Tout le monde attend donc, en défendant ses positions. Ainsi, de l’aveu de ses proches, M. Émile Lahoud...
Actualités - OPINION
L’escalade locale recouvre une expectative généralisée Les espoirs se tournent vers un arrangement irano-saoudien Philippe ABI-AKL
Par ABI AKL Philippe, le 19 juin 2007 à 00h00
Situation shakespearienne, s’il en est. Mais plutôt dans le sens Much ado about nothing, beaucoup de bruit pour rien. Car les tonitruantes, les fracassantes, les incendiaires prises de position ou déclarations des uns et des autres dissimulent en réalité une certitude commune : il n’y a de sortie de crise possible, pour ce pays, qu’à travers un arrangement entre parties étrangères influentes. Sinon à travers un accord syro-américain, comme en 88, du moins par le biais d’une entente bis entre Iraniens et Saoudiens. Nous disons bis parce qu’en janvier dernier, passant outre à leurs relations respectives avec les Syriens, ils étaient convenus de prohiber, au Liban, tout affrontement entre chiites et sunnites.
Tout le monde attend donc, en défendant ses positions. Ainsi, de l’aveu de ses proches, M. Émile Lahoud préfère voir d’abord ce que les tractations en cours vont donner, avant de donner corps à son projet d’instaurer un second gouvernement.
Une retenue qui prend sans doute en compte, également, l’anathème patriarcal jeté dimanche contre « ceux qui ont l’audace de songer à deux gouvernements, deux présidents, deux Liban en somme. Comme si nous avions pu oublier ce qui s’était produit lors de la dernière décennie du siècle précédent. Expérience amère qui reste accrochée à notre mémoire. » Et de souligner « combien il nous est douloureux de voir les responsables ignorer ce peuple dont ils ont la charge ». Charge patriarcale d’autant plus notable qu’après le sermon, Mgr Sfeir a reçu en tête à tête M. Lahoud, venu assister à Bkerké à la cérémonie de baptême de sa petite-fille, Emma.
Les craintes du prélat concernant une trajectoire pouvant mener à la partition ou à une sorte de fédéralisme brisant le principe de coexistence sont partagées par beaucoup de politiciens, dont bon nombre d’opposants ! Dans le camp du 8 Mars, en effet, les réactions enregistrées, en privé, au sujet du plan présidentiel sont pour le moins mitigées, sinon franchement négatives. Peut-être pas du côté du Hezbollah, qui campe toujours, par principe, sur les positions les plus radicales qui se puissent imaginer. Mais sans doute du côté des autres composantes de la contestation.
Réflexion
Retour à Baabda. Suite au sermon de Mgr Sfeir, M. Lahoud a fait savoir à ses visiteurs qu’il n’a pas encore tranché au sujet d’un second gouvernement. Mieux même : lui qui semblait si déterminé la semaine dernière encore, il laisse maintenant entendre qu’il ne penche pas pour l’émergence d’un second gouvernement. Il confie qu’il attend que la direction de l’opposition lui communique son avis sur les questions de l’heure. Sur un cabinet d’union, sur un second gouvernement, sur les partielles, sur la présidentielle. En précisant qu’il devra être informé avant le 15 juillet, car après, il lui faudra se décider. En son âme et conscience, selon ce que rapportent ses visiteurs.
Mais que ferait-il si l’opposition n’était pas en mesure de le renseigner ? En effet, elle paraît plutôt divisée. Par exemple, M. Sleimane Frangié est pour les partielles. Il estime que la vacance de deux sièges parlementaires est inadmissible et il invite ses partenaires à l’imiter. Ce qu’ils ne font pas, la plupart d’entre eux appelant à boycotter le scrutin comme illégal, comme tout acte du présent gouvernement, selon eux. Ils réclament avec insistance un cabinet dit d’union.
Mais même sur ce point, ils ne sont pas tout à fait d’accord. M. Nabih Berry estime de la sorte qu’un accord sur un tel gouvernement est du domaine de l’impossible dans les circonstances actuelles de tension. Il convient donc qu’il faut se rabattre sur un accord au sujet de la présidentielle. Parallèlement, l’on entend ainsi l’ancien ministre Wi’am Wahhab exiger sur un ton comminatoire un gouvernement qui ne serait pas de coalition. En précisant que le pays doit être uniquement dirigé par « les nationalistes », entendre par les amis de la Syrie et leurs alliés.
Il reste que l’on prête à la direction de l’opposition l’intention d’organiser une rencontre élargie de concertation devant se clôturer par un manifeste. Texte dans lequel il serait apporté une réponse unifiée à la proposition des loyalistes d’un programme politique commun, fondé sur les sept points, sur les résolutions du comité national de dialogue, sur les réformes de Paris III et sur la 1701. Cette réunion aurait lieu avant le rendez-vous de Paris, le 29 du mois en cours.
Cependant, pour ce qui est de partielles au Metn et à Beyrouth, M. Lahoud n’en démord toujours pas : il ne va pas signer le décret de convocation du corps électoral. Les objurgations lui remontrant qu’il n’a pas légalement le choix (il existe plusieurs cas où le paraphe est obligatoire, au titre du fonctionnement de la République), il n’en tient aucun compte.
Concernant le gouvernement, les visiteurs de Baabda ne mentionnent plus son projet d’un sextuor « de salut public ». Aujourd’hui, il plaide derechef pour un cabinet d’union.
Pour ce qui est de l’actualité enfin, un pôle rappelle qu’elle confirme les prévisions d’un diplomate oriental qui, retournant de Damas il y a six mois, relevait que « Les Libanais ont à choisir entre le tribunal et la stabilité… » Et c’est tout dire.
Situation shakespearienne, s’il en est. Mais plutôt dans le sens Much ado about nothing, beaucoup de bruit pour rien. Car les tonitruantes, les fracassantes, les incendiaires prises de position ou déclarations des uns et des autres dissimulent en réalité une certitude commune : il n’y a de sortie de crise possible, pour ce pays, qu’à travers un arrangement entre parties étrangères influentes. Sinon à travers un accord syro-américain, comme en 88, du moins par le biais d’une entente bis entre Iraniens et Saoudiens. Nous disons bis parce qu’en janvier dernier, passant outre à leurs relations respectives avec les Syriens, ils étaient convenus de prohiber, au Liban, tout affrontement entre chiites et sunnites.
Tout le monde attend donc, en défendant ses positions. Ainsi, de l’aveu de ses proches, M. Émile Lahoud...
Tout le monde attend donc, en défendant ses positions. Ainsi, de l’aveu de ses proches, M. Émile Lahoud...