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Actualités - REPORTAGE

REPORTAGE Le « mur » prive les agriculteurs palestiniens de leurs terres

À Jayyous, un village palestinien, les habitants crient leur désespoir : le « mur » érigé par Israël en Cisjordanie les a coupés de leurs terres les plus fertiles. Du haut d’une colline surplombant le village, Abou Azzam aperçoit de l’autre côté de la barrière ses 175 dounoums (17,5 hectares) de plantations d’avocats, de mangues, de pêches, de pommes et d’abricots. Il y a trois ans, il employait plus de 2 000 personnes. Aujourd’hui, seuls lui et son épouse sont autorisés à voir de loin leur récolte pourrir. « Jayyous a perdu 75 % de ses terres, et 90 % de ses revenus », soupire Abou Azzam. Le « mur » contesté, censé protéger les Israéliens des attentats-suicide, a ainsi privé de nombreuses communautés palestiniennes de leurs terres et, dans beaucoup de cas, les a isolées. Mais, selon un nouveau rapport d’une organisation humanitaire, Israël a fixé le tracé de cette barrière non pas pour accroître sa sécurité, mais afin d’exproprier des Palestiniens de leurs terres et de permettre l’expansion de colonies juives, y compris dans le secteur de Jayyous. Les Palestiniens soutiennent en plus que le tracé de la barrière, qui mord souvent très profondément en Cisjordanie, vise à fixer unilatéralement les frontières et réduire la superficie de leur futur État. Seuls les Palestiniens munis de titres de propriétés foncières peuvent avoir des permis de passage, alors que beaucoup disposent de leurs terres depuis l’Empire ottoman sans l’avoir déclaré pour échapper au fisc. Les villes de Ramallah et Hébron ont appris à se passer de la production de Jayyous. Les agriculteurs du village sont donc contraints de cultiver le peu de terres encore accessibles et de brader cette production sur le marché local. Du coup, pas moins de 80 % des villageois dépendent d’une assistance alimentaire. Les jeunes quittent le village pour aller ailleurs en Cisjordanie ou se rendre à l’étranger. Au loin, les gratte-ciel de la plaine côtière d’Israël s’étirent, comme la promesse d’un autre monde. À l’époque où il gagnait encore bien sa vie, Abou Azzam avait pu envoyer ses sept enfants étudier à l’université. Aujourd’hui, il ne peut joindre les deux bouts qu’avec l’aide de ses fils et frères. Pour les détenteurs d’un permis de passage, une porte est ouverte dans la barrière 12 heures par jour, mais Abou Azzam a été informé qu’elle sera bientôt fermée. Pour gagner ses terres, il sera contraint de marcher, la circulation automobile étant interdite. « Je suis convaincu que 70 % des agriculteurs dans mon cas renonceront à se rendre sur leurs terres, et Israël pourra alors facilement s’en saisir », dit-il. Sarit Michaeli, porte-parole de l’organisation humanitaire israélienne B’Tselem, souligne que les terres abandonnées pendant trois ans peuvent être considérées comme « domaniales » et devenir alors définitivement inaccessibles aux Palestiniens. À la hauteur de Jayyous, la barrière inclut la colonie juive de Zoufim et de larges bandes de terres, quelques kilomètres à l’intérieur de la Cisjordanie. Selon un rapport de B’Tselem, une zone industrielle et une colonie, Nofei Zoufim, comptant 1 200 logements, doivent être créées sur ces bandes de terres. « Ces projets sont la véritable raison du tracé de la barrière à Jayyous », estime Jessica Montell, une responsable de B’Tselem, qui a saisi la Cour suprême israélienne dans l’espoir qu’elle ordonnera un nouveau tracé de l’ouvrage. Jennie MATTHEW (AFP)

À Jayyous, un village palestinien, les habitants crient leur désespoir : le « mur » érigé par Israël en Cisjordanie les a coupés de leurs terres les plus fertiles.
Du haut d’une colline surplombant le village, Abou Azzam aperçoit de l’autre côté de la barrière ses 175 dounoums (17,5 hectares) de plantations d’avocats, de mangues, de pêches, de pommes et d’abricots. Il y a...