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Le dialogue interconfessionnel ne nous détourne pas de notre foi Par le révérend David GRAY*
le 23 octobre 2007 à 00h00
Une des choses que parents et responsables craignent le plus dès qu’il est question que leurs jeunes participent à un dialogue interconfessionnel est qu’ils en viennent à se détacher de leur propre religion et finissent par rejeter et abandonner leur foi, peut-être même, au final, à se convertir. Mon expérience de pasteur chrétien est tout autre : d’après ce que j’ai pu observer, la foi des jeunes gens se renforce lorsqu’ils sont confrontés à d’autres traditions. Les relations personnelles comptent beaucoup pour déterminer comment les individus acquièrent la foi, comment ils en changent, comment ils l’approfondissent. La plupart d’entre nous participent de la tradition de leurs parents, et restent fidèles à une tradition acquise par des relations personnelles chez nous et dans le lieu où ils pratiquent. Au collège, il arrive souvent que les élèves approfondissent leur foi par le contact avec une personnalité exemplaire. Après le lycée, il est fréquent que les étudiants prennent conscience de leur foi grâce au contact avec un croyant qui était là pour les soutenir à un moment douloureux. Souvent les jeunes adultes gardent leur foi parce que quelqu’un qu’ils admirent est habité par sa foi.
Pour inciter les fidèles à persister dans leurs convictions, les actes comptent plus que les paroles. « Prêcher toujours, utiliser les mots si nécessaire », a dit saint François d’Assise, pour signifier que c’est autant par nos actes que par nos dires que nous faisons partager notre foi. Pasteur, je m’applique à vivre l’Évangile du Christ, qui par ses actions aussi bien que par ses paroles a donné l’exemple de la vie qui doit être la nôtre. Quelle que soit notre tradition, l’interaction quotidienne des croyants est d’un grand poids pour aider les autres à demeurer dans leurs traditions.
Lorsque des jeunes gens commencent à regarder au-delà de la foi dont ils ont hérité pour ouvrir le dialogue avec des gens porteurs d’autres croyances, ces échanges personnels les conduisent souvent à considérer leur propre tradition comme ils ne l’avaient jamais fait jusque-là. Quand nous grandissons dans un monde fait de personnes toutes semblables, nous avons de la foi une représentation culturelle, ce qui nous dispense d’analyser la doctrine elle-même. En dialoguant avec des gens différents, nous réfléchissons plus profondément sur notre propre identité, sur la forme qu’elle a prise et son développement. Un des bienfaits du dialogue interconfessionnel est que, pour exposer notre croyance à d’autres, nous devons prendre pleinement conscience de ce à quoi nous croyons réellement. Cette démarche nous permet souvent d’accéder à une région plus profonde de notre propre croire. Exposer sa propre croyance exige une synthèse des éléments auxquels nous croyons.
Un exemple : Farah est une jeune musulmane sunnite de l’Ohio rural. Elle fréquente un collège dans la banlieue de Cleveland et est une des rares élèves musulmanes de son établissement. On lui demande souvent ce que c’est que d’être musulman. Selon elle, en entrant en contact avec des non-musulmans pour leur expliquer sa foi, elle en est venue, grâce à son effort de réflexion, à approfondir ses propres certitudes. Certaines conversations nous amènent parfois à éprouver une fierté inconnue pour nos origines. Arrivé à l’université, j’ai constaté que, comme j’étais un des rares spécimens de ma région, tout le monde me demandait comment c’était d’avoir grandi là-bas. Quand j’étais jeune, je m’imaginais que tout le monde était comme moi. Lorsque je me suis trouvé face à des gens très différents, je me suis mis à avoir une autre idée de ma communauté. J’ai développé un sentiment de fierté. Je me voyais moi-même comme le représentant de mon État et de ma région. Mon attachement à ma communauté, comme la loyauté que je lui devais, s’en sont trouvés redoublés. Lorsque nous nous entretenons avec des gens appartenant à d’autres confessions, nous apprenons beaucoup sur nous-mêmes, nous comprenons plus clairement nos croyances en exposant notre religion et nous finissons par en ressentir un sentiment de fierté.
Une étude réalisée récemment par des chercheurs californiens et canadiens a montré que les frères et sœurs aînés réussissent mieux à l’école que les plus jeunes parce qu’ils jouent le rôle de précepteur auprès des petits. Ce processus aide les aînés à apprendre, parce qu’ils ont à expliquer aux plus jeunes l’information reçue. La conclusion des chercheurs est que la clé de la réussite des aînés découle du postulat qui veut que ce soit en expliquant que les humains apprennent. J’ai ainsi pu constater que la pratique du dialogue interconfessionnel conduit des jeunes de traditions diverses, qui, avant le dialogue ne s’intéressaient guère à leur religion, à revenir à la foi de leurs origines grâce à l’inspiration communiquée par l’engagement de leurs interlocuteurs. Si les parents et les responsables religieux veulent que leurs jeunes développent une foi profondément enracinée dans leur tradition et largement ouverte sur le monde, ils doivent encourager les échanges interconfessionnels plutôt que le contraire. Une foi mise à l’épreuve, mise en perspective et expliquée, elle est celle qui a le plus de chances d’être intériorisée et de perdurer.
*Le révérend David Gray dirige le Workforce and Family Program de la New America Foundation de Washington.
Service de Presse de Common Ground (CGNews)
Une des choses que parents et responsables craignent le plus dès qu’il est question que leurs jeunes participent à un dialogue interconfessionnel est qu’ils en viennent à se détacher de leur propre religion et finissent par rejeter et abandonner leur foi, peut-être même, au final, à se convertir. Mon expérience de pasteur chrétien est tout autre : d’après ce que j’ai pu...
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