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Actualités - ANALYSE

ANALYSE - Les avions transporteront des missiles nucléaires dans des zones à partir desquelles ils seront en mesure d’atteindre les États-Unis Le retour des bombardiers, réponse risquée de Moscou à l’OTAN et Washington

La décision de la Russie de renouer avec ses patrouilles de bombardiers stratégiques, comme à l’époque de la guerre froide, confirme sa volonté – et ses moyens économiques – de défier l’hégémonie américaine et l’expansion de l’OTAN désormais autrement que par la rhétorique. Si cette annonce vendredi par le président Vladimir Poutine a toutes les chances d’emporter l’approbation d’une majorité de Russes, elle n’est pas sans risque pour la Russie et même contraire à ses propres intérêts, soulignent les analystes militaires interrogés à Moscou. « La décision a été prise il y a plusieurs mois », croit savoir Pavel Felgenhauer, un expert indépendant, soulignant la dimension symbolique de cette déclaration faite lors de manœuvres militaires russo-chinoises dans l’Oural. « C’est évidemment très dangereux. Les avions transporteront des missiles nucléaires dans des zones à partir desquelles ils seront en mesure d’atteindre les États-Unis », ajoute le spécialiste des questions de défense. M. Poutine n’a pas explicitement dit que les bombardiers seraient équipés de missiles nucléaires. Mais les experts soulignent que l’ambiguïté de la formule employée, de patrouilles de bombardiers en « état d’alerte », le sous-entend. Ces patrouilles de bombardiers sont la dernière d’une série de mesures prises depuis un discours-clef de M. Poutine en février dernier à Munich, annonçant une politique de défense plus agressive mais aussi plus prévisible. Ont suivi : le projet de sortir du traité sur les armes conventionnelles en Europe, des tests de missiles intercontinentaux, la menace de pointer des missiles sur l’Europe et l’idée de redéployer une présence navale permanente en mer Méditerranée. Les experts divergent cependant sur la réelle volonté du Kremlin. Les uns y voient un coup de bluff. Les autres une réponse directe et dangereuse à la politique américaine et à son projet de bouclier antimissile en Pologne et en République tchèque, deux anciens alliés de Moscou au sein du Pacte de Varsovie. Vladimir Evseïev, du Centre de sécurité internationale de l’Académie des sciences russe, penche pour la seconde option, alors que la Russie observe d’un mauvais œil l’expansion ces dernières années de l’OTAN en Europe orientale. « La Russie ne pouvait pas ne pas répondre à l’expansion des infrastructures militaires de l’OTAN en Europe », analyse-t-il dans un commentaire publié sur le site d’informations gazeta.ru. « C’est utile du point de vue de la propagande, mais il aurait été meilleur de le faire dans quelques années seulement, car les États-Unis disposent de bien plus de moyens de riposte que la Russie », lui oppose Alexandre Pikaïev, un expert militaire indépendant. « Je pense qu’il est un peu trop tôt pour provoquer les États-Unis dans le contexte actuel d’équilibre stratégique », ajoute-t-il. Pour M. Evseïev, cette reprise va dégrader un peu plus les relations entre Moscou et Washington, sans aller jusqu’à un retour à la guerre froide. M. Felgenhauer met quant à lui en garde contre le danger de ces patrouilles d’appareils hors d’âge, dont seuls 20 à 30 sont en état de voler, selon le spécialiste, sur une flotte comptant officiellement 70 bombardiers stratégiques. « Le danger n’est pas seulement qu’ils vont de nouveau voler avec des armes nucléaires comme au temps de la guerre froide, avec des avions de l’OTAN les suivant, prêts à les abattre à tout instant. Le problème, c’est aussi que les avions russes sont vieux. Et les hommes ne sont pas aussi bien entraînés qu’à l’époque soviétique. Le risque d’accident est bien plus élevé qu’à l’époque », alerte-t-il. Christopher BOIAN (AFP)
La décision de la Russie de renouer avec ses patrouilles de bombardiers stratégiques, comme à l’époque de la guerre froide, confirme sa volonté – et ses moyens économiques – de défier l’hégémonie américaine et l’expansion de l’OTAN désormais autrement que par la rhétorique.
Si cette annonce vendredi par le président Vladimir Poutine a toutes les chances d’emporter...