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Basket-ball - Depuis l’arrivée de l’entraîneur serbo-chypriote, les Verts ne cessent de monter en puissance Dragan Raca, le pari gagnant de La Sagesse
Par MAKHOUL NADIM, le 13 mars 2006 à 00h00
La joie pouvait se lire, mardi dernier, sur le visage des joueurs, des dirigeants et du public des Verts. Ce que La Sagesse venait d’accomplir, aucune équipe du championnat du Liban de basket-ball n’avait pu le réaliser depuis près de deux saisons : faire tomber le Club sportif, la « Dream Team » aux 44 victoires consécutives à son actif. Avec 16 points d’écart (83-67), loin de leurs bases. Et pourtant, un seul visage semblait impassible : celui de l’entraîneur Dragan Raca, l’homme par qui revient indéniablement la montée en puissance des Verts.
La dernière défaite des Jaunes en championnat remontait au… 7 avril 2004, face à Blue Stars. C’était lors d’une saison durant laquelle le club de Manara avait vécu sa première non-qualification pour le Final Four du championnat du Liban. Une saison noire pour le club, avant de goûter à nouveau à la gloire, internationale surtout.
La défaite de mardi dernier aura-t-elle constitué pour le Club sportif un simple faux pas après tant de rencontres acquises, une sorte d’erreur de parcours ? La seule absence d’Ismaïl Ahmad, indisponible pour le reste de la saison, peut-elle justifier ce revers ? À voir…
Ce qui est certain, par contre, c’est que La Sagesse a montré ce soir-là son vrai visage, conquérant et prometteur pour la suite de son parcours.
La sérénité que l’on pouvait lire sur les traits de Dragan Raca, mardi, n’avait rien d’anormal. Car le Serbo-Chypriote croyait dur comme fer que tous les efforts déployés depuis deux mois allaient finalement porter leurs fruits. Qu’à force de rigueur, de discipline et de professionnalisme, surtout, l’on peut toujours atteindre ses objectifs.
Le jour de la prise des fonctions de Raca (à prononcer Ratza), il y a trois mois, La Sagesse traversait l’une des spirales les plus négatives de son histoire. Terrassée à domicile par 22 points d’écart face au même Club sportif, l’on assistait, incrédule, à une équipe sans âme, vaincue d’avance.
Savoir redonner confiance
La tâche primordiale de Raca était donc de replacer tout le monde. Une redistribution de rôles en quelque sorte.
Ex-brillant joueur du circuit européen et de la sélection nationale chypriote, cet homme de 45 ans, diplômé en mathématiques, s’est reconverti depuis 4 ans au monde des entraîneurs. Le monde qu’il préfère…
Il est convaincu qu’en inculquant à ses joueurs une bonne discipline, ces derniers pourront faire jaillir à nouveau le meilleur d’eux-mêmes. Qu’ils pourront retrouver cette confiance individuelle, qui permet à tout un groupe d’évoluer. À l’image de Fady el-Khatib, sublime avec ses 39 points, mardi, face à la meilleure défense du championnat. Le meilleur joueur libanais ne tarit pas d’éloges pour la méthode adoptée par Raca, considérant que « c’est l’entraîneur qu’il fallait pour La Sagesse ».
Les deux joueurs américains, Kenny Satterfield et Jerold Ward, ont appris à fondre dans le système imposé par le Serbo-Chypriote. Un système qui les pousse à user de leurs qualités collectives. Leurs statistiques ainsi que leur complicité avec le restant de l’équipe, Khatib en tête, le prouvent amplement. Il y a encore deux jours, la triplette magique de La Sagesse a frappé fort, lors de son succès (111-98) face à Mouttahed : 36 points pour Ward, 31 points pour Satterfield et 30 points à mettre à l’actif de Khatib
Mais pour Raca, « gagner, c’est avant tout savoir défendre ». C’est ainsi qu’il a su redonner du jus et l’envie de continuer au vétéran Paul Khoury, âgé de 37 ans. Pièce inamovible et indispensable de la défense verte, Khoury est en train de montrer actuellement le meilleur niveau de sa carrière. Impérial aux rebonds défensifs, généreux sur le parquet, Khoury est l’exemple à suivre pour la jeune relève.
Le stratège a également octroyé de la polyvalence à ses joueurs, Bassem Balaa en premier lieu. Ce dernier aura rempli les positions 2, 3 et 4 face au Club sportif, poussant, du coup, son adversaire plusieurs fois à l’erreur.
Finalement, Raca est parvenu à optimiser son banc en donnant de l’ampleur et beaucoup de confiance à certains joueurs prometteurs, à l’image de Joe Ghattas. Ce dernier s’est chargé de museler parfaitement Tony Madison, ne lui laissant la chance d’inscrire que 6 petits points lors des trois premiers quarts temps de la rencontre. Sachant que Madison est le meilleur marqueur du championnat, roulant sur une moyenne de 33 points par sortie lors de la saison régulière…
Professionnalisme
Mardi dernier, l’on a pu donc voir évoluer une vraie équipe, complète. Une équipe imposante physiquement et moralement, puisqu’elle a parfaitement su gérer les débats de la rencontre, surtout lorsqu’elle s’était retrouvée menée au score.
