Actualités - OPINION
L’ÉDITORIAL de Issa GORAIEB Hercule président
Par Issa GORAIEB, le 29 septembre 2007 à 00h00
Un peu de pitié pour le futur président, cet homme censé réunir toutes les vertus en sa personne et dont on attend beaucoup trop de miracles ! Ce premier des Libanais, on le veut intègre, bien sûr : cela devrait aller sans dire ; et pourtant, il n’est pas superflu de le dire et le redire, tant on est enclin, dans notre beau pays, à confondre affaires d’État et affaires tout court. Le président, on le veut tout à la fois fort et jouissant du soutien de toutes les fractions et factions locales, jaloux de la souveraineté libanaise et cependant bien disposé à l’égard de notre environnement arabe. Non seulement il devrait être rompu aux subtilités de ce véritable casse-tête qu’est la formule libanaise (exit, les débutants !), mais son passé politique honorable serait le premier gage du brillant avenir qui l’attend.
Toutes ces qualités ne sont guère introuvables, pardi, et plus d’un candidat, déclaré ou non, pourrait parfaitement s’en prévaloir. Dès lors, la véritable question n’est peut-être pas là ; elle réside plutôt dans l’illusion qu’une entente nationale ponctuelle, portant sur l’échéance présidentielle, est la solution de tous les problèmes proprement existentiels dont souffre notre pays. Pour vitale qu’elle soit, cette étape n’est en effet qu’une première clé, au milieu de cette profusion de serrures et de verrous dont se trouve bardé le cas libanais. Et c’est précisément cette clé présidentielle qu’il convient de couler dans l’acier le plus solide et le plus résistant, afin que puissent jouer harmonieusement les autres mécanismes.
Car la Constitution issue de l’accord de Taëf n’a pas seulement réduit de manière substantielle les pouvoirs et prérogatives du chef de l’État. Elle a surtout fait de celui-ci un faux arbitre, le vrai n’étant autre naguère que le tuteur syrien de triste mémoire, lequel tranchait souverainement les sempiternels conflits minant la troïka libanaise, et distribuait à sa guise les bons et les mauvais points. L’occupation syrienne disparue, la fonction présidentielle ne s’en est abâtardie que davantage, du fait du maintien à son poste du vestige le plus haut placé de l’ère de la tutelle. Non seulement Émile Lahoud ne pouvait plus assumer son rôle de régulateur de la vie étatique, mais en usant à outrance du dernier pouvoir dont il disposait encore, en gelant ou entravant les décisions gouvernementales, il a fait de la présidence un fruste, un dérisoire et finalement peu digne outil de blocage : mot qui résume funestement d’ailleurs la stratégie adoptée par une opposition rebelle au jeu des institutions.
Le tribunal international, les rapports avec la Syrie, la composition du futur cabinet d’union et la répartition des ministères-clés, l’armement du Hezbollah à la lumière du respect des résolutions de l’ONU, tout cela dans le cadre plus vaste des rivalités et tensions régionales : fort nombreux et de la plus grande gravité sont les sujets de discorde entre les Libanais. En aucun cas, cependant, les inévitables délais de réalisation de tous ces travaux d’Hercule ne devront affecter un processus de reconstitution de la présidence de la République devenu d’une dramatique urgence. Un président présidant effectivement, c’est bien davantage en effet qu’une réhabilitation des chrétiens en termes de partage du pouvoir : ce sont surtout les institutions qui s’en trouveraient réhabilitées, tant il est normal que l’édification de cet État de droit, auquel aspirent tous les Libanais, commence par la tête.
La tête, parlons-en. On ne sursautera même plus au spectacle d’un président mis en place par la Syrie, funestement maintenu à son poste par la Syrie, continuant à ce jour de s’appuyer sur la même Syrie et trouvant néanmoins l’aplomb nécessaire pour dénoncer, devant l’Assemblée générale des Nations unies, les ingérences étrangères au Liban. À peine moins surréel au demeurant est cet accès de colère du président de l’Assemblée contre une ONU accusée d’inqualifiable ingérence parce qu’elle s’était permis de mettre en garde... contre toute ingérence. Un président made in Lebanon, qu’on vous jurait.
Issa GORAIEB
Un peu de pitié pour le futur président, cet homme censé réunir toutes les vertus en sa personne et dont on attend beaucoup trop de miracles ! Ce premier des Libanais, on le veut intègre, bien sûr : cela devrait aller sans dire ; et pourtant, il n’est pas superflu de le dire et le redire, tant on est enclin, dans notre beau pays, à confondre affaires d’État et affaires tout court. Le...
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