Cinq ans après son adoption, la loi 462 qui réglemente la privatisation du secteur de l’énergie commence enfin à être appliquée, du moins en partie.
Le principe même de la privatisation est acquis, étant donné que le Trésor est incapable de faire face aux déficits mirobolants de l’Électricité du Liban (EDL) et surtout aux besoins d’investissements dans le secteur, qui se chiffrent en centaines de millions de dollars.
Mais c’est sur les modalités de la privatisation qu’ont souvent buté les gouvernements successifs, car, avant de céder les actifs du secteur, il faut d’abord les évaluer, chose impossible vu l’état actuel de l’Électricité du Liban dont les comptes n’ont pas été publiés depuis 2001 et dont on ignore toujours les contours exacts.
À cette fin, la loi prévoit une restructuration de la compagnie publique.
Pour s’atteler à cette lourde tâche, le Conseil supérieur pour la privatisation (CSP) a décidé de recourir à l’aide d’un consortium composé de quatre cabinets de conseil.
Selon le communiqué publié hier par le CSP, les quatre cabinets sont : l’espagnol Mercados, spécialisé dans la restructuration des secteurs de l’énergie et bénéficiant d’une expérience similaire en Égypte, en Jordanie et en Arabie saoudite ; l’italien ELC, consultant en électricité ; le libanais Rafic Khoury et associés, spécialisé dans la conception électromécanique, et le cabinet international d’audit et de comptabilité, KPMG. Enfin, l’aspect juridique sera pris en charge par le cabinet Abou Sleimane et associés.
Le consortium sera d’abord chargé d’évaluer la situation actuelle de l’EDL avant d’élaborer un plan de restructuration, ce qui devrait prendre environ quatre mois, selon le président du CSP, Ziad Hayek. Commencera ensuite la phase d’exécution qui comprend le recensement et l’évaluation des actifs de l’EDL et la séparation des différents métiers de la compagnie (production, distribution et transport) à travers la création de nouvelles entités, dotées de conseils d’administration indépendants. Les employés de l’EDL seront ensuite répartis dans ces nouvelles sociétés, « en coordination avec l’EDL et les syndicats des travailleurs », ajoute le communiqué selon lequel le projet devrait être achevé en un an et demi environ.
La séparation des différents pôles d’activités de la compagnie est une mesure cruciale, du fait que le transport devra rester entre les mains de l’État, comme dans la majorité des pays du monde. La production et la distribution en revanche seront privatisées. D’autant que les besoins d’investissements dans ces deux domaines avaient été estimés par le ministre démissionnaire, Mohammad Fneich, à quelque 1,3 milliard de dollars d’ici à 2010.
Joint par L’Orient-Le Jour, M. Hayek a expliqué que le but de ce projet est de « corporatiser » l’EDL, soit la transformer en société anonyme relevant du code du commerce et détenue dans un premier temps à 100 % par l’État.
Cette mesure permet d’abord de contourner l’interdiction de recruter des fonctionnaires, afin de doper les ressources humaines de l’EDL, actuellement en sous-effectifs, et d’introduire du « sang neuf » dans la compagnie, souligne M. Hayek. Sachant que plus de 60 % des employés d’EDL aujourd’hui ont plus de 50 ans.
Mais la finalité de la restructuration est de rendre le secteur profitable et donc attractif pour les investisseurs privés.
Cette mission n’est pas impossible, affirme le président du Conseil supérieur de la privatisation, si l’on aborde de front les problèmes structurels du secteur.
Les problèmes de l’électricité au Liban se situent sur trois fronts principaux, si l’on se base sur le dernier diagnostic en date, effectué en 2006 par M. Fneich.
D’abord au niveau de la production : d’une part, l’EDL est en sous-capacité de 40 % en raison de l’obsolescence du matériel et de la mauvaise maintenance. D’autre part, les coûts de production sont très élevés en raison de la dépendance au pétrole dont les prix ne cessent d’augmenter, alors que le gaz naturel est un combustible beaucoup plus économique et moins polluant. Aux termes d’un accord récemment conclu avec l’Égypte, l’approvisionnement en gaz devrait débuter en 2008, en passant par la Syrie (à condition de rétablir des « relations amicales » avec notre voisin, sans quoi la construction d’un terminal pour regazéfier le gaz naturel liquide, livré par voie maritime, est à envisager).
Arrive ensuite le problème le plus connu par les Libanais, celui du paiement des factures, ou plutôt du non-paiement, car près de 28 % de la production n’est pas facturée. Ce « gaspillage non technique » au niveau de la distribution peut être résolu par l’installation de compteurs à distance, car aujourd’hui l’EDL n’est pas en mesure de localiser exactement les vols de courant, souligne M. Hayek.
Enfin, au niveau du transport, près de 11 % de la production est gaspillée pour des raisons techniques. Ce problème a récemment été pris en charge par le CDR à travers la création d’un centre national de contrôle, ajoute le responsable.
Globalement, le coup d’envoi de la restructuration du secteur est donc un premier pas, très positif, vers la privatisation. Mais pour que l’application de la loi 462 soit complète, le gouvernement doit encore créer une autorité de régulation de l’énergie, à l’image de celle qui a récemment vu le jour pour les télécommunications.
Sahar AL-ATTAR
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Le principe même de la privatisation est acquis, étant donné que le Trésor est incapable de faire face aux déficits mirobolants de l’Électricité du Liban (EDL) et surtout aux besoins d’investissements dans le secteur, qui se chiffrent en centaines de millions de dollars.
Mais c’est sur les modalités de la privatisation qu’ont souvent buté les gouvernements successifs, car, avant de céder les actifs du secteur, il faut d’abord les évaluer, chose impossible vu l’état actuel de l’Électricité du Liban dont les comptes n’ont pas été publiés depuis 2001 et dont on ignore toujours les contours exacts.
À cette fin, la loi prévoit une restructuration de...