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Présidentielle - Le député du Batroun annonce officiellement sa candidature dans une salle du Parlement ouverte pour l’occasion Boutros Harb : Priorité au dialogue national et à la « libanisation » de l’échéance

Les choses pourraient être tellement simples : un Parlement grouillant de journalistes venus écouter le programme d’un candidat à la présidence, et, demain, une élection présidentielle dans les règles qui consacrerait la série de grands principes cités dans le programme ainsi présenté. Comme dans un pays normal, ou plutôt dans une démocratie digne de ce nom. Mais en dépit de la volonté de Boutros Harb qui, l’espace de deux heures, a donné vie au Parlement quasiment désert depuis des mois, en dépit de la volonté de « faire comme si », la situation est bien plus complexe et l’illusion ne tient pas longtemps la route. En 1998 et en 2004, il avait d’ailleurs fait la même tentative, présentant officiellement sa candidature à la présidence sur base d’un programme axé sur des idées consensuelles et sur une vision un peu idéaliste du pays. Comme il l’a reconnu lui-même hier, au cours des deux précédentes tentatives, il savait que ses chances d’être élu étaient minimes, mais il avait quand même voulu marquer le coup, d’abord pour redonner de l’espoir aux Libanais et surtout, pour leur montrer que les choses pourraient se dérouler de la sorte. Aujourd’hui, il reprend le même scénario, avec toutefois une plus grande conscience de la gravité de la situation, concrétisée notamment par la présence de grandes figures du monde des médias, de celles qui ont payé le prix fort sur le double plan humain et professionnel, comme Ghassan Tuéni, May Chidiac et Gisèle Khoury... Ghassan Tuéni a d’ailleurs pris la parole pour évoquer la mémoire des deux imams Moussa Sadr et Mohammad Mehdi Chamseddine... Devant un parterre de figures connues du monde de la presse, et ayant à ses côtés les présidents de l’ordre de la presse, Mohammad Baalbacki, et celui des rédacteurs, Melhem Karam (qui ont fait l’éloge du candidat et rappelé son parcours politique), Boutros Harb a commencé son discours-programme par un hommage aux disparus : Gebran Tuéni et Samir Kassir. Dans la grande salle, où se sont tenues les séances du dialogue national, puis celles des concertations, les applaudissements ont longtemps retenti, comme pour exorciser les malheurs... Tout en feuilletant le petit livret sobrement intitulé « Le communiqué » qui contient le programme du candidat, les journalistes invités ne pensaient pourtant qu’à une chose : quelle sera la position de Boutros Harb si la majorité décide d’élire unilatéralement un président à la majorité absolue des voix des députés. Car même s’il l’a clairement répété hier, en assurant qu’il fait partie des forces du 14 Mars par conviction, Boutros Harb a maintenu d’excellentes relations avec le président de la Chambre, critiqué par certains piliers du 14 Mars, et il s’est toujours démarqué de la classe politique par son discours toujours courtois et modéré. D’ailleurs, son programme ne s’écarte pas de cette ligne politique et, s’il faut le résumer en un mot, ce serait « dialogue », un point c’est tout. Selon le candidat Boutros Harb, tous les problèmes en suspens peuvent, et doivent être résolus par le dialogue interne, et il a insisté sur le fait qu’en présentant sa candidature de la sorte, il a surtout voulu replacer le dialogue en tête des priorités, mais pas n’importe quel dialogue : seulement celui qui regroupe les Libanais. Il l’a répété à plusieurs reprises : il est temps de briser les murs qui séparent les Libanais et d’ouvrir la voie à un dialogue interne. Si, pendant des années, un tel dialogue a été impossible à cause de la tutelle syrienne, les Libanais sont aujourd’hui théoriquement seuls et ils n’ont pas le droit de laisser passer cette chance de s’entendre. Un dialogue à Baabda Installé à la tribune décorée d’un bouquet de fleurs aux couleurs du drapeau libanais, Boutros Harb a abordé tous les aspects de la crise et tous les dossiers en suspens, certains d’une façon rapide, d’autres de manière plus détaillée, et il a répondu aux questions des journalistes. Au total, près de deux heures d’échanges, au cours desquelles il a affirmé que s’il devait être élu, il resterait issu du 14 Mars, mais il serait pour tous les Libanais et n’utiliserait pas ses prérogatives contre une partie des Libanais. En tout cas, sa première démarche consisterait à « dégager le président de la Chambre Nabih Berry de la dure responsabilité de réunir les protagonistes autour d’une table ronde de dialogue. Je compte convoquer une réunion de ce genre au palais de Baabda, autour d’une table rectangulaire que je présiderai ». Boutros Harb a aussi énuméré quelques principes généraux comme le fait que le Liban est une entité réelle et non artificielle née grâce à une décision du mandat français. Il a aussi réaffirmé son refus de la partition et du retour à toute forme de tutelle.  