Actualités - CHRONOLOGIE
Le départ de près de la moitié des employés qualifiés menace la qualité des services Les revenus de l’industrie hôtelière en baisse de 40 % ces deux dernières années Sahar AL-ATTAR
Par AL-ATTAR sahar, le 27 février 2007 à 00h00
Le cauchemar des hôteliers se poursuit depuis maintenant plus de deux ans. De crise politique en crise politique, en passant par plus d’une dizaine d’attentats et une guerre, les hôtels du pays n’échappent pas à la « malédiction touristique ». Les derniers souvenirs d’une année réussie remontent à 2004, à l’époque où les taux d’occupation frôlaient une moyenne annuelle de 80 %. Depuis, les saisons varient entre médiocre et catastrophique à l’exception du premier semestre de l’année 2006. Globalement, sur les deux dernières années, le taux d’occupation moyen des hôtels au Liban s’est établi à moins de 50 %, affirme Mazen Salha, président de la Société des grands hôtels du Liban, notamment propriétaire de l’hôtel Phoenicia-InterContinental et Vendôme InterContinental. Certes, le premier semestre de l’année dernière était porteur d’espoir. En janvier 2006, le Phoenicia, par exemple, l’un des plus grands hôtels de la capitale, était occupé à plus de 70 %. Sept mois et une guerre plus tard, en août dernier, seules 17 % des chambres étaient encore louées. Après l’échec de la saison estivale, les hôteliers voulaient encore y croire, mais la crise politique qui s’est ensuite installée a anéanti tout espoir de reprise. Aujourd’hui, l’hôtel phare de Beyrouth affiche un modeste taux d’occupation de près de 27 %.
« Or, pour couvrir les coûts opérationnels et les amortissements bancaires, un hôtel libanais doit au moins réaliser un taux d’occupation annuel de 60 % », indique M. Salha.
Pour donner une évaluation chiffrée et globale, M. Salha a compilé les résultats d’une dizaine d’hôtels de la capitale et de sa banlieue, comptant en tout 2 025 chambres et 2 555 employés. En moyenne, pour cet échantillon représentatif composé de onze hôtels cinq, quatre et trois étoiles, les revenus ont chuté de 40 % en 2005 et 2006 par rapport à l’année 2004, et les taux d’occupation de 30 %. Parallèlement, les coûts endossés par ces hôtels ont augmenté de 20 % entre 2004 et 2006. Résultat, les bénéfices opérationnels ont baissé de 63 % en 2006 par rapport à 2004.
L’inflation des coûts est principalement due à celle de l’énergie. « À l’hôtel Phoenicia par exemple, nous produisons notre propre électricité durant les pics de consommation, soit environ deux heures par jour, pour réaliser des économies. Mais après la guerre de juillet, la baisse de l’approvisionnement de l’EDL nous a obligés à produire plus de dix heures par jour, alors que les prix du mazout étaient en hausse », affirme le directeur des opérations de la Société des grands hôtels du Liban, Saïd Abou Ezzeddine.
Et comme un malheur n’arrive jamais seul, la menace terroriste a également augmenté les coûts de sécurité. Selon M. Abou Ezzeddine, le Phoenicia a ainsi investi plus d’un million de dollars en appareils de surveillance en tout genre et embauché une trentaine d’agents de sécurité.
Contrôle des coûts
et fuite des cerveaux
Comme toute entreprise en temps de crise, les hôtels ont tenté de contrôler leurs coûts. Mais l’industrie doit faire face à des coûts incompressibles importants. Ainsi, en 2006, les charges fixes pour la dizaine d’hôtels mentionnés (TVA, taxes municipales, électricité, eau, CNSS et autres) se sont élevées à plus de 17,5 millions de dollars.
D’un autre côté, les coûts variables (salaires et achats auprès des fournisseurs) ont totalisé environ 98,7 millions de dollars, dont 26,7 millions de frais salariaux. Alors, naturellement, les hôtels ont réduit leurs effectifs. « 50 des 1 000 employés du Phoenicia ont été envoyés dans les autres hôtels de la chaîne InterContinental. Mais, on a également dû se passer de 150 autres, notamment ceux dont les contrats étaient temporaires », reconnaît M. Abou Ezzeddine.
Toutefois, la principale inquiétude des hôteliers au niveau des ressources humaines, comme le reste des secteurs productifs d’ailleurs, est la fuite des cerveaux. Environ 50 % des cadres moyens et supérieurs de l’industrie ont émigré ces deux dernières années, notamment vers les pays du Golfe. « La situation est dramatique, estime M. Salha. Non seulement pour l’industrie il s’agit d’une perte sèche d’investissement en termes de formation, mais aussi parce qu’il devient très difficile de remplacer la main-d’œuvre qualifiée au Liban », tant l’offre est dirigée à l’étranger.
Pour les hôtels libanais, la difficulté est aujourd’hui de faire face à cette fuite des cerveaux et à la contrainte de contrôle des coûts, sans sacrifier la qualité du service.
« Un hôtel ne peut pas se permettre de perdre son standing en temps de crise sans compromettre son image et donc son avenir », explique à son tour Rony Yazbeck, propriétaire de deux hôtels quatre étoiles à Hamra, le Napoléon et le Plaza.
Donc, en attendant des jours meilleurs auxquels ils ne croient plus qu’à demi-mots, les hôteliers doivent pouvoir tenir le coup. « Or, malgré l’importance vitale de cette industrie dans l’économie libanaise, les autorités l’ont jusque-là ignorée », déplore Mazen Salha.
Comme tous les Libanais, les hôteliers espèrent une solution politique qui permettrait de renouer avec la stabilité. Mais puisque, pour le moment, cette solution échappe à la classe gouvernante, ils sont en droit de réclamer des mesures de soutien. Incapables d’assurer la stabilité nécessaire à la relance des secteurs économiques, les autorités doivent, au moins, envisager de les épauler.
Le cauchemar des hôteliers se poursuit depuis maintenant plus de deux ans. De crise politique en crise politique, en passant par plus d’une dizaine d’attentats et une guerre, les hôtels du pays n’échappent pas à la « malédiction touristique ». Les derniers souvenirs d’une année réussie remontent à 2004, à l’époque où les taux d’occupation frôlaient une moyenne annuelle de 80 %. Depuis, les saisons varient entre médiocre et catastrophique à l’exception du premier semestre de l’année 2006. Globalement, sur les deux dernières années, le taux d’occupation moyen des hôtels au Liban s’est établi à moins de 50 %, affirme Mazen Salha, président de la Société des grands hôtels du Liban, notamment propriétaire de l’hôtel Phoenicia-InterContinental et Vendôme InterContinental. Certes, le premier...