Une vague sans précédent d’arrestations s’abat depuis quelques semaines sur les milieux islamistes aux quatre coins du pays du Cèdre. Il s’agit à l’évidence d’éradiquer l’ensemble des ramifications du groupe insurrectionnel jihadiste Fateh el-Islam, qui avait défrayé la chronique sécuritaire libanaise entre mai et septembre 2007. Parmi les noms régulièrement cités par la presse comme hors-la-loi recherchés par les autorités libanaises, mais aussi plus récemment par leurs homologues syriennes, figure en premier chef la nouvelle direction collégiale du Fateh el-Islam, qui serait composée des Palestiniens Abderrahman Mohammad Awad dit Abou Chahrour et Oussama Amine...
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Du Tawhid au Fateh el-Islam, le parcours tortueux de Ghandi Sahmarani Naïm ASSAKER
Par ASSAKER Naïm, le 16 décembre 2008 à 00h00
La direction du groupuscule Fateh el-Islam n’est pas à Aïn el-Héloué, prétend le commandement palestinien du camp. Rien n’est moins sûr.
Une vague sans précédent d’arrestations s’abat depuis quelques semaines sur les milieux islamistes aux quatre coins du pays du Cèdre. Il s’agit à l’évidence d’éradiquer l’ensemble des ramifications du groupe insurrectionnel jihadiste Fateh el-Islam, qui avait défrayé la chronique sécuritaire libanaise entre mai et septembre 2007. Parmi les noms régulièrement cités par la presse comme hors-la-loi recherchés par les autorités libanaises, mais aussi plus récemment par leurs homologues syriennes, figure en premier chef la nouvelle direction collégiale du Fateh el-Islam, qui serait composée des Palestiniens Abderrahman Mohammad Awad dit Abou Chahrour et Oussama Amine el-Chéhabi dit Abou Dajana, ainsi que du ressortissant libanais Ghandi Sahmarani dit Abou Ramez, tous trois ressortissants du camp palestinien de Aïn el-Héloué, près de Saïda, où le siège du Fateh el-Islam a été transféré après la destruction du camp de Nahr el-Bared, au Liban-Nord.
Or Aïn el-Héloué, zone de non-droit connue pour abriter de nombreux militants islamistes radicaux de tous bords, semble pour l’instant épargnée par cette vaste entreprise de traque. L’armée libanaise n’étant pas habilitée à entrer dans les camps depuis l’accord du Caire (1969), le gouvernement a adressé aux différentes factions en présence à Aïn el-Héloué la demande officielle de livrer les intéressés. Réponse unanime du comité de sécurité pluripartite : Awad, Chehabi et Sahmarani auraient quitté les lieux et seraient introuvables.
J’ai pourtant rencontré récemment, sans difficulté majeure et à force d’obstination, l’un d’entre eux à son domicile, après quelques pérégrinations dans le dédale de ruelles insalubres du plus peuplé des camps palestiniens que compte le Liban.
De fil en aiguille, de rencontres de hasard en indications plus ou moins fiables, et après avoir arpenté les quartiers islamistes du camp, j’ai fini par atteindre logement de Ghandi Sahmarani, situé dans une modeste bâtisse anonyme de deux étages. Rien, pas le moindre signe d’une quelconque présence armée aux alentours pour la distinguer des autres édifices. J’apprendrai plus tard qu’en dépit des apparences, tout le voisinage regorge d’informateurs qui veillent avec dévotion et en toute discrétion sur la sécurité de leur chef. Je monte au premier étage et arrive sur une minuscule terrasse. À travers une porte métallique entrouverte, je m’annonce timidement et entend une voix pleine d’assurance me répondre sur un ton quasi militaire : « Appelez-moi cheikh Abou Ramez ! »
Un accent tripolitain
Après la première surprise, auditive, j’ai un second choc, visuel celui-là, dès que la porte s’ouvre en grand. Avec ses cheveux qui lui tombent sur les épaules et qui se mêlent à sa barbe fournie, sa casquette à l’envers, ses muscles de culturiste mis en valeur par son débardeur noir moulant et sa gouaille agitée, Sahmarani ressemble davantage au portrait type du caïd de banlieue française qu’à ces représentations austères et pieuses de martyrs tombés pour le jihad international qui fleurissent dans les ruelles du camp depuis plusieurs années.
