«Je commence à l’aube et finis au coucher du soleil. C’est un travail très dur », explique Shamta devant le métier à...
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REPORTAGE La misère des enfants afghans, tisseurs de tapis
le 07 décembre 2005 à 00h00
De l’aube au crépuscule, les petits doigts maigres de Shamta, 12 ans, et de ses frères et sœurs s’épuisent à faire des milliers de nœuds, tissant pour un salaire de misère un tapis qui sera vendu plusieurs milliers de dollars à un riche Afghan ou étranger.
«Je commence à l’aube et finis au coucher du soleil. C’est un travail très dur », explique Shamta devant le métier à tisser dressé sous une tente de fortune dans un des quartiers les plus pauvres de la capitale Kaboul. La jeune fille, qui n’a jamais été à l’école, y travaille avec sa sœur de 16 ans, Fauzia, et deux de ses petits frères sur des tapis de 24 mètres carrés (6 mètres sur 4) qu’ils mettront trois mois à fabriquer.
Le tissage des tapis est une très ancienne tradition afghane et ces pièces faites main aux couleurs chatoyantes, célèbres dans le monde entier, sont une des seules sources d’exportation d’un pays ravagé par trente ans de conflits. Et l’unique source de revenus de la famille de Shamta. « Nous gagnons entre 15 000 et 20 000 afghanis (300 à 400 dollars) par mois pour l’ensemble de la famille », déclare le père de la jeune fille, Waheedullah, qui a enseigné à ses enfants ce qu’il avait lui-même appris de son père. « Ce n’est pas assez », estime-t-il regardant le futur tapis sur lequel s’active la famille, et qui sera vendu jusqu’à 3 000 dollars.
« Le fil vert sur le fil vert, le rouge sur le rouge, le violet sur le violet... Il faut faire attention », explique Shamta, qui supporte de moins en moins bien ce travail méticuleux.
La situation des milliers d’ouvriers du tapis afghans, la plupart enfants, a alarmé la militante des droits de l’homme Nilofar Sayar, qui a passé des mois à rencontrer près de 300 d’entre eux dans le nord de l’Afghanistan, une des principales zones de production. « Ils ne sont pas payés et sont réduits à l’état d’esclaves par les hommes qui dirigent leurs familles », explique Nilofar Sayar, employée par l’ONG Rabia Balkhi Management of Skills Support and Improvement Group. Femmes et filles, parfois âgées de onze ans, travaillent jusqu’à 18 heures par jour « dans des ateliers poussiéreux, sombres et humides » qui en font des proies faciles pour la tuberculose, souligne-t-elle. Elles souffrent de problèmes d’yeux ou de peau, dus au contact permanent avec la laine et les pigments. « Mêmes malades, elles continuent à tisser. Elles sont utilisées comme des machines par leurs maris, mais personne ne s’en soucie », déplore Nilofar Sayar.
Pour tenir leur place, ces femmes et enfants prennent souvent de l’opium, dont l’Afghanistan est le premier producteur mondial, les premières en donnant même à leurs bébés pour les tenir au calme pendant la journée, ajoute-t-elle. « L’opium permet d’oublier la douleur. Et j’en donne également à mon bébé. Sinon, qui va faire les tapis ? » déclare l’une d’elles, citée dans le rapport de Nilofar Sayar.
Sardar AHMAD (AFP)
Shamta, 12 ans,
tissant méticuleusement un tapis.
De l’aube au crépuscule, les petits doigts maigres de Shamta, 12 ans, et de ses frères et sœurs s’épuisent à faire des milliers de nœuds, tissant pour un salaire de misère un tapis qui sera vendu plusieurs milliers de dollars à un riche Afghan ou étranger.
«Je commence à l’aube et finis au coucher du soleil. C’est un travail très dur », explique Shamta devant le métier à...
«Je commence à l’aube et finis au coucher du soleil. C’est un travail très dur », explique Shamta devant le métier à...
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