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Les émeutes d’Achrafieh et l’opération de Chebaa : deux faces d’un même problème Le comportement du Hezbollah a favorisé une unanimité au Conseil de sécurité autour de la 1559, selon des sources diplomatiques
Par ABOU RIZK Tilda, le 07 février 2006 à 00h00
Les émeutes et les actes de vandalisme, dimanche à Achrafieh, ont en quelque sorte éclipsé le regain de tension, vendredi, à la ligne bleue, lorsque le Hezbollah avait bombardé des positions israéliennes à Chebaa, en signe de représailles contre la mort d’un berger, en territoire libanais, sous les balles de soldats israéliens. Pourtant, les deux événements se rejoignent quelque part. Les deux mettent malheureusement en relief, encore une fois, l’incapacité totale du gouvernement à prendre en main le dossier de la sécurité et à se doter des moyens lui permettant d’avoir les coudées franches pour mettre le pays à l’abri de secousses similaires à celles de samedi, ou encore pour récupérer la décision de paix et de guerre, détenue jusqu’à présent par le Hezbollah, alors que l’État est censé avoir récupéré sa liberté de décision à tous les niveaux politiques après le départ des Syriens.
Depuis sa formation, en juillet dernier, le gouvernement de M. Siniora est pris dans un engrenage de réactions à des actions sur lesquelles il n’arrive pas à avoir de contrôle. Les incidents d’Achrafieh et les derniers échanges de tirs au Liban-Sud en sont la preuve flagrante.
Dans les milieux diplomatiques occidentaux, de nombreuses questions sont posées au sujet des émeutes d’Achrafieh que l’on se garde bien d’analyser en profondeur, en attendant que l’image s’éclaircisse davantage. Il n’en demeure pas moins que dans ces milieux, on met l’accent sur deux éléments principaux : le degré de tension communautaire au Liban et l’importance du soutien apporté dans les milieux fondamentalistes au mouvement organisé dimanche, avant de relever, non sans surprise, l’insuffisance du nombre des agents de l’ordre déployés, alors même que la manifestation avait été annoncée la veille.
Paralèllement, des « éléments positifs » sont apparus à la faveur des émeutes de dimanche, estime-t-on dans les mêmes milieux : le tollé musulman contre les actes subversifs et leurs auteurs, la présence de cheikhs sur le terrain pour repousser les manifestants, la solidarité manifestée à l’égard des chrétiens et les appels à la retenue, sans compter que ces incidents sont susceptibles de réunifier les Libanais et de renforcer le courant hostile au fondamentalisme.
Quoi qu’il en soit, le Liban se doit de réorganiser, d’équiper et de former ses différents services de sécurité, afin qu’il soit à même de faire face, à l’avenir, à tout genre d’actes subversifs. Dans les milieux précités, on réaffirme que des capitales occidentales sont prêtes à soutenir les autorités dans cette entreprise pour peu qu’elles les sollicitent. « Une offre en ce sens a déjà été faite au Liban et elle tient toujours. Le problème est que nous ne pouvons pas insister ou prendre nous-mêmes l’initiative d’apporter une aide technique, car nous serons accusés de vouloir remplacer une occupation par une autre », indique-t-on de mêmes sources, en insistant sur le fait que certaines parties sont en train d’essayer de provoquer une guerre civile au Liban. « La question est de savoir si les Libanais suivront. »
Reste le dossier du Liban-Sud, directement lié au problème de la sécurité qui échappe au contrôle du gouvernement.
Selon les mêmes sources, le Liban a raté une intiative diplomatique de taille en sa faveur, à cause de l’opération menée par le Hezbollah contre des positions israéliennes à Chebaa. Au lendemain de la mort du berger et des menaces de représailles lancées par le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, raconte-on, le Premier ministre, Fouad Siniora, s’était efforcé, à la faveur de moult contacts politiques, d’éviter une riposte du Hezbollah et un regain de la tension à la ligne bleue, pour ne pas compromettre cette initiative, consécutive au rapport de la Finul faisant directement assumer à Israël la responsabilité de la mort du berger. Avant que les ambassadeurs des pays membres permanents du Conseil de sécurité soient convoqués au palais Bustros, M. Siniora les avait aussi appelés pour les notifier expressément que la démarche du chef de la diplomatie Faouzi Salloukh représente celle de l’ensemble du gouvernement. « Sauf que lorsque l’attaque a eu lieu, le mouvement diplomatique en faveur du Liban s’est anéanti », soulignent les sources diplomatiques, qui mettent l’accent sur l’exaspération de la communauté internationale face au comportement du parti de Dieu. « Il ne faut pas oublier que la résolution 1559 du Conseil de sécurité a été votée par 9 voix sur 15, alors que la déclaration présidentielle réclamant fermement l’application de cette résolution a été récemment approuvée à l’unanimité des membres du Conseil. La communauté internationale en a assez de voir le Hezbollah imposer ses quatre volontés et miner le gouvernement de M. Siniora. C’est cette formation qui a provoqué une unanimité autour de l’application de la 1559 », selon les sources diplomatiques.
Tilda Abou Rizk
Les émeutes et les actes de vandalisme, dimanche à Achrafieh, ont en quelque sorte éclipsé le regain de tension, vendredi, à la ligne bleue, lorsque le Hezbollah avait bombardé des positions israéliennes à Chebaa, en signe de représailles contre la mort d’un berger, en territoire libanais, sous les balles de soldats israéliens. Pourtant, les deux événements se rejoignent quelque part. Les deux mettent malheureusement en relief, encore une fois, l’incapacité totale du gouvernement à prendre en main le dossier de la sécurité et à se doter des moyens lui permettant d’avoir les coudées franches pour mettre le pays à l’abri de secousses similaires à celles de samedi, ou encore pour récupérer la décision de paix et de guerre, détenue jusqu’à présent par le Hezbollah, alors que l’État est censé avoir...