Pour quelle raison le patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir, a-t-il appelé à un accord préalable sur le successeur du chef de l’État, Émile Lahoud, et au recours aux seuls moyens légaux pour obtenir le départ de ce dernier ?
Un dignitaire religieux explique que c’est l’unique moyen de parvenir à cette fin sans mettre le pays en péril, un accord sur le nom du successeur permettant d’assurer la majorité des deux tiers nécessaire à la Chambre pour voter un amendement constitutionnel écourtant le mandat actuel. Cela dispenserait de descendre dans la rue et de provoquer éventuellement des contre-manifestations, une situation qui conduirait le Liban vers l’inconnu.
Le fait, ajoute ce dignitaire, est que le président Lahoud refusera d’abandonner son poste et ne cédera ni aux pétitions parlementaires ni même à la constitution d’une majorité des deux tiers, si elle n’est pas précédée d’un accord sur un candidat.
Il faut préciser à cet égard qu’une proposition d’amendement pour écourter le mandat présidentiel doit nécessairement attendre l’ouverture en mars de la session parlementaire ordinaire, une telle proposition ne pouvant être présentée en session extraordinaire, comme c’est le cas actuellement.
Il faudrait aussi prévoir que, le cas échéant, le président Lahoud pourrait renvoyer la proposition pour réexamen à la Chambre, ce qui aurait pour effet de retarder considérablement l’échéance souhaitée par l’Alliance du 14 mars.
Le chef de l’État, ajoute la même source, ne céderait pas non plus à la pression de la rue car, du fait des clivages actuels dans le pays, il pourrait toujours compter sur une pression populaire contraire favorable, elle, à son maintien.
Voilà pourquoi la conclusion d’un accord préalable sur le nom du successeur est la seule façon de régler le problème, parce que après un tel accord, M. Lahoud ne bénéficierait plus d’aucune couverture politique et serait par conséquent contraint d’abandonner son poste.
La question qui se pose actuellement est de savoir s’il est possible de parvenir à un accord qui satisferait à la fois la majorité du 14 mars et les autres principaux pôles politiques du pays, étant entendu que la comparaison avec l’accord intervenu au sujet de la partielle législative de Baabda-Aley n’est pas de mise en raison de la disproportion en importance entre les deux échéances.
Pour ce qui est du patriarche Sfeir, il est d’ores et déjà certain qu’il n’entrera pas dans le jeu des noms des présidentiables, conformément à son habitude en la matière. En revanche, cela ne l’empêchera point d’intervenir pour déterminer les qualités qui, à son avis, devront être celles du prochain président de la République.
Mais il semble aussi que cette fois-ci, le chef de l’Église maronite compte tout aussi bien s’attribuer un droit de regard sur les orientations politiques des candidats potentiels. En clair, le patriarche Sfeir ne soutiendra que les candidats connus pour être des défenseurs de la souveraineté du Liban, de son indépendance et de sa libre décision.
Le dignitaire religieux reconnaît qu’il ne sera pas facile de parvenir à un consensus global sur un présidentiable unique, chacune des parties en présence voulant s’assurer des garanties sur ce que sera la politique du prochain président au sujet des dossiers « chauds », comme les relations avec la Syrie, les armes du Hezbollah et celles des Palestiniens.
Certains députés qui se sont entretenus ces jours derniers avec le patriarche Sfeir font état d’une proposition qui consisterait à lui présenter une liste restreinte de personnalités répondant aux critères et aux orientations qu’il a définis. Il lui reviendrait alors soit de choisir lui-même un nom de cette liste soit de la soumettre aux principaux états-majors politiques en les invitant à s’entendre entre eux sur un candidat.
Éventuellement, en cas d’impossibilité de parvenir à un candidat unique, ce serait alors à la Chambre de départager les candidats une fois un accord dégagé sur la tenue de l’élection présidentielle.
Dans certains milieux, on s’attend à ce que le prélat, tout en s’abstenant de désigner clairement l’un des noms sur la liste, conformément à son principe de base, n’en suggère pas moins une préférence marquée pour l’un des candidats qui obtiendrait alors l’aval des états-majors politiques. Le cas échéant, le mouvement Amal rallierait le choix opéré, son chef, Nabih Berry, ayant à plusieurs reprises fait savoir qu’en ce qui a trait à la présidentielle, il s’en remettait entièrement à la décision de Bkerké.
Mais dans d’autres milieux politiques on s’interroge sur les raisons qui empêcheraient le jeu démocratique de prendre son cours. Dans ces milieux, on juge plus opportun qu’en cas d’impossibilité de consensus sur un nom unique, le camp du 8 mars désigne son candidat et celui du 14 mars le sien.
Les partisans de cette option considèrent d’ailleurs que le consensus en ce qui a trait à la présidentielle n’est réellement possible qu’à l’ombre d’une tutelle étrangère, comme c’était le cas avec la Syrie.
Émile KHOURY
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Un dignitaire religieux explique que c’est l’unique moyen de parvenir à cette fin sans mettre le pays en péril, un accord sur le nom du successeur permettant d’assurer la majorité des deux tiers nécessaire à la Chambre pour voter un amendement constitutionnel écourtant le mandat actuel. Cela dispenserait de descendre dans la rue et de provoquer éventuellement des contre-manifestations, une situation qui conduirait le Liban vers l’inconnu.
Le fait, ajoute ce dignitaire, est que le président Lahoud refusera d’abandonner son poste et ne cédera ni aux pétitions parlementaires ni même à...