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« The Visit » Danielle BACHA

Contrairement à beaucoup de Libanais, je n’ai pas été choquée par la visite du général Michel Aoun à Damas car elle s’inscrit comme une suite logique à son alliance aux forces du 8 Mars et notamment au Hezbollah. Il est de plus parfaitement normal que des alliés se rendent visite et organisent des réunions tant pour confirmer leurs liens que pour accorder leurs violons en préparation aux prochaines législatives. Cela dit, je salue au passage le fait que Bachar el-Assad ait dit à Nicolas Sarkozy que « même si on nous donne le choix entre le Liban devenu un paradis et l’enfer, nous préférons aller en enfer » et j’espère sincèrement que le président syrien tiendra parole… À moins qu’il ne veuille signifier par là qu’il compte refaire du Liban un enfer pour qu’il puisse y retourner. À l’instar de la grande majorité des Libanais, je suis très heureuse d’être débarrassée de la présence syrienne, mais n’envisage nullement de leur déclarer la guerre ni même de leur vouer une haine viscérale jusqu’à la fin de mes jours. Je suis consciente que des relations de bon voisinage, voire même privilégiées, sont bénéfiques, souhaitables et même nécessaires pour les deux pays et que des positions hostiles seraient contraires au bon sens. Mais cela s’arrête là, point barre. Plus d’hégémonie, plus d’interférences dans nos affaires intérieures, plus de pressions pour que nous calquions de force notre politique à la leur et surtout plus de « décideurs-marionnettes » au sein de l’État libanais. Par ailleurs, si l’enquête internationale prouve que le régime syrien a trempé dans un ou plusieurs des assassinats, je suis bien évidemment pour que les coupables soient très sévèrement jugés et condamnés mais ne ferais pas pour autant de tout le peuple syrien mon ennemi. Après la visite et les hôtes, je passe au « Visiteur » qui, déjà avant de partir, se comparait au général de Gaulle en visite chez les Allemands (pauvre de Gaulle !). Ce visiteur qui, aussitôt arrivé et pris par la ferveur de l’accueil « émouvant et populaire », s’est embourbé lorsqu’une journaliste téméraire lui a demandé si les Syriens se sont excusés pour toutes les exactions commises au Liban. Se reprenant aussitôt, il trouve une dérobade en réclamant à « certains Libanais » (le gouvernement actuel) d’en présenter au peuple libanais – sous-entendu à lui puisqu’il considère qu’il représente avec ses alliés du 8 Mars la majorité des Libanais. Ah bon ? Ce ne sont pas les Syriens mais une partie des Libanais qui vous doivent des excuses, cher général ? En êtes-vous sûr ? Ne serait-ce pas plutôt vous qui devez des excuses aux Libanais ? Que ne vous empressez-vous pas d’en faire à toute une communauté que vous avez embarquée il y a quelques années dans une guerre d’élimination fratricide qui a facilité à la Syrie le contrôle de tout le pays ? Que faites-vous pour ces familles éplorées et déchirées par la perte de l’un des leurs sous les obus syriens, victimes d’une guerre « de libération » destructrice que vous avez déclenchée sans planification aucune et avec les résultats que l’on connaît ? Que racontez-vous aux mères des prisonniers dans les geôles syriennes, ces prisonniers (vos anciens soldats pour certains) dont vous n’hésitez pas parfois à nier même l’existence ? Leur chantez-vous que les « abominables Ghazi Kanaan et Abdel Halim Khaddam » sont partis et qu’ils étaient les seuls responsables de tous nos maux ? Que dites-vous à tous ces jeunes qui manifestaient pour vous pendant vos années d’exil – qui ont pâti de coups, blessures et nuits en tôle – et dont certains sont considérés par vous aujourd’hui comme vos ennemis parce qu’ils sont FL ou Kataëb ? Qu’attendez-vous pour en présenter à la famille de l’officier descendu à bout portant dans son hélicoptère et dont vous avez couvert l’assassinat ? Et depuis quand accordez-vous crédibilité et importance aux excuses ? N’avez-vous pas, il n’y a pas très longtemps, été le premier à dénigrer le mea culpa d’un certain Libanais duquel il est beaucoup plus vital de se rapprocher ? Oh que non, mon cher général, nous ne vous devons absolument rien – ni à vous ni à vos nouveaux amis – et c’est bien au contraire, de votre part et de celles de vos alliés, tous vos alliés, que les excuses doivent provenir. Vous devriez aussi, pour clore vos pèlerinages, faire un acte de contrition sur les tombes de nos frères, cousins, voisins et collègues qui sont morts fauchés par les orgues de Staline et les obus de 240 mm que vos hôtes nous avaient si aimablement distribués. Article paru le mardi 23 décembre 2008
Contrairement à beaucoup de Libanais, je n’ai pas été choquée par la visite du général Michel Aoun à Damas car elle s’inscrit comme une suite logique à son alliance aux forces du 8 Mars et notamment au Hezbollah. Il est de plus parfaitement normal que des alliés se rendent visite et organisent des réunions tant pour confirmer leurs liens que pour accorder leurs violons en préparation aux prochaines législatives.
Cela dit, je salue au passage le fait que Bachar el-Assad ait dit à Nicolas Sarkozy que « même si on nous donne le choix entre le Liban devenu un paradis et l’enfer, nous préférons aller en enfer » et j’espère sincèrement que le président syrien tiendra parole… À moins qu’il ne veuille signifier par là qu’il compte refaire du Liban un enfer pour qu’il puisse y retourner.
À l’instar de...