Après Damas et Beyrouth, c’est à Téhéran hier que la représentation diplomatique danoise a été la cible de manifestants musulmans en colère après la publication dans des journaux européens de caricatures du prophète Mohammad. Un groupe de manifestants a en effet brièvement pénétré hier soir dans l’enceinte de l’ambassade du Danemark à Téhéran, alors que la police a tiré des gaz lacrymogènes pour éviter un assaut important de la représentation diplomatique, a constaté un journaliste de l’AFP. Peu auparavant, plusieurs cocktails Molotov et des pierres avaient été lancés dans l’enceinte de l’ambassade. « Ne causez pas de dégâts, le gouvernement iranien devra payer », a crié la police à l’aide de haut-parleurs. L’Iran a, par ailleurs, annoncé la suspension des échanges commerciaux entre la République islamique et le Danemark. Les échanges commerciaux entre les deux pays s’élèvent à 280 millions de dollars par an. En Irak, 2 000 chiites ont réclamé une fatwa de leurs dirigeants religieux autorisant l’assassinat des auteurs des caricatures. En outre, des soldats danois ont été, dimanche, la cible de tirs dans le sud du pays. Le ministre des Transports, Salam al-Maliki, a par ailleurs affirmé avoir décidé de geler tous les contrats avec le Danemark. Par ailleurs, trois manifestants ont été tués en Afghanistan dans diverses manifestations, qui se sont également étendues à l’Afrique de l’Est, notamment en Somalie, où un manifestant a été tué. Au Kenya, voisin de la Somalie, la principale organisation musulmane, le Conseil suprême des musulmans du Kenya (Supkem), a appelé les fidèles à manifester vendredi dans la capitale, Nairobi. À Djibouti, pays musulman à 96 % voisin de la Somalie, des étudiants ont manifesté pendant le week-end, et le gouvernement a interdit l’importation et la commercialisation de produits danois. Par ailleurs, près de 3 000 Algériens, répondant à l’appel d’un parti islamiste modéré, ont crié leur colère à Alger et appelé au boycottage de « tous ceux qui portent atteinte à l’islam », a constaté un journaliste de l’AFP. En Jordanie, les rédacteurs en chef de deux journaux jordaniens, qui avaient appelé les musulmans à la raison et publié les caricatures controversées de Mohammad, ont été de nouveau arrêtés, après avoir été relâchés. Ils avaient comparu devant la justice pour « atteinte au sentiment religieux » puis libérés par le juge dimanche. Au Maroc, le directeur et un journaliste du seul journal marocain à avoir publié une caricature de Mohammad ont été mis en examen. Face à cette situation, le Danemark déconseillait à ses ressortissants les voyages qui ne sont pas « absolument nécessaires » dans 14 pays musulmans, parmi lesquels l’Égypte, l’une des destinations favorites des vacanciers du royaume en hiver. L’Association des voyagistes au Danemark (RiD), qui regroupe douze tour-opérateurs danois représentant 90 % des voyages charters du pays a ainsi décidé hier d’annuler tous ses voyages à destination de l’Égypte, de la Tunisie et du Maroc. Plus de 3 000 Danois qui avaient prévu cet hiver des vacances en Égypte, mais aussi en Afrique du Nord, vont devoir renoncer à leur séjour, selon Stig Elling, directeur du tour-opérateur Star Tour. Afin de désamorcer la crise, le ministre danois des Affaires étrangères Per Stig Moeller, qui s’était dit « horrifié » dimanche face à la montée de la violence au Moyen-Orient, a par ailleurs proposé de se rendre au siège de l’Organisation de la conférence islamique (OCI). Cette proposition a été accueillie favorablement par l’OCI qui a déploré dimanche les attaques contre les ambassades du Danemark et de la Norvège à Damas, les qualifiant de « réactions démesurées » portant gravement atteinte à l’image de l’islam.