Colloque international sur la production littéraire des melkites avant l’ère ottomane (750-1516) La fraternité entre Arabes chrétiens et musulmans, ou comment se réapproprier l’histoire Fady NOUN

Un important colloque international sur la production littéraire des melkites avant l’ère ottomane (750-1516) se tiendra aujourd’hui et demain, à l’initiative du Centre de documentation et de recherches arabes chrétiennes (Cedrac) de l’USJ, à l’Oasis Saint-Basile du couvent de l’Annonciation des sœurs basiliennes chouérites, à Zouk Mikaël. L’ouverture du congrès sera marquée par des allocutions de Mgr Georges Khodr, métropolite grec-orthodoxe du Mont-Liban, et du Pr René Chamussy s.j., recteur de l’USJ. Le colloque explorera divers aspects de la production littéraire des melkites. Ses exposés porteront sur les disciplines suivantes : philosophie, études bibliques, théologie, dialogue œcuménique, études islamiques et rapports islamo-chrétiens, études druzes et rapports druzo-chrétiens, histoire ainsi que des exposés purement codicologiques. L’importance de ce colloque international n’échappera à personne, d’abord par le nombre des intervenants, plus de 25 spécialistes, dont une quinzaine venus d’Occident et d’autres pays arabes (Égypte, Tunisie, Syrie), tous considérés comme des autorités dans leur domaine. Mais l’importance du colloque va ensuite bien au-delà de cet aspect purement formel. La mise en valeur de l’histoire du patrimoine arabe chrétien, en l’occurrence melkite, est désormais une nécessité de civilisation pour un monde arabe dont 95 % de la population est musulmane, mais qui n’en compte pas moins une composante chrétienne, dont le rôle historique n’est pas proportionnel à son importance numérique. Du reste, avant d’en faire comprendre l’importance aux musulmans du monde arabe, il convient d’en faire prendre conscience aux Arabes chrétiens eux-mêmes, un excellent antidote au sentiment de déracinement qui les prend par moments. On saisit mieux, dans ce contexte, que le concept d’arabité est culturel et non religieux. Le colloque tient également son importance du fait qu’il met en présence l’un de l’autre Orientaux et orientalistes, et constitue ainsi pour eux un lieu indispensable et irremplaçable de rencontre et d’échanges. Le colloque, et c’est là un de ses objectifs, contribuera à la connaissance et à l’écriture d’une Histoire du patrimoine arabe des chrétiens en quatre volumes, que le Cedrac prépare depuis une dizaine d’années et dont le premier tome doit paraître en 2008. L’un des facteurs de cohérence de toutes les interventions consiste dans le fait que tous les auteurs chrétiens ont pensé et développé leur théologie en contexte islamique. Qu’il s’agisse du dogme (Trinité, incarnation, divinité du Christ), de la spiritualité ou de la morale, la foi chrétienne est toujours présentée en tenant compte de l’arrière-fond musulman. C’est dire la grande valeur culturelle de ce colloque. Les exposés en sont, certes, spécialisés. Mais ils sont le complément concret indispensable aux grands principes théoriques sur la fraternité entre Arabes chrétiens et musulmans. Ils prouvent concrètement qu’ils font partie d’une même culture, qu’ils sont frères et leur permettent de se réapproprier leur histoire.