Le président de la Chambre des députés, Nabih Berry, a surpris les milieux politiques locaux et à l’étranger en faisant échouer l’initiative du patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir.
En présentant une liste de présidentiables en vue d’un accord entre les divers bords politiques, Bkerké avait pourtant accepté de limiter le rôle des parlementaires dans le choix du futur chef de l’État.
La présentation de la liste avait été précédée d’une prise de position solennelle de la part du patriarche Sfeir, optant pour un président de consensus à égale distance de toutes les parties et élu au quorum des deux tiers.
Bkerké rejoignait ainsi l’initiative du président Berri lui-même, faite le 31 août dernier. Bien que le paysage politique libanais soit partagé horizontalement et qu’un accord entre les deux bords (14 Mars et 8 Mars) sur le nom d’un candidat soit difficile à obtenir, Bkerké avait proposé au moins deux noms indépendants des deux bords, MM. Robert Ghanem et Michel Eddé. Bien plus, le patriarche Sfeir a tenu à respecter l’équilibre du système politique émanant de Taëf en évitant les candidats « forts » (le commandant en chef de l’armée, ou des
dirigeants de partis politiques) pour permettre au prochain gouvernement d’entente nationale d’être le chef du pouvoir exécutif effectif.
Cependant, cette initiative de Bkerké supposait une rencontre entre les forces politiques représentant les composantes communautaires libanaises. En effet, le partage horizontal du paysage politique libanais ne dispense nullement du respect des rouages du régime politique libanais consensuel entre les composantes communautaires dans ses dernières régulations que sont la Constitution et Taëf. L’aboutissement de cette initiative nécessitait une réaction positive de MM. Saad Hariri, Nabih Berry et Walid Joumblatt, le général Aoun ainsi que le Hezbollah étant des « outsiders » relativement aux rouages de Taëf, Bkerké de son côté pouvant assurer une adhésion des composantes chrétiennes du 14 Mars à un éventuel accord sur un des présidentiables figurant sur la liste. Saad Hariri et Walid Joumblatt ont rejoint le patriariche Sfeir dans ses choix, mais c’est le président Berry qui créa la surprise. Celui-ci, âpre défenseur de Taëf qu’il avait favorisé et qui, à son tour, le favorisa, le lâcha au moment crucial et échoua à renflouer les candidats Ghanem et Eddé.
La surprise fut à son comble lorsque le chef d’Amal persista en faisant avorter l’élection du commandant en chef de l’armée, le général Michel Sleimane. Cette candidature est en conformité totale avec les dispositions de Taëf. En effet, le général Sleimane dirige une armée bâtie à l’ombre du pouvoir établi après l’accord sur le nouveau pacte national libanais (Taëf). De plus, à la tête de l’institution militaire, il suit une politique qui respecte les aspirations des différents bords, ainsi que ceux des citoyens, à la sécurité et la stabilité.
Poser des conditions préalables à son élection serait affaiblir son futur pouvoir, qu’il devra ériger autour d’un rôle puissant de l’armée dans le maintien de l’ordre. La tâche première d’une présidence Sleimane sera de créer une unanimité des Libanais autour de l’État et d’insuffler un nouveau sentiment national rassembleur et défendeur de l’indépendance et de la souveraineté. La présidence Sleimane devra être libre de ses mouvements, adossée à l’institution militaire pour préserver la paix civile. Le président Berry, en sa qualité de leader politique, ne pourrait qu’approuver cette candidature et lui donner toute sa portée, car l’armée est le dernier rempart du régime de Taëf. Son adhésion totale et immédiate à la candidature Sleimane, d’ailleurs souhaitée par les ministres arabes des Affaires étrangères, sera une des pierres angulaires dans la protection du système politique, alors que la solidarité avec le général Aoun et le Hezbollah fera saborder Taëf.
Lorsque Aoun avait refusé de céder le pouvoir à la légalité issue de Taëf, il y eut octobre 1990, qui marginalisait naturellement Aoun et la majorité des chrétiens. Le refus du président Nabih Berry d’adhérer à la candidature Sleimane débouchera-t-il sur une application par la force de Taëf, mais cette fois-ci au détriment des… chiites ?
Ibrahim K. GEMAYEL
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Le président de la Chambre des députés, Nabih Berry, a surpris les milieux politiques locaux et à l’étranger en faisant échouer l’initiative du patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir.
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La présentation de la liste avait été précédée d’une prise de position solennelle de la part du patriarche Sfeir, optant pour un président de consensus à égale distance de toutes les parties et élu au quorum des deux tiers.
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