Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Un pronostic assez répandu : le statu quo durerait jusqu’au printemps Philippe ABI-AKL

Il se répète de tout côté que la crise est vraisemblablement appelée à durer jusqu’au printemps. Et certains pessimistes soutiennent même que la présidence de la République libanaise risque de demeurer vacante jusqu’à la conclusion d’une paix régionale ! Ce qui est certain, c’est que les protagonistes étrangers vont continuer, chacun de son côté et à sa manière, de tirer sur la corde. D’exploiter cette carte-soupape libanaise rendue si commode à manipuler par les divisions internes. Dans un tel contexte, il est heureux que ces divisions s’effacent devant la nécessité d’organiser le chaos, selon l’expression rapidement popularisée pour éviter l’implosion, ou l’explosion si on préfère, politique du pays et prévenir cette reprise de guerre civile que le vice-ministre iranien des AE nous prédit si aimablement. La convention tacite, si elle prohibe des remous de rue, n’interdit toutefois ni les menaces ni une rude bataille des mots. L’opposition soutient ainsi que les majoritaires, se conformant à l’en croire à des directives américaines, ont voulu le vide. La preuve en étant, toujours à l’en croire, que les loyalistes ont rejeté, sans même les examiner vraiment, les propositions Aoun de dernière minute. Le but étant de porter au pinacle ce Fouad Siniora si apprécié à la Maison-Blanche, toujours selon les opposants. Les prosyriens et leurs partenaires ajoutent que la partie adverse, toujours sur les conseils sournois de Washington, s’est arrangée pour faire capoter les efforts français et l’initiative listée de Bkerké en posant un veto sur certains noms avancés par le patriarche Sfeir. Dans la version défendue par les proches de Damas et leurs associés, les Américains ont commencé à mettre des bâtons dans les roues du char français depuis la conférence d’Istanbul. Ils citent à ce propos les mises en garde de Condoleezza Rice. Et affirment mordicus qu’en Turquie, Kouchner et Moallem s’étaient pourtant entendus sur six points devant faciliter la conclusion de la présidentielle libanaise dans les délais constitutionnels. Les opposants enchaînent sur David Welsh. Selon eux, cet officier traitant américain du dossier régional, et incidemment libanais, a démarché les Français à Paris pour fausser leur vision du processus par des objections insidieuses. Il a ensuite renoncé à venir à Beyrouth, comme initialement annoncé, lorsque la Maison-Blanche lui aurait fait comprendre qu’il n’y aurait pas de présidentielle. Car le vide institutionnel au Liban constitue une carte intéressante à exploiter. Dans le cadre, notamment, de la sourde rivalité diplomatique avec l’Europe, la France et le Vatican. Et c’est pourquoi, concluent les opposants, les loyalistes se sont vu interdire d’élire un président à la majorité absolue. La réplique En face, les loyalistes ripostent en mettant en cause le camp prosyrien, Hezbollah en tête. Ils affirment que le vide arrange bien ce parti, qui a son projet d’un Liban différent. Et qui ne cache pas qu’il veut annuler, ou à tout le moins amender substantiellement, le pacte de Taëf pour un partage des sièges et des pouvoirs, non plus sur une base paritaire de fifty-fifty, mais de 2/3 au profit des musulmans. Sans compter que le Hezb sert directement, selon les majoritaires, les desseins d’un axe irano-syrien pour qui le dossier libanais constitue un atout de pression majeur dans le cadre du bras de fer avec les Américains, de l’hostilité avec Israël. Mais aussi, dans le cadre du conflit larvé avec les pays arabes modérés, notamment avec l’Arabie saoudite. Les loyalistes notent que dans la dernière ligne droite, le Hezb a pratiquement annulé le mandat négociatoire confié au président Berry et rejeté le consensus du moment qu’il a prétendu n’accepter que Aoun. Ou le substitut que le général désignerait. Ils ajoutent que le Hezb, fer de lance de l’opposition, s’est dressé contre un processus démocratique, pourtant déjà assez mal en point, du fait qu’il y a eu présélection pour refuser toute compétition, même réduite à deux participants, sous prétexte que l’entente devrait obligatoirement porter sur un seul nom. Les majoritaires se disent amusés et non abusés par ce qu’ils appellent les grosses ficelles syriennes. Ils soulignent que le régime Assad, relancé tant de fois avec insistance par les Français et par les Européens, a fait mine de mettre de l’eau dans son vin en promettant de faciliter la présidentielle libanaise. Alors, et à l’heure, qu’il ordonnait à ses instruments locaux de tout saboter. Au passage, les majoritaires relèvent que la Syrie et l’opposition ont été déçues par les ultimes prestations du président Lahoud. Damas en aurait attendu, selon eux, qu’il formât un second gouvernement avant de quitter Baabda. Il ne l’a pas fait. Et cela explique pourquoi, toujours selon les majoritaires, nul cadre opposant, qu’il soit de chez Berry, du Hezb ou de chez Aoun, n’a été le saluer au moment de son départ. Enfin, les majoritaires affirment que les prosyriens se servent du général Aoun comme d’un paravent commode en l’encourageant dans son rôle de leader maronite représentatif et en applaudissant son approche populariste actuelle, consistant à organiser chez lui des concertations interchrétiennes élargies, en vue de paver la voie à des manifestations, pacifiques sans doute, mais de rue quand même. Tout cela permet aux prosyriens de soutenir, à l’instar d’Assad, que le problème se situe au niveau des maronites seulement et qu’ils s’en lavent les mains. Et de rappeler en conclusion que le régime syrien avait prédit, il y a déjà deux mois, qu’Émile Lahoud entrerait dans l’histoire comme ayant été le dernier président chrétien du Liban. Sans compter les avertissements fraternels relatifs à une dégradation sécuritaire dans ce pays. Partant de là, des observateurs croient savoir que les Français continuent à démarcher inlassablement les Syriens pour parvenir à un déblocage assez rapide, dans les deux semaines, sur un nom ou sur une liste qui ne serait pas nécessairement conforme à celle de Bkerké.
Il se répète de tout côté que la crise est vraisemblablement appelée à durer jusqu’au printemps. Et certains pessimistes soutiennent même que la présidence de la République libanaise risque de demeurer vacante jusqu’à la conclusion d’une paix régionale !
Ce qui est certain, c’est que les protagonistes étrangers vont continuer, chacun de son côté et à sa manière, de tirer...