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Actualités - CHRONOLOGIE

Portrait Nadim Ghantous, superbanquier libanais à Khartoum

Si un titre de « Banquier de l’année » était décerné au Soudan, où le Darfour ne fait pas oublier les affaires, il irait au Libanais Nadim Ghantous, patron de la Byblos Bank. « Bonne gestion et peu de créances douteuses, parfait » : Wahel Abdallah, délégué du Fonds monétaire international (FMI) auprès de la Banque centrale soudanaise, exprime à l’AFP en résumé le jugement laudatif du marché. Pour ce banquier de 45 ans, installé à Khartoum depuis 2003, après avoir vécu à Accra, Beyrouth, Québec, Ryad, Koweït ou New York, « le Soudan, ce n’est certes pas la Suisse. Sauf que là-bas je m’ennuierais à périr ! ». Quand la Byblos, troisième banque du Liban, lui a proposé d’aller dans ce pays en guerre civile, soumis à un embargo américain et dirigé par une caste militaro-islamiste, il a répondu oui « d’instinct et sans regret ». À Khartoum, avec une équipe très réduite, il a créé la Byblos Africa, détenue à 65 % par la maison mère, dans un paysage bancaire aussi totalement islamisé que déserté par les grands établissements occidentaux. Le plan d’affaires prévoyait trois années en rouge. Dès la première, le profit opérationnel aura été de 2 millions de dollars. Il serait de plusieurs millions en 2007, pour un capital relevé de 12 à 25 millions, et une prochaine ouverture au marché. Cette performance s’est produite alors que le Soudan connaissait un plein boom entre euphorie pétrolière et espoir d’une ère de paix, sinon au Darfour du moins entre le Nord et le Sud. « Une fièvre de projets et des crédits jamais vus à l’adresse des consommateurs », dit M. Ghantous. Sur les rives du Nil blanc et du Nil bleu, qui font ici jonction, les bouchons automobiles ont fait leur apparition sur fond de grues de construction. Mais depuis la fin 2006, l’emballement des dépenses s’est heurté à une chute non prévue des recettes du brut, dont la production, de qualité diverse, a plafonné sous les 500 000 barils/jour. Le Soudan a ainsi frôlé l’asphyxie financière en juin avec des réserves en devises au plancher. « Des banques ont eu jusqu’à 60 % de créances impayées en portefeuille en raison de prêts plus que hasardeux », explique M. Ghantous. La plus grande des 34 banques soudanaises, Omdurman National Bank, détenue par l’État, est en totale déconfiture. Le Soudan a deux systèmes financiers, l’un islamique au Nord, où sont l’immense majorité des banques, dont la Byblos, avec rejet du prêt à intérêt, et l’autre conventionnel au Sud, région à prédominance chrétienne. « Le problème avec le système bancaire islamique est qu’il n’a pas de bons instruments de refinancement pour faire face à une crise en aidant de mauvais payeurs ponctuels à s’en sortir », dit le banquier libanais. Dans ce contexte, outre ses compétences personnelles reconnues, comment expliquer le succès de la Byblos ? Nadim Ghantous ne le dit pas, mais l’embargo américain sur les transactions en dollars est loin de l’avoir entravé. Car sa banque, comme d’ailleurs sa concurrente libanaise Audi, nouvelle venue sur le marché, bénéficie des liens avec des agences sœurs en Europe, et prête même des devises bien rémunérées aux compagnies soudanaises. Des signes sérieux de divorce apparaissent aujourd’hui entre le Nord et le Sud, en particulier sur la question-clé du partage des richesses pétrolières, sans que se dessine une solution négociée au drame du Darfour. Soulignant dans son rapport de novembre ces risques accrus, l’Economist Analyst Unit table cependant sur une poursuite des flux d’investissements et de prêts en particulier d’Asie, notamment de Chine, ou de pays arabes du Golfe. « Je suis de nature optimiste, cela ne peut aller qu’en s’améliorant », pense Nadim Ghantous en montrant les plans du nouveau siège de 14 étages qui sera construit d’ici à deux ans. Quant à son avenir, « si ma femme, mon arme secrète, est d’accord, nous irons ailleurs prendre de nouveaux risques... bancaires », dit-il. Alain NAVARRO (AFP)
Si un titre de « Banquier de l’année » était décerné au Soudan, où le Darfour ne fait pas oublier les affaires, il irait au Libanais Nadim Ghantous, patron de la Byblos Bank. « Bonne gestion et peu de créances douteuses, parfait » : Wahel Abdallah, délégué du Fonds monétaire international (FMI) auprès de la Banque centrale soudanaise, exprime à l’AFP en résumé le jugement laudatif du marché.
Pour ce banquier de 45 ans, installé à Khartoum depuis 2003, après avoir vécu à Accra, Beyrouth, Québec, Ryad, Koweït ou New York, « le Soudan, ce n’est certes pas la Suisse. Sauf que là-bas je m’ennuierais à périr ! ».
Quand la Byblos, troisième banque du Liban, lui a proposé d’aller dans ce pays en guerre civile, soumis à un embargo américain et dirigé par une caste militaro-islamiste, il a...