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Actualités - OPINION

Tribune Questions « mobiles » au nouveau ministre des Télécommunications Par Nohad BAROUDI*

Un précédent article posait deux questions « électriques » au nouveau ministre de l’Énergie et de l’Eau (L’Orient-Le Jour du 19 juillet). Le présent article soulève deux questions concernant notre téléphonie mobile à l’intention du nouveau ministre des Télécommunications. Le ministre veut « baisser les tarifs de la téléphonie mobile, mais en maintenant constantes, voire en augmentant les recettes engrangées par l’État grâce à ce secteur » (L’Orient-Le Jour du 18 juillet). Qui peut rêver d’un objectif plus noble ? L’utilisateur paie moins cher, l’État fait plus d’argent, et tout le monde est content… Est-ce un vœu pieux ? Une mission impossible ? Ou une entreprise réalisable ? Pour essayer de le savoir, posons-nous deux questions. – Première question : Sachant que la moyenne mondiale de pénétration du téléphone portable est aujourd’hui de 50 %, que les pays occidentaux en sont à plus de 85 %, les pays du Golfe à plus de 100 % (Bahreïn et les Émirats arabes unis à plus de 150 % !), pourquoi donc le Liban est-il à la traîne avec seulement 32 % ? Une augmentation substantielle du taux de pénétration est donc très possible. Elle est même souhaitable, non seulement pour conforter les finances publiques, mais également pour accélérer la croissance économique. En effet, une étude de la London Business School publiée en 2005 affirme que chaque fois que le taux de pénétration en portables d’un pays augmente de10 %, le PIB (produit intérieur brut) croît de 0,5 %. – Deuxième question : Quelles sont les causes du retard que nous avons pris à développer notre parc cellulaire, alors que nous étions les pionniers dans ce domaine dans le monde arabe ? Cette question cadre se subdivise en une foule de questions annexes, toutes pertinentes. Nous nous limiterons à celles qui suivent. Est-ce le manque de demande de la part du public ? La qualité des services offerts ? Le coût élevé des communications ? Le duopole (monopole à deux) exercé par les deux opérateurs ? Est-il vrai que pour un parc actuel de 1,2 million d’abonnés, non moins d’un million utilisent des cartes prépayées ? En ce qui concerne la carte prépayée, est-il vrai que la ligne, qui coûte officiellement $50 chez Alfa et $52 chez MTC, ne se vend aujourd’hui qu’au marché noir à $120 et $130 respectivement ? Est-il vrai que, contrairement à d’autres pays, la carte prépayée est perdue (irrécupérable) si elle n’est pas rechargée dans un délai de cinq jours après son expiration ? Est-il vrai que chez Alfa, la carte est considérée expirée dès épuisement des unités, même si cela se fait en un seul jour ! Est-il vrai que le tarif en carte prépayée est de loin le plus cher du monde ? Chez MTC, la recharge de 80 unités d’une minute chacune coûte $42, donc la minute d’appel revient à $42/80 = $0,53. Cinquante-trois cents ! Chez Alfa, le calcul est plus compliqué, mais le résultat est pratiquement le même. Duopole oblige ! Est-il vrai que le tarif en ligne postpayée (cellulaire fixe) est l’un des plus chers du monde, avec 21 cents la minute (calcul basé sur la facture mensuelle d’un utilisateur qui se limite à 10 appels par jour d’une durée maximum de 2 minutes chacun, ayant souscrit uniquement aux services du clip et du signal d’appel) ? Est-il vrai qu’en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, le tarif en carte prépayée ou en ligne postpayée est entre 5 et 8 cents la minute d’appel ? Est-il vrai que, quelle que soit la nature de l’appel (ligne postpayée ou carte prépayée), toute fraction de minute est facturée une minute entière, de même que toute fraction d’unité est facturée une unité entière? Ce système injuste gonfle automatiquement la durée de l’appel (par exemple, un appel de quelques secondes est facturé une minute entière, tout comme un appel qu’on termine dès qu’il est transmis au répondeur du destinataire). Dans ma dernière facture détaillée, datée du 10 juillet 2008, je me suis amusé à faire l’addition de mes minutes effectives d’appel, j’ai obtenu 757 minutes alors que mon opérateur m’a facturé 974 minutes, soit 29 % de plus ! Est-il vrai que ce système, qui est toujours en vigueur au Liban, a été remplacé un peu partout par celui, plus équitable, de la facturation en temps réel à la pulsion près (qui peut-être d’une seconde ou même d’une fraction de seconde) ? Une fois ces questions soulevées, que faut-il faire ? Il ne fait aucun doute qu’une baisse des tarifs de la téléphonie mobile augmentera considérablement la demande de lignes au Liban. Il suffit de rapprocher deux faits pour s’en convaincre : 1- les tarifs démesurément élevés et 2- le taux de pénétration anormalement bas. Mais avant de s’attaquer à la question des tarifs, il faut lever certaines contraintes qui risquent de perturber l’utilisateur et retarder une saine progression de la demande. Je pense à des mesures concrètes du genre suivant : • Prolonger la durée de la carte prépayée, quitte à la rendre indéfinie si possible ; sinon, empêcher du moins qu’elle devienne irrécupérable après un certain temps. • Unifier la carte prépayée entre les deux opérateurs pour rendre la facturation de la durée d’appel plus claire et plus équitable : une unité égale une minute exactement, même la première minute d’appel. Pour préserver la concurrence (existe-t-elle en fait en situation de duopole ?), chaque opérateur pourra se distinguer par la nature et la qualité des services annexes qu’il offre dans ses cartes. • Une fraction de minute ne sera plus comptée comme une minute entière, mais facturée à sa juste durée, par pulsions électroniques d’une seconde maximum. L’annonce de ces mesures testera le degré de coopération des deux opérateurs. La mise en application de ces mesures nous dira si la demande de lignes, en conséquence, augmentera, baissera ou bougera peu, (mais n’oublions pas qu’il faudra appliquer ces mesures avant de toucher aux tarifs.) À mon avis, la demande augmentera, car l’utilisateur aura plus confiance et se sentira moins abusé. Que de fois avons-nous entendu autour de nous : « Mes unités se sont volatilisées, pourtant j’ai à peine parlé ! » Quant au taux de pénétration de la téléphonie mobile au Liban, il faudra mettre le paquet pour le tripler en quelques années. Les investissements nécessaires à ce projet, même s’ils sont importants, seront rapidement récupérés. Ce sont surtout des décisions courageuses qu’il faudra prendre... * Ancien secrétaire général du CDR
Un précédent article posait deux questions « électriques » au nouveau ministre de l’Énergie et de l’Eau (L’Orient-Le Jour du 19 juillet). Le présent article soulève deux questions concernant notre téléphonie mobile à l’intention du nouveau ministre des Télécommunications.
Le ministre veut « baisser les tarifs de la téléphonie mobile, mais en maintenant constantes, voire en augmentant les recettes engrangées par l’État grâce à ce secteur » (L’Orient-Le Jour du 18 juillet).
Qui peut rêver d’un objectif plus noble ? L’utilisateur paie moins cher, l’État fait plus d’argent, et tout le monde est content…
Est-ce un vœu pieux ? Une mission impossible ? Ou une entreprise réalisable ? Pour essayer de le savoir, posons-nous deux questions.
– Première question : Sachant que la moyenne...