Contrairement aux autres chefs de groupuscules salafistes et à l’immense majorité des habitants de Aïn el-Héloué, Sahmarani n’est pas palestinien, mais libanais et, plus précisément, originaire du nord du pays. Il parle avec un fort accent tripolitain. Après avoir milité dans les rangs du Tawhid, un groupe islamiste sunnite qui a lutté contre la présence syrienne au début des années 80 et qui a été démantelé en 1985, Sahmarani s’est réfugié dans le camp de Aïn el-Héloué, dont il n’est plus jamais ressorti depuis. Il déclare avoir envisagé un temps de s’exiler au Danemark, après un voyage à Chypre, mais a renoncé à ce projet lorsqu’il a appris que la législation de ce pays autorisait les unions homosexuelles. Or Abou Ramez se veut un fervent défenseur de l’islam et entend vivre en conformité avec les préceptes de sa religion. Une piété qui ne se manifeste pas dans la décoration de son appartement, dont aucun objet islamique ni aucune calligraphie coranique n’ornent les murs. En revanche, Abou Ramez dispose d’une impressionnante collection d’armes, ce qui confirme sa réputation de combattant.
Cause sacrée
Sahmarani sait qu’il est recherché par les autorités de son pays, mais minimise les crimes dont la justice l’accuse. « Le seul que je reconnais, déclare-t-il, c’est d’avoir combattu les Syriens, mais c’était un acte de résistance et non un crime. » Il ajoute, avec un peu d’amertume : « Moi, je n’ai pas commis autant de meurtres que Samir Geagea, mais je n’ai pas eu la chance d’être acquitté comme lui. » Ses liens avec le groupuscule islamiste radical du Jund el-Cham, accusé d’être lié aux attentats de 2007 contre la Finul ? Il dit avoir pris la décision de dissoudre le groupe. Ses relations avec l’organisation salafiste Isbat al-Ansar, qui a envoyé dans le passé de nombreux volontaires faire le coup de feu en Irak contre les forces de la coalition et qui s’affiche comme étant proche d’el-Qaëda sur le plan idéologique ? Abou Ramez affirme qu’il ne les fréquente plus depuis qu’il les soupçonne de jouer double jeu en collaborant discrètement avec les services de renseignements libanais et le Hezbollah.
Prompt à dénoncer la duplicité des organisations islamistes qui, comme Isbat al-Ansar, ont pignon sur rue dans le camp de Aïn el-Héloué, Abou Ramez refuse toutefois de s’étendre sur son implication dans les activités du Fateh el-Islam, reconstitué à Aïn el-Héloué au début de l’année 2008, après les événements tragiques de Nahr el-Bared. Il ne commentera pas les tentatives du groupe pour se faire accepter comme la branche d’el-Qaëda dans la sous-région. Abou Ramez confie seulement qu’il reste prêt à reprendre les armes. S’il n’a pas rejoint les troupes du Jordanien qaëdiste Abou Moussab Zarkawi en Irak, comme nombre de ses frères en islam, c’est simplement parce que, déjà trop connu des services de renseignements de Damas, il n’aurait jamais pu passer la frontière syrienne. Aujourd’hui, à l’heure où la communauté sunnite est – selon lui – menacée par les velléités de conquête du Hezbollah avec l’appui de la Syrie, ses priorités sont au Liban. En cas de besoin, il l’affirme, il n’hésitera pas à défendre la survie de ses frères, les armes à la main et à la tête de ses combattants. Telle est la « cause sacrée » de Sahmarani, qui avoue sa fierté d’être le seul Libanais à détenir une réelle autorité dans le camp palestinien de Aïn el-Héloué.
La direction du groupuscule Fateh el-Islam n’est pas à Aïn el-Héloué, prétend le commandement palestinien du camp. Rien n’est moins sûr.
Une vague sans précédent d’arrestations s’abat depuis quelques semaines sur les milieux islamistes aux quatre coins du pays du Cèdre. Il s’agit à l’évidence d’éradiquer l’ensemble des ramifications du groupe insurrectionnel jihadiste Fateh el-Islam, qui avait défrayé la chronique sécuritaire libanaise entre mai et septembre 2007. Parmi les noms régulièrement cités par la presse comme hors-la-loi recherchés par les autorités libanaises, mais aussi plus récemment par leurs homologues syriennes, figure en premier chef la nouvelle direction collégiale du Fateh el-Islam, qui serait composée des Palestiniens Abderrahman Mohammad Awad dit Abou Chahrour et Oussama Amine...
Une vague sans précédent d’arrestations s’abat depuis quelques semaines sur les milieux islamistes aux quatre coins du pays du Cèdre. Il s’agit à l’évidence d’éradiquer l’ensemble des ramifications du groupe insurrectionnel jihadiste Fateh el-Islam, qui avait défrayé la chronique sécuritaire libanaise entre mai et septembre 2007. Parmi les noms régulièrement cités par la presse comme hors-la-loi recherchés par les autorités libanaises, mais aussi plus récemment par leurs homologues syriennes, figure en premier chef la nouvelle direction collégiale du Fateh el-Islam, qui serait composée des Palestiniens Abderrahman Mohammad Awad dit Abou Chahrour et Oussama Amine...