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Actualités - ANALYSE

ÉCLAIRAGE Presevo : la cohabitation serbo-albanophone menacée

Dimanche dernier, Serbes et Kosovars, réunis à Bruxelles, se sont une nouvelle fois séparés sur un constat d’échec. Devant la troïka des médiateurs russe, américain et européen, la délégation d’Albanais du Kosovo et deux ministre serbes ont réaffirmé leurs positions respectives – les premiers pour un Kosovo indépendant, les seconds pour un Kosovo autonome – sans lâcher aucune concession qui puisse permettre de parvenir à une entente sur le statut de la province. À moins de deux mois de la date butoir d’un ultime processus de négociation entre les deux parties, l’impasse est totale. Une impasse qui pourrait déboucher, comme le répètent régulièrement les Kosovars, sur une proclamation unilatérale d’indépendance de la province par ces derniers. À la frontière du Kosovo, dans l’extrême sud de la Serbie, Presevo, une vallée à majorité albanophone, prouve toutefois qu’une cohabitation pacifique entre les deux communautés n’est pas utopique. Même si elle demeure fragile, comme le souligne l’International Crisis Group (ICG) dans un rapport publié mardi dernier. En 2000-2001, Presevo a été le théâtre d’affrontements entre Serbes et albanophones. Affrontements qui ont pris fin avec la signature, en 2001, des accords de Konculj, conclus sous l’égide de l’OTAN, des États-Unis et de l’OSCE avec la coopération des autorités serbes. À partir de cette date, des donateurs et le gouvernement serbe ont investi dans cette vallée. Un processus qui a engendré des progrès réels, quoique lents. Parmi ces progrès, rappelle l’ICG, la formation de gouvernements locaux multiethniques, la mise en place de patrouilles de police albano-serbes ou encore l’amélioration des médias albanophones. En janvier 2007, des albanophones ont en outre participé, pour la première fois depuis 2000, à la politique nationale, en élisant un représentant au Parlement serbe. Fait notable, aucun accrochage majeur entre les deux communautés n’a été enregistré ces trois dernières années. Si le processus est enclenché, il est toutefois loin d’être achevé. Les avancées en matière de réforme du système éducatif et d’intégration des albanophones dans le système judiciaire et d’autres organes publics restent décevantes, souligne le rapport de l’ICG. Les albanophones regrettent également que la paix n’ait pas mis fin aux tensions avec les forces de sécurité serbes. Les Serbes, pour leur part, soupçonnent toujours les albanophones de manquer de loyauté. Des tensions latentes qu’entretient et alimente le dossier du Kosovo. Selon l’ICG, l’absence d’accord entre albanophones et Serbes sur le statut de la province met Presevo en danger. D’ores et déjà, tous les politiciens albanophones de Presevo veulent rejoindre le Kosovo, affirme ICG, et ont adopté une plate-forme demandant que les trois municipalités de la vallée soient adjointes à la province albanophone en cas de partition. Ce que Belgrade ne permettra jamais. Si la tension venait à s’accroître au Kosovo, les extrémistes des deux parties ne manqueraient pas, en outre, de reprendre du poil de la bête, et ICG met en garde contre la réapparition de phénomènes de nettoyage ethnique en cas de partition du Kosovo. Autant de scénarios qui ruineraient l’une des rares expériences de résolution de conflit pour le moins réussie. Une raison supplémentaire pour que les Européens parviennent enfin à s’entendre sur une position commune qui permettrait de faire pression sur les deux parties afin de trouver une solution pour l’avenir du Kosovo. Émilie SUEUR
Dimanche dernier, Serbes et Kosovars, réunis à Bruxelles, se sont une nouvelle fois séparés sur un constat d’échec. Devant la troïka des médiateurs russe, américain et européen, la délégation d’Albanais du Kosovo et deux ministre serbes ont réaffirmé leurs positions respectives – les premiers pour un Kosovo indépendant, les seconds pour un Kosovo autonome – sans lâcher...