Actualités - OPINION
Les armes du Hezbollah, les Palestiniens, les relations avec la Syrie et le tracé des frontières, des sujets qui nécessitent des compromis Le dialogue national, un mirage dans le désert de la présidence
le 26 novembre 2005 à 00h00
L’appel du président Émile Lahoud à un dialogue national, dans son discours du 22, n’a pas suscité de réaction notable. Seul le président Amine Gemayel a fait au chef de l’État la politesse d’une réponse. D’ailleurs négative, soulignant en substance que la proposition est vide de tout contenu sérieux, du moment que de larges franges de la société politique sont en conflit ouvert avec le président de la République. La majorité parlementaire boycotte ainsi le palais et ne s’est pas rendue à la réception qui y a été donnée pour la fête de l’Indépendance. Isolé, contesté dans sa légitimité, le président n’est pas en mesure d’organiser, et encore moins de diriger, un débat national.
Il reste qu’il subsiste une contradiction fondamentale à ce niveau. En effet, depuis le 14 mars et le retrait syrien le 26 avril, toutes les parties parlent de la nécessité de se réunir pour discuter de l’avenir du Liban nouveau. Et pour tenter de régler les premiers problèmes politiques qui se présentent, comme l’application de la 1559, le désarmement du Hezbollah et des Palestiniens, les relations avec la Syrie, le tracé des frontières ou l’influence des Occidentaux.
Bien entendu, le point qui retient le plus l’attention reste le rôle de la Résistance. Le moyen de le préserver, sans affecter la stabilité du pays, sans permettre de dangereuses divisions intérieures. Mais aussi sans porter atteinte à des principes fondamentaux comme la primauté de la loi et la souveraineté de l’État. État qui, selon la formule frappante des nouveaux politologues, doit détenir en toute exclusivité « le droit de violence », c’est-à-dire le muscle. Dans le cas du Liban, ce n’est d’ailleurs pas une simple question de droit ou de jurisprudence, mais bien un enjeu politique essentiel. On sait en effet que ce pays reste sous observation internationale, quant à ses capacités de s’assumer. Étant donné les circonstances qu’il traverse, son état de renaissance ou de convalescence, étant donné aussi ses particularités, la communauté internationale a consenti à lui laisser un délai de grâce sine die. Pour qu’il s’arrange en vue de parvenir à se conformer à la 1559 sans crise. Cependant, les récentes flambées au Sud donnent à réfléchir aux capitales, qui commencent à se demander s’il ne faut pas fixer une date butoir pour l’exécution de la 1559. Et plus il y aurait de secousses sur le terrain, plus cette exigence se ferait pressante. Avec le risque d’une nouvelle résolution précisant les mécanismes du désarmement. Pour le moment, les capitales se contentent de mises en garde. En insistant pour que le dialogue promis par les Libanais eux-mêmes commence sans tarder. Or rien ne s’ébauche encore. Et l’on a eu même la surprise de voir le Hezbollah, qui participe pourtant au gouvernement, poser une question parlementaire au président du Conseil sur les dires de Roed-Larsen relatifs à un engagement officiel libanais d’appliquer la 1559. Cependant, le Hezb, bien qu’il considère le dossier sous un angle tout à fait particulier et qu’il refuse la 1559, répète qu’il n’est pas contre le dialogue. Les échanges devant porter selon lui non pas sur son désarmement, mais sur le meilleur moyen de protéger le Liban face à Israël. Dans ce cadre et dans cet esprit, le Hezbollah n’écarte pas l’éventualité d’intégrer ou d’adjoindre, d’une manière ou d’une autre, ses forces combattantes à l’armée libanaise. Il ajoute qu’en tout cas, il faut d’abord des garanties concernant la cessation des transgressions israéliennes aussi bien que la récupération de Chebaa.
Joumblatt
Pour sa part, Walid Joumblatt envisage plutôt le dialogue sous un angle global. Bien que poussé récemment un peu plus, par les attaques d’Assad et de la Syrie, vers un 14 mars dont il s’était un peu éloigné pour se rapprocher du 8 mars, il tente encore de jouer les traits d’union entre les deux groupes. Il prône, dans la ligne de l’alliance électorale quadripartite qui l’avait lié aussi bien au tandem Amal-Hezbollah qu’aux haririens ou aux FL, un dialogue élargi. Ses partisans font valoir combien la majorité parlementaire (72 sièges) reste, à bien y regarder, redevable au tandem Amal-Hezbollah. Dont l’apport, dans la bataille électorale de Baabda-Aley, a permis d’empêcher une victoire écrasante des aounistes. Joumblatt tient donc à garder de bons rapports avec le Hezbollah, malgré les divergences concernant le régime syrien ou la présidence de la République libanaise. Il s’efforce même d’arrondir les angles entre Saad Hariri et le Hezb.
Mais dans la réalité pratique, et assez étrangement, pas plus que le président Lahoud un quelconque pôle local ne semble avoir des chances sérieuses de faire aboutir une dynamique de dialogue général. Tous se disent bien intentionnés et prêts, mais ne trouvent pas de terrain d’entente pour commencer, ni sur l’ordre du jour, ni sur l’agenda, ni sur les priorités, ni sur les constantes dites nationales, ni même sur le site. Baabda étant disqualifié, qui pourrait prendre l’initiative. Certains proposent que le rôle échoie à Berry, mais il est lui aussi contesté par beaucoup. De plus, la question de la présidentielle suscite un clivage insoluble, même au sein du 14 mars, entre les partisans du statu quo et les militants du changement accéléré.
Cependant, la bonne volonté des uns et des autres se manifeste par des concertations, des rencontres ou des conversations téléphoniques bilatérales intensifiées. Même et surtout entre parties plus ou moins opposées. Ainsi, Joumblatt autant que Geagea se dit disposé à rencontrer Aoun. Et il devrait se rendre sous peu auprès du patriarche Sfeir. La psychose sécuritaire se dissipant, les déplacements de visites se font plus fréquents. Geagea a pu voir Joumblatt qui a d’autre part dépêché Aridi chez Hassan Nasrallah. Et, dans ce cadre, des sources informées croient savoir que Saad Hariri devrait retourner prochainement au Liban, pour s’installer dans une sorte de forteresse que l’on aménage pour lui dans le centre-ville.
Philippe ABI-AKL
L’appel du président Émile Lahoud à un dialogue national, dans son discours du 22, n’a pas suscité de réaction notable. Seul le président Amine Gemayel a fait au chef de l’État la politesse d’une réponse. D’ailleurs négative, soulignant en substance que la proposition est vide de tout contenu sérieux, du moment que de larges franges de la société politique sont en conflit...
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