l'Iran sur la base d'une invitation américaine, ainsi que la dernière visite du secrétaire d'État américain adjoint pour les Affaires du Moyen-Orient, Jeffrey Feltman, au Liban et en Syrie soulèvent de nombreuses questions. Y a-t-il un réel changement dans la...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut