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La situation La naissance du gouvernement désormais tributaire d’un accord au sein du 14 Mars Lélia MEZHER
Par MEZHER Lélia , le 07 juillet 2008 à 00h00
Voici deux semaines que « dans les prochaines 48 heures, un gouvernement d’union nationale verra le jour ». Or, jusqu’à présent, aucune fumée blanche à l’horizon, rien. Pour se défendre, un député du 14 Mars aime à souligner que « 50 jours ont été octroyés à l’opposition », alors « la majorité peut bien prendre trois jours pour se mettre d’accord sur les noms des ministrables au sein de l’alliance ». C’est un argument, mais il aurait peut-être été tout aussi utile de se mettre d’accord alors que l’opposition était en train d’atermoyer. De cette manière, le 14 Mars aurait certainement réussi à sortir intact de ces tractations gouvernementales. Aujourd’hui, son image s’en trouve incontestablement ternie par des luttes intestines sur les portefeuilles d’un gouvernement appelé à vivre quelques mois…
« C’est surtout au niveau des chrétiens du 14 Mars que tout se joue. Il y a d’abord l’impression que ces derniers sont sous-représentés, mais il y aussi la “bataille” du troisième chrétien du 14 Mars » qui s’articule autour de Ghattas Khoury, Boutros Harb et Nayla Moawad, indique un autre député de la majorité. Il ajoute : « Le fait que certains pensent que le gouvernement est une porte à la députation est regrettable. Il faudrait peut-être réussir un jour à banaliser le pouvoir dans ce pays. » Peut-être en séparant, par une loi, la fonction de député de celle de ministre, comme cela est d’usage en France.
Chrétiens et Travaux publics
À l’heure qu’il est, la majorité n’a toujours pas annoncé la fin des tractations inter-14 Mars et ce, pour les raisons suivantes : d’abord, un désaccord autour du pôle de la majorité auquel reviendra le portefeuille des Travaux publics. En effet, Samir Geagea, Walid Joumblatt et Mohammad Safadi réclamaient hier tous les trois ce maroquin, comme si « la souveraineté du Liban passait finalement par le goudron », pour reprendre les termes d’un conseiller d’une de ces trois personnalités. « Il est inconcevable que le bloc tripolitain ne soit pas représenté dans le prochain gouvernement », affirmait d’autre part, et plus sérieusement, une source proche de M. Safadi. « C’est quand même la deuxième ville sunnite du pays, une ville où Saad Hariri a taillé des alliances électorales. On ne peut pas exclure tout un pôle du gouvernement, puis chercher, deux semaines avant les élections, à s’allier avec lui. C’est aberrant », ajoute la source précitée, qui poursuit en soulignant que « tout partenariat a un coût, il implique des concessions réciproques ». Une notion que les responsables locaux semblent rechigner à admettre, à accepter, même au lendemain d’une crise politique aussi aiguë que celle par laquelle le pays est passé. À méditer. En soirée, une source autorisée indiquait que les Travaux publics auraient été attribués à Ghazi Aridi. Un député du bloc Joumblatt avait affirmé un peu plus tôt que « Walid bey insiste pour avoir les Travaux publics ».
En attendant donc la naissance proprement dite du gouvernement, une source proche des Forces libanaises insistait hier pour dire que seuls subsistent « des problèmes minimes ». Le député du bloc Joumblatt précité affirmait, quant à lui : « Nous sommes sur la bonne voie. Il existe des impondérables de dernière minute. » Sur la nature de ces impondérables, il indique : « Vous savez, certaines personnes disent : “Je veux tel portefeuille, je n’aime pas tel portefeuille.” Tous disent nous “n’avons pas de problème”, mais si c’était vrai, il y aurait déjà eu un gouvernement. » De plus, le fait que Saad Hariri soit en déplacement à l’étranger est aussi de nature à retarder la naissance du nouveau gouvernement : « Fouad Siniora a commencé par le plus dur, là où c’était le plus compliqué. Mais Saad Hariri n’est pas là, et c’est pour cela aussi que le cabinet n’a pas encore été formé », ajoute le député précité. Certains, à l’instar d’Antoine Zahra et Ahmad Fattouh, ont tenu à dénoncer et à rejeter les « rumeurs » de différends et de luttes intestines au sein de la majorité. « Les FL n’ont pas posé de conditions préalables à la formation du gouvernement », a indiqué M. Zahra, pendant que M. Fattouh soulignait que « les rumeurs concernant des problèmes au sein du 14 Mars sont infondées ». Robert Ghanem a, quant à lui, choisi de rappeler au gouvernement en instance de création ses « responsabilités » en indiquant qu’il n’hésiterait pas à lui ôter sa confiance au moindre faux pas.
D’autre part, la majorité se sent marginalisée, surtout sur le plan chrétien, insistent les responsables du 14 Mars. Elle estime que les portefeuilles qui lui ont été attribués, surtout au niveau chrétien, sont inconsistants. En fait, souligne un député de la majorité, cela démontre que « le problème politique, de fond, n’a toujours pas été réglé. Ce n’est qu’une trêve ». Et c’est peut-être pour cela que ce cabinet est aussi compliqué à mettre en place.
Le cas Arslane
Côté opposition, tous les détails n’ont pas non plus été réglés. Ainsi, au sein du bloc du Hezbollah, seul le nom de Mohammad Fneich semble être définitif. Talal Arslane (qui se verrait de la sorte récompensé pour son soutien au Hezb durant les incidents de mai dernier), refuse quant à lui de se voir remettre un ministère d’Etat et insiste pour avoir un portefeuille consistant.
En dépit de ces complications qui subsistent, Mohammad Raad a malgré tout tenu à souligner hier que tous les ministères de l’opposition constituent « la part du Hezbollah car nous n’avons pas de différends entre nous ». Si le Hezb a bel et bien consenti des concessions au bénéfice du Courant patriotique libre, il reste que « la part de l’opposition c’est en fait tous les ministères qui lui reviennent car l’opposition est unie », a poursuivi M. Raad. Ali Bazzi a, quant à lui, prévu pour « demain (aujourd’hui) ou après-demain (demain) » la naissance du gouvernement, pendant que Hassan Fadlallah indiquait que l’opposition « n’a pas seulement obtenu ce qu’elle voulait, elle a aussi réussi à se mettre d’accord ». Une allusion à peine voilée aux difficultés rencontrées aujourd’hui par le 14 Mars.
En somme, et s’il fallait – encore – s’aventurer à fixer une date pour la naissance de ce gouvernement, et malgré les affirmations de Waël Bou Faour qui soutenait hier que celle-ci pourrait naître « à n’importe quel moment », un député du 14 Mars soutenait que « rien ne se passera avant mercredi ».
Voici deux semaines que « dans les prochaines 48 heures, un gouvernement d’union nationale verra le jour ». Or, jusqu’à présent, aucune fumée blanche à l’horizon, rien. Pour se défendre, un député du 14 Mars aime à souligner que « 50 jours ont été octroyés à l’opposition », alors « la majorité peut bien prendre trois jours pour se mettre d’accord sur les noms des ministrables au sein de l’alliance ». C’est un argument, mais il aurait peut-être été tout aussi utile de se mettre d’accord alors que l’opposition était en train d’atermoyer. De cette manière, le 14 Mars aurait certainement réussi à sortir intact de ces tractations gouvernementales. Aujourd’hui, son image s’en trouve incontestablement ternie par des luttes intestines sur les portefeuilles d’un gouvernement appelé à...