Haïti attendait hier avec fébrilité les résultats finaux de sa première présidentielle depuis la chute d’Aristide, alors que le score du favori, René Préval, 63 ans, continue de s’effriter, passant à 49,10 % des votes, selon les derniers décomptes partiels. Après une comptabilisation de 75,81 % des suffrages, René Préval obtient 49,10 % des votes. Cette tendance implique, si elle est confirmée, la tenue d’un deuxième tour prévu le 19 mars. En deuxième position figure Leslie Manigat, 75 ans, un autre ex-président haïtien (1988), avec 11,72 % des votes. L’industriel Charles Henri Baker, 50 ans, arrive à la troisième place, crédité de 8,02 % des votes, toujours selon ces résultats partiels. Des appels au calme ont été lancés après des manifestations à Port-au-Prince de milliers de partisans de l’ex-chef d’État (1996-2001), sûrs de sa victoire. La police haïtienne et l’ONU, qui dispose de 9 500 Casques bleus et policiers internationaux en Haïti, étaient sur le pied de guerre hier, dans la crainte qu’un résultat défavorable à Préval ne provoque une nouvelle flambée de violences dans la petite république tourmentée des Caraïbes. « Soit il passe au 1er tour et tout va bien sur le plan de la sécurité. Soit il dépasse de peu 50 % et le camp opposé pourrait contester le résultat. Soit un deuxième tour est nécessaire et ses partisans les plus radicaux vont croire qu’on leur a volé la victoire », résume un responsable de l’ONU sous le couvert de l’anonymat. Depuis le début de la semaine, les bandes armées qui terrorisaient encore récemment les habitants de Port-au-Prince observent une trêve et pourraient déposer les armes si leur favori, René Préval, gagne la présidentielle. Sur les quelque 3,5 millions d’électeurs appelés à choisir un président et un Parlement le 7 février, quelque 63 % ont voté pour un chef d’État, selon le Conseil électoral. Il s’agit de la plus large participation à une élection jamais atteinte en Haïti. Les observateurs internationaux ont estimé que les premières élections de l’après-Aristide, quatre fois reportées, avaient été « libres » même après un début particulièrement chaotique. Les répétitions du carnaval, une fête sacrée pour les 8,5 millions de Haïtiens où l’alcool est roi, ont repris hier soir et pourraient contribuer aux éventuels débordements. Coïncidence, cette journée a été baptisée en Haïti « Journée nationale de la paix et de la tolérance » et le Sud-Africain Desmond Tutu, prix Nobel de la paix 1984, y a prêché la réconciliation nationale.