Actualités - ANALYSE
ÉCLAIRAGE Lahoud a plaidé à NY pour un rôle rassembleur de l’ONU au Liban
Par HADDAD Scarlett, le 03 octobre 2007 à 00h00
C’est dans une ville survoltée, littéralement obsédée par la visite du président iranien Ahmadinejad et par le lancement des préparatifs pour la future élection présidentielle américaine que le chef de l’État libanais, Émile Lahoud, a choisi d’adresser son dernier discours à la communauté internationale, au siège de l’Assemblée générale des Nations unies à New York. Entouré de ses proches et de quelques amis, Lahoud était d’ailleurs assez ému et il a voulu transmettre le message suivant : il faut épargner au Liban la tempête qui risque de souffler sur la région et pour cela aider au renforcement de son unité au lieu d’y favoriser les divisions en privilégiant une partie au détriment de l’autre. À quelques semaines de l’expiration de son mandat, le président a laissé de côté les termes vagues et la langue de bois. Il a voulu un discours clair et plus ou moins alarmiste, affirmant dans ses cercles privés que son objectif aujourd’hui est d’assurer une transition du pouvoir en douceur, sans crise et sans catastrophe. Il y avait aussi chez lui une sorte de satisfaction d’avoir tenu bon à son poste, contre vents et marées, attaques et critiques. Mais cela ne l’a pas empêché d’exprimer son inquiétude pour la suite des événements. C’est d’ailleurs pour cette raison que le second moment fort de son séjour new-yorkais a été sa réunion avec le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon. Selon les sources de la délégation libanaise, Lahoud aurait beaucoup parlé, laissant au secrétaire général des Nations unies le rôle d’auditeur attentif. Il aurait ainsi expliqué sa vision de la crise actuelle et la nécessité, selon lui, d’aboutir à un président d’entente, demandant aux Nations unies de privilégier tout ce qui pourrait rapprocher les Libanais, dans le cadre du respect de la loi et de la justice, au lieu de tenter d’appuyer un camp contre l’autre. Il a rappelé que c’est à ce prix seulement que le Liban « message de coexistence et de pluralisme » pourra survivre. Les autres entretiens de Lahoud, notamment avec le président iranien et l’émir du Qatar, ont été plus protocolaires, le plus important étant, à ce stade, pour le chef de l’État de s’adresser à la communauté internationale...
Mais à New York, la voix de Lahoud et même celle des autres parties libanaises n’étaient pas très entendues. En ces temps de tension, à un moment où au sein des deux grands partis américains la bataille pour le choix du candidat à la présidence en novembre 2008 bat son plein, les New-Yorkais, et avec eux le reste des Américains, ne sont pas très ouverts à des sujets qui leur paraissent secondaires. Si le président iranien, accueilli avec des mesures de sécurité drastiques, a occupé la scène, c’est essentiellement parce que les chaînes de télévision l’ont présenté comme une sorte de diable, montant en flèche sa fameuse phrase sur l’inexistence de l’homosexualité en Iran, alors que lui, de son côté, a multiplié les propos provocateurs. Installé à l’hôtel InterContinental, à un bloc du Waldorf Astoria où séjournait George Bush, il a multiplié déclarations tonitruantes et discours enflammés, avant de s’envoler pour le Venezuela.
L’autre grand sujet qui a mobilisé les New-Yorkais, au cours des deux dernières semaines, a été la « Global Initiative » lancée par l’ancien président Bill Clinton à partir de l’hôtel Sheraton. Elle est destinée à proposer des solutions à tous les grands problèmes de la planète et à recueillir des fonds pour le candidat démocrate. Alors que Bush s’est fait discret tout au long de son séjour new-yorkais, Clinton, lui, était partout, et les membres de son équipe ont multiplié les réunions avec les différentes délégations à l’ONU. Au cœur des entretiens, la situation au Moyen-Orient à laquelle s’intéresse énormément l’ancien président démocrate et la conférence consacrée à ce dossier qui doit se tenir aux États-Unis à la fin de novembre.
Selon un ancien diplomate américain, c’est désormais sur ce point que se concentrent tous les efforts. L’Administration Bush souhaite une conférence réussie avec au bout un début de solution au niveau du dossier israélo-palestinien. Mais à cette fin, affirme l’ancien diplomate américain, il faudrait que toutes les parties, notamment la Syrie, y assistent. Et c’est là que se joue aujourd’hui le bras de fer. Les Syriens affirment être prêts à discuter de toutes les exigences américaines en contrepartie de la récupération du Golan. Mais tout cela, ajoute l’ancien diplomate américain, nécessite du temps et l’Administration actuelle n’en a pas beaucoup. Selon lui, la présidentielle libanaise fait partie des cartes qu’aussi bien la Syrie que les États-Unis conservent pour la fin. C’est pourquoi, toujours selon l’ancien ambassadeur, les responsables américains n’ont pas encore défini une position précise au sujet de la présidentielle libanaise et se contentent de déclarations générales qui tournent autour de la nécessité qu’elle se tienne à la date prévue. Mais la véritable position sera établie ultérieurement en fonction de l’évolution des relations avec la Syrie.
Selon l’ancien diplomate américain, les Européens et à leur tête les Français tentent bien de plaider pour un demi compromis qui porterait essentiellement sur le choix du futur président libanais, quitte à laisser les autres dossiers conflictuels, comme la formation du gouvernement, l’application de la résolution 1559 relative aux armes des milices, à plus tard. L’ancien diplomate explique ainsi que les Européens ont près de 8 000 soldats engagés dans le cadre de la Finul au Liban et ils craignent que ces soldats ne soient la cible d’attaques au cas où la situation se compliquerait au Liban et où il n’y aurait pas d’élection présidentielle à la date prévue. Toujours selon lui, l’Administration américaine, qui a aujourd’hui besoin des Européens et de l’OTAN pour trouver une issue honorable au bourbier irakien, pourrait être sensible à cette argumentation. Mais rien n’est encore sûr et, en dépit des indices positifs, le dossier libanais ne serait pas encore une priorité pour l’Administration américaine...
Scarlett HADDAD
C’est dans une ville survoltée, littéralement obsédée par la visite du président iranien Ahmadinejad et par le lancement des préparatifs pour la future élection présidentielle américaine que le chef de l’État libanais, Émile Lahoud, a choisi d’adresser son dernier discours à la communauté internationale, au siège de l’Assemblée générale des Nations unies à New York....
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