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La réforme de la Caisse indéfiniment retardée par la tension politique Le retour de Trad Hamadé au ministère du Travail vise à empêcher le 14 Mars de contrôler la CNSS

Les tiraillements politiques paralysent la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) et en retardent indéfiniment la réforme. Pour se faire rembourser, il faut attendre parfois deux ans. Que se passe-t-il donc au ministère du Travail, ministère de tutelle de la Caisse ? La décision du ministre démissionnaire Trad Hamadé de reprendre du service, à la veille de l’expiration du mandat du conseil d’administration de la CNSS, est-il lié à cette question et comment ? Dominé par des figures du 14 Mars, le patronat va-t-il « mettre la main » sur le prochain conseil d’administration de la caisse ? Autant de questions qu’on est en droit de se poser, avec l’expiration hier du mandat de cette instance. L’un des effets immédiats du retour de M. Trad Hamadé va certainement se traduire par le gel du processus qui aurait pu conduire à une modification de l’équilibre politique au sein du conseil d’administration de la CNSS. Celui-ci comprend 26 membres, dix représentants du patronat, dix des syndicats et six membres nommés par le gouvernement. L’équilibre confessionnel au sein de ce conseil n’est pas en jeu, puisque tout déséquilibre qui pourrait se produire, à ce niveau, après l’élection des représentants du patronat et des syndicats, est automatiquement corrigé par le gouvernement, qui procède à des nominations compensatrices. C’est donc bien le déséquilibre politique qui a poussé M. Hamadé à reprendre du service. Le 14 Mars majoritaire En effet, des élections successives au sein des instances représentatives du patronat ont aidé à modifier cet équilibre au sein des associations économiques, où le courant du 14 Mars est désormais majoritaire. Ces élections se sont faites sur injonction du ministre intérimaire du Travail, Hassan Sabeh, agissant au nom du gouvernement. Elles ont donné les résultats suivants : au sein de l’AAssociation des commerçants, Ali Charif (sunnite, Courant du futur) a remplacé Nadim Assi (chrétien, indépendant) ; au sein de la fédération des professions libérales, Samir Doumet (orthodoxe, Futur), a remplacé Mehdi Sleimane (chiite-Amal) ; au sein du secteur hôtelier et des professions du tourisme, Pierre Achkar (maronite, 14 Mars) a remplacé Bahjat Kanounji (sunnite, indépendant) ; dans le secteur de l’assurance, Fateh Bekdache (sunnite, Futur) a remplacé Antoine Wakim (catholique, indépendant) ; au sein de l’ordre des médecins, Saleh Dbaïbo (sunnite, Futur), a remplacé Sami Chartouni (maronite, indépendant), tandis que Makram Sader (maronite, 14 Mars) se succédait à lui-même dans le secteur bancaire. Comme on le constate, pas une figure chiite dans cet aréopage... Restait l’Association des industriels, présidée par Fadi Abboud. Les élections au sein de cette association n’ont pu avoir lieu, mais son président ne saurait plus compter sur des suffrages d’indépendants pour être élu à la présidence du conseil d’administration de la caisse, comme prévu. Il n’en fallait pas plus pour que les milieux de l’opposition crient au hold-up, accusant le 14 Mars de vouloir écarter Fadi Abboud, au profit d’une figure du 14 Mars, ainsi d’ailleurs que le président de la Caisse, Dr Toubia Zakhya, sous prétexte qu’il est proche de Michel Sleimane. Objectif ultime du « hold-up », selon l’opposition : la privatisation de la CNSS et sa « vente » à des compagnies d’assurances... Prise de pouvoir La « prise de pouvoir » du 14 Mars au sein du conseil d’administration de la Caisse était, selon les observateurs, d’autant plus certaine que l’équilibre au sein des instances syndicales ne pouvait être modifié, compte tenu des procès en cours contestant la représentativité de certains syndicats, accusés d’être des créations fictives des forces politiques dominantes à l’époque de la tutelle syrienne. C’est la raison avancée pour justifier le fait qu’aucun appel à l’élection des représentants des syndicats au sein du conseil d’administration de la CNSS n’a été lancé. Qu’attendre désormais ? Les milieux informés estiment que le conseil d’administration actuel de la Caisse sera reconduit dans ses fonctions, pour un mois ou deux, en attendant qu’un consensus se fasse sur la composition du prochain conseil et que des « élections régulières » se déroulent aussi bien au sein des instances patronales que syndicales. On voit comment le consensus peut jouer, dans ce cas précis, contre la démocratie. On voit aussi comment c’est toujours le provisoire qui dure. On voit enfin comment la paralysie d’une institution peut se renforcer, puisque sans gouvernement, on ne saurait procéder à la nomination des représentants du gouvernement au sein de la Caisse... Rappelons à ce sujet que le mandat du conseil d’administration de la Caisse a déjà été prorogé à deux reprises. Les intérêts des assurés Dans ces méandres interminables de la politique politicienne, les intérêts des assurés sont-ils menacés ? Oui et non. Non, parce que ces calculs et intrigues sont purement politiques. « N’effrayons pas les assurés pour rien ; ces péripéties n’influent pas sur le fonctionnement de la Caisse », assure le président de la CNSS, Toubia Zakhya. Oui, parce que ces tiraillements retardent indéfiniment la réforme de cette Caisse, dont toutes les structures sont vétustes et ont besoin de modernisation. Qu’il suffise de dire, à ce stade, que les remboursements des factures présentées à la caisse ont au moins un an et demi de retard, souvent plus. Et la raison de ce retard est simple : la CNSS est toujours dotée d’un système comptable de boutiquier, c’est-à-dire qu’elle ne possède pas une comptabilité analytique qui sépare les budgets de chaque catégorie de prestation : les indemnités de fin de service, les soins de santé et les allocations familiales. De ce fait, la Caisse ne peut commencer à rembourser les assurés, pour chaque année comptable, qu’à la fin de cette année, après le remboursement par la branche des soins de santé (financée par les assurés et le patronat) des prêts effectués auprès de la branche des indemnités de fin de service, financée par le patronat. Sachant par ailleurs que ce calcul est rendu plus complexe qu’il n’y paraît par les retards enregistrés dans le règlement de leurs quotes-parts par les patrons... Les réponses Ce qui vaut pour les particuliers vaut aussi pour les hôpitaux, qui se plaignent régulièrement des retards mis par la CNSS à les rembourser, et dont les dettes se chiffrent par milliards de livres, ce qui les plonge régulièrement dans des crises de liquidités. À ces anomalies, il existe des réponses. Des solutions, des réformes possibles ont été avancées, qui pourraient mettre la CNSS au diapason du XXIe siècle. Ainsi, la Banque mondiale a avancé 800 000 dollars, sous forme de travaux de réforme. Il était même question de faire un emprunt de 12 millions de dollars, pour la même raison. La guerre de juillet-août 2006 a tout gelé et empêché l’excellent Toubia Zakhya, fraîchement nommé président de la Caisse, de déployer son savoir-faire pour en assainir le fonctionnement... Mais pour réussir une réforme, un minimum de stabilité et de sérénité est indispensable. Fady NOUN
Les tiraillements politiques paralysent la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) et en retardent indéfiniment la réforme. Pour se faire rembourser, il faut attendre parfois deux ans. Que se passe-t-il donc au ministère du Travail, ministère de tutelle de la Caisse ? La décision du ministre démissionnaire Trad Hamadé de reprendre du service, à la veille de l’expiration du mandat...