Il a aussi défini les menaces qui pèsent sur le Liban : les ambitions israéliennes, mais aussi le terrorisme qui s’y est infiltré, et la meilleure illustration de cette crainte est concrétisée dans les événements de Nahr el-Bared. Il a aussi dénoncé la présence d’armes entre les mains des Palestiniens hors des camps – réaffirmant par la même occasion son refus de l’implantation des Palestiniens – ainsi que les mauvaises relations avec la Syrie, qui créent un climat malsain. Harb a insisté sur la nécessité de libérer les fermes de Chebaa et d’obtenir le retour au pays des détenus libanais en Israël, mais il a aussi insisté sur le fait que la décision doit revenir à l’État et à lui seul. Quant à la résistance contre l’occupation et la libération du territoire, elle est de la responsabilité de l’État et ceux qui souhaitent y participer doivent le faire dans ce cadre. Interrogé sur ce sujet précis, Boutros Harb a préféré laisser la formule finale dans le vague, affirmant qu’elle devrait être le fruit d’une entente entre les Libanais mais il a aussi évoqué des possibilités de créer une troupe d’élite, etc. Au sujet des relations entre le Liban et la Syrie, il a répondu : « Il est malheureux qu’elles en soient arrivées là. J’appelle donc à une réconciliation historique entre les deux pays, basée sur une relation d’égal à égal, dégagée de toute idée de suivisme ou de tutelle. » La neutralité du Liban Boutros Harb a aussi déclaré que le tribunal international devrait être un moyen de punir les coupables, non un sujet de conflit entre les deux pays. Enfin, toujours sur ce même sujet, il a insisté sur la représentation diplomatique entre les deux pays au niveau des ambassadeurs et sur la nécessité de procéder au tracé des frontières entre eux. Le candidat a aussi lancé une idée relativement nouvelle, celle de la neutralité positive du Liban, rendant par la même occasion un hommage discret au député Ghassan Tuéni, qui en est un peu le père. Selon lui, le Liban resterait engagé avec les autres pays arabes dans les causes communes, mais il cesserait d’être la victime de conflits qui ne sont pas les siens mais qui se déroulent sur son territoire. Il faudrait donc, selon lui, le mettre définitivement à l’abri de ce genre de développements sans que cela remette en cause son appartenance à son environnement. Boutros Harb a aussi insisté sur l’importance de procéder à une élection présidentielle dans les délais prévus et il a dressé le profil du président qu’il souhaite voir à la tête du pays. Il s’agirait d’un homme animé d’un sentiment nationaliste, intègre et compétent, doté d’une grande expérience de la vie politique, indépendant, refusant de remplacer une tutelle par une autre, sachant dire non quand il le faut et oui quand il le faut aussi. Il s’agirait aussi d’un homme capable de se comporter en président de tous les Libanais, prêt à se sacrifier pour son pays, respectant l’accord de Taëf dans le texte et l’esprit. Boutros Harb a enfin insisté sur la nécessité de transformer l’échéance présidentielle en un rendez-vous interne libanais, répétant à plusieurs reprises qu’il faut redonner confiance aux Libanais dans leur pays et dans leur avenir. « Mon objectif, a-t-il martelé, n’est pas tant d’être élu président que de voir le Liban libre, souverain et indépendant, dans lequel mes fils et les vôtres pourront vivre en paix et en toute dignité. » La salle a longuement applaudi. Pendant près de deux heures, l’illusion était presque parfaite. Demain est un autre jour... S.H.
Les choses pourraient être tellement simples : un Parlement grouillant de journalistes venus écouter le programme d’un candidat à la présidence, et, demain, une élection présidentielle dans les règles qui consacrerait la série de grands principes cités dans le programme ainsi présenté. Comme dans un pays normal, ou plutôt dans une démocratie digne de ce nom. Mais en dépit de la...