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Des centaines d’arrestations d’opposants ; Washington « va devoir réexaminer son aide », avertit Rice Musharraf étend son emprise au Pakistan sous état d’urgence

Le président Pervez Musharraf a étendu hier son emprise sur le Pakistan, au lendemain de l’instauration de l’état d’urgence, faisant arrêter des centaines d’opposants alors que les élections législatives prévues en janvier pourraient bien être reportées d’une année. L’ancien Premier ministre Benazir Bhutto, rentrée d’exil le 18 octobre et engagée dans des pourparlers pour un partage du pouvoir, a accusé le chef de l’État d’avoir mené « un second coup » d’État. Le général Musharraf s’était emparé du pouvoir en octobre 1999 à la faveur d’un coup d’État sans effusion de sang. L’état d’urgence va « conduire à une confrontation inutile entre le régime et le peuple, ce qui ne peut qu’aider les extrémistes à exploiter la situation à leur avantage », a ajouté Mme Bhutto interrogée par la chaîne de télévision américaine CBS. Depuis la proclamation samedi soir de l’état d’urgence, justifié, selon le général Musharraf, par le terrorisme islamiste et l’opposition de la Cour suprême, « entre 400 et 500 personnes ont été arrêtées dans le pays », a annoncé hier le Premier ministre Shaukat Aziz. Imran Khan, ex-star du cricket devenu l’un des plus farouches opposants à Pervez Musharraf, a été assigné à résidence. Ont aussi été interpellés de nombreux chefs de file de l’opposition, des militants des droits de l’homme et des avocats proches de l’ex-président de la Cour suprême, Iftikhar Mohammad Chaudhry. Ce magistrat indocile, en poste depuis 2005 et épine au flanc du régime Musharraf, avait été brusquement évincé samedi et remplacé sur-le-champ. La Cour suprême est la première visée par l’état d’urgence. Elle contrariait depuis des mois les desseins du chef de l’État et devait se prononcer sur la légalité de sa réélection à la présidentielle du 6 octobre. « Musharraf cherche à s’accrocher au pouvoir par tous les moyens », a accusé M. Khan. Javed Hashmi, chef du parti de l’ex-Premier ministre en exil Nawaz Sharif, a aussi été appréhendé chez lui à Multan, dans le centre du Pakistan. Surtout, les élections législatives prévues à la mi-janvier pourraient être ajournées d’une année, a annoncé le Premier ministre. « Nous sommes en train d’en débattre. (Mais) sous l’état d’urgence, le Parlement peut se donner jusqu’à une année (...) pour organiser les prochaines élections », a-t-il déclaré. Des élections au suffrage universel direct pour désigner le Parlement et le renouvellement des assemblées provinciales devaient consacrer le retour de la démocratie dans cette puissance nucléaire de 160 millions d’habitants, quasiment tous musulmans. Mais le général Musharraf a suspendu la Constitution et imposé une série de restrictions aux médias. « L’inaction à ce stade est un suicide pour le Pakistan et je ne peux laisser ce pays se suicider », a-t-il martelé samedi dans son adresse à la nation. Il a demandé à ses « amis » occidentaux de comprendre sa décision, accueillie avec préoccupation dans le monde. Les États-Unis, qui ont fait du général Musharraf leur allié-clé dans leur guerre contre le terrorisme, ont cependant jugé « très décevantes » ces mesures d’exception. « Nous allons devoir réexaminer notre aide », a prévenu la chef de la diplomatie américaine Condoleezza Rice. Mais elle a aussitôt précisé que la plus grande partie de cette aide, consacrée à la lutte antiterroriste, ne serait pas touchée. Par ailleurs, l’ancien Premier ministre Nawaz Sharif, en exil en Arabie saoudite, a invité hier le général-président Pervez Musharraf à quitter le pouvoir. Interrogé sur ce que Musharraf devrait faire, Nawaz Sharif a répondu sur Sky News : « S’en aller, pour la bonne raison qu’il fait partie du problème (...). Plus il prolonge sa mal-gouvernance, plus le Pakistan prendra le chemin de l’anarchie. » L’ancien chef de gouvernement a également annoncé qu’il avait bien l’intention de rentrer dans son pays. De son côté, Benazir Bhutto a reconnu que le Pakistan était « au bord de la déstabilisation ». Elle n’a toutefois pas exclu un accord avec le général Musharraf s’il « rétablit la Constitution et (...) organise des élections libres, justes et impartiales ». Washington et Londres soutenaient ce scénario : Pervez Musharraf deviendrait un président civil, après avoir démissionné de son poste de chef des armées, et Mme Bhutto dirigerait le gouvernement pour la troisième fois, après avoir été Premier ministre de 1988 à 1990, puis de 1993 à 1996. Malgré le coup de tonnerre de l’état d’urgence, le Pakistan est resté calme hier. Les magasins étaient ouverts, bien que déserts, et la circulation réduite au minimum, tandis que des membres des forces de l’ordre étaient déployés autour du Parlement, du palais présidentiel et de la Cour suprême à Islamabad.
Le président Pervez Musharraf a étendu hier son emprise sur le Pakistan, au lendemain de l’instauration de l’état d’urgence, faisant arrêter des centaines d’opposants alors que les élections législatives prévues en janvier pourraient bien être reportées d’une année.
L’ancien Premier ministre Benazir Bhutto, rentrée d’exil le 18 octobre et engagée dans des pourparlers...