Mais qu’est-ce qui a changé en quelques mois ?
« Le jour où je suis venu à La Sagesse, l’équipe était quelque peu perdue, elle faisait face à un problème d’identité en quelque sorte, souligne Raca. Compte tenu du rang qu’elle occupait sur les scènes locale et internationale, ainsi que des grands joueurs qu’elle regroupe, ses résultats ne répondaient pas aux attentes de son grand public, ni de sa direction. »
« Il était donc urgent de resituer chaque joueur, de lui redonner confiance en lui-même, d’abord, en ses coéquipiers ensuite, précise l’entraîneur. Et la confiance ne peut jaillir que d’un travail strict et persévérant. »
Raca part du principe « qu’une équipe de basket-ball gagnante doit être à l’image d’une société gagnante : ordonnée, disciplinée et prête à évoluer afin de s’adapter à son milieu ».
« Pour atteindre la rigueur, il faut travailler dur, note-t-il. Certains joueurs se plaignaient de l’intensité des entraînements, car ils n’étaient, tout simplement, pas habitués à la discipline. Mais lorsqu’ils ont senti leur évolution sur le parquet, ils ont pris conscience du fait que le seul moyen pour atteindre leurs objectifs était de bien s’appliquer. »
Travailler à long terme
En quelques mois, Raca est ainsi parvenu à inculquer à ses joueurs l’esprit combatif et la motivation qui leur faisaient défaut.
Mais pour le Serbo-Chypriote, cette renaissance devra constituer le début d’un long chantier. À commencer par devenir un sérieux prétendant pour le titre du championnat du Liban et pour celui de la WASL Club League, la compétition qualificative pour les championnats d’Asie des clubs.
« Nos trois victoires lors du premier tour de la WASL nous ont donné beaucoup de tonus, note-t-il. C’est une compétition qui nous permet de nous mesurer à de grands clubs et à différents systèmes de jeu. De plus, elle réveille l’esprit combatif chez nos joueurs, l’esprit de Coupe. »
Et le plus beau, lorsqu’on participe à une Coupe, c’est de pouvoir la brandir… « Mais cela ne devrait pas constituer une obsession ou un objectif en soi pour les joueurs, mais un aboutissement, répond Raca. Aujourd’hui, nous avons dépassé un cap, notre jeu est devenu structuré et organisé. Si nous parvenons à garder ce rythme, notre évolution sera certainement exponentielle, et c’est alors que nous pourrions battre n’importe quelle équipe et remporter des titres. »
Et des titres, Raca en a remporté à la pelle au cours de sa jeune carrière d’entraîneur (voir biographie). « Avec une équipe composée de joueurs de moyenne qualité technique, se réjouit-il. Mais des joueurs disciplinés, motivés et assoiffés de victoires. »
Cependant, l’appétit de Raca ne se limite pas uniquement à remporter des titres, mais à bâtir une vraie structure. Lorsque l’on est entraîneur professionnel, l’on désire toujours donner le meilleur de soi-même pour son club, en suivant un plan bien précis, une feuille de route. « Passer par un club, l’aider à se redresser et s’en aller ne m’intéresse pas, affirme-t-il. C’est la continuité qui motive l’être à s’accrocher et se transcender. »
« Aujourd’hui, mon premier objectif est de terminer la saison de la meilleure des façons, assure Raca. Mais ma mission ne se conclura que lorsque je parviendrais, avec la direction du club, à établir une structure à long terme. À l’image des grands clubs européens, qui prennent en charge leurs joueurs dès leur bas âge en leur inculquant l’esprit d’équipe, la discipline et le mode de vie à suivre. L’école de La Sagesse comporte plus d’une dizaine de milliers d’élèves, dont des centaines rêvent certainement de devenir un jour basketteurs professionnels, mais qui, malheureusement, n’ont pas les moyens. Il ne faut pas oublier que le basket-ball est le sport numéro un au Liban… »
« Le club de La Sagesse a donc tous les moyens pour devenir le meilleur club asiatique. Il pourra même atteindre le niveau européen », a conclu Raca, nommé en juin 2004 meilleur entraîneur européen par la FIBA.
Une offre qui devra certainement donner des idées à Henri Chalhoub, président de La Sagesse pour les quatre années à venir...
Nadim MAKHOUL
La joie pouvait se lire, mardi dernier, sur le visage des joueurs, des dirigeants et du public des Verts. Ce que La Sagesse venait d’accomplir, aucune équipe du championnat du Liban de basket-ball n’avait pu le réaliser depuis près de deux saisons : faire tomber le Club sportif, la « Dream Team » aux 44 victoires consécutives à son actif. Avec 16 points d’écart (83-67), loin de...
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