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Société - Les « manan-féréla » traitent plus de deux tonnes de sachets par jour Le recyclage des emballages en plastique, une activité en plein essor à Abidjan

Pieds et mains plongés dans les eaux insalubres des caniveaux d’Abidjan, des milliers d’hommes et de femmes, surnommés les « manan-féréla », passent leurs journées à collecter et laver des sacs usagés, qui seront recyclés en objets en plastique « Made in Côte d’Ivoire ». Depuis plusieurs années, ces « manan-féréla » (vendeurs de sachets, en langue malinké) se sont multipliés autour des différents points d’eau de la capitale économique ivoirienne pour y traiter plus de deux tonnes de sachets par jour. « À Abidjan, on connaissait les “fanico” (laveurs de linge, en malinké), maintenant il faut parler des “manan-féréla” », explique un responsable municipal, Pascal Amichia, qui décrit une « activité en plein essor ». La crise politico-militaire, qui a éclaté en 2002 en Côte d’Ivoire, a « considérablement réduit l’approvisionnement en polystyrène, une substance chimique qui rentre dans la fabrication des objets en plastique, augmentant ainsi le coût de production », poursuit M. Amichia. Pour y faire face, certains industriels se sont alors lancés dans la récupération et le recyclage de déchets, comme les emballages ou les sacs en plastique. La précollecte de ces déchets se fait à la décharge publique d’Akouédo, à la périphérie d’Abidjan, où sont déversées plus de 3 000 tonnes d’ordures ménagères par jour, produites par les plus de quatre millions d’habitants de la ville. Une fois rassemblés, les sachets et autres poches sont acheminés au quartier Wangler, dans la zone industrielle de Yopougon, où les eaux usées de plusieurs usines sont rejetées dans de larges caniveaux. À cet endroit, des jeunes filles accroupies dans l’eau qui leur arrive jusqu’aux genoux nettoient sans aucune précaution d’hygiène des sachets tous les jours, de l’aube au coucher du soleil. Le procédé consiste à plonger les sachets dans l’eau puis d’un tour de bras à les jeter sur le bas-côté pour le séchage. « Nous nous débrouillons ici pour nourrir nos familles malgré les risques de maladies », explique Aminata, 16 ans, un pagne noué autour des hanches et les cheveux protégés par un foulard. Une fois séchés, les sacs sont conditionnés sous forme de balles puis pesés et vendus aux industriels, la plupart des commerçants libanais. « Nous achetons le kilo à 100 F CFA (0,15 euro) et le revendons deux fois plus », explique un intermédiaire, Sidibé Cheick-Oumar, qui affirme gagner près de 1 500 F CFA (2,28 euros) par jour. Les sachets sont ensuite broyés pour obtenir la poudre qui servira à fabriquer des objets, en particulier des ustensiles de cuisine ou les bâches utilisées comme toiture lors des nombreuses cérémonies qui ponctuent la vie quotidienne (fêtes, funérailles). « La demande est forte. Nous pouvons acheter chaque jour pour près deux millions de F CFA (plus de 3 000 euros) de marchandises recyclées », explique un agent de Kim-Plastique, une usine locale détenue par un Coréen. Cette hausse de la demande a donné l’idée à certains « manan-féréla » de moderniser cette activité très artisanale. « Nous sommes en train de monter un dossier afin d’obtenir un appui financier nous permettant d’acheter une broyeuse qui donnera une valeur ajoutée à notre activité », explique Oumar Yéo, un des représentants des « manan-féréla » d’Abidjan. Cette aide financière permettra aussi d’améliorer des « conditions de travail exécrables », selon lui. « Les eaux des caniveaux contiennent des produits chimiques parfois toxiques, mais nous y allons tout de même pour assurer notre pain quotidien », ajoute-t-il avec fatalité.
Pieds et mains plongés dans les eaux insalubres des caniveaux d’Abidjan, des milliers d’hommes et de femmes, surnommés les « manan-féréla », passent leurs journées à collecter et laver des sacs usagés, qui seront recyclés en objets en plastique « Made in Côte d’Ivoire ».

Depuis plusieurs années, ces « manan-féréla » (vendeurs de sachets, en langue malinké) se sont...