Récemment, près de 8000 volontaires se sont immobilisés devant son objectif à Barcelone. Rassembler autant de personnes pour une œuvre d’art est déjà une gageure. Mais ce qui frappe et étonne dans cette démarche, c’est le fait que ces «mannequins d’un jour» posent en tenue d’Adam, pas moins que cela. Spencer Tunick, photographe US très en vogue actuellement, arrive ainsi à convaincre des centaines, des milliers de personnes, de s’exhiber sans retenue devant son appareil. Mais pas de n’importe quelle manière: tous en même temps, et tous au même endroit! Il photographie ainsi des «paysages» de corps nus, disposés les uns à coté des autres, souvent d’une manière... sans vie. Allant totalement au-delà du nu académique, jamais vulgaire, souvent dérangeant. Toujours avec un souci graphique évident. Le...
Actualités - REPORTAGE
Gros Plan Il sillonne les villes, dénude les habitants et les prend en photo Spencer Tunick, metteur en scène du nu (photos)
Par GHANDOUR Maya, le 16 août 2005 à 00h00
Récemment, près de 8000 volontaires se sont immobilisés devant son objectif à Barcelone. Rassembler autant de personnes pour une œuvre d’art est déjà une gageure. Mais ce qui frappe et étonne dans cette démarche, c’est le fait que ces «mannequins d’un jour» posent en tenue d’Adam, pas moins que cela. Spencer Tunick, photographe US très en vogue actuellement, arrive ainsi à convaincre des centaines, des milliers de personnes, de s’exhiber sans retenue devant son appareil. Mais pas de n’importe quelle manière: tous en même temps, et tous au même endroit! Il photographie ainsi des «paysages» de corps nus, disposés les uns à coté des autres, souvent d’une manière... sans vie. Allant totalement au-delà du nu académique, jamais vulgaire, souvent dérangeant. Toujours avec un souci graphique évident. Le résultat, à la fois original et troublant, est toujours réussi.
Ce New-Yorkais travaille le nu depuis 1992. Stéréotypie de la photo, pourrait-on dire. Mais ici, rien de tel. Dans son œuvre, le nu est un élément, le nu est élémentaire. Son art défie les notions préconçues de nudité et les connotations – culturellement chargées et souvent négatives – qui lui sont associées. Dans son travail, c’est la beauté inhérente à tous les êtres humains qui prévaut. On voit bien qu’il n’y a aucune intervention d’Eros ou de Thanatos dans ses images.
Mais qui est Spencer Tunick? Selon le magazine New Yorker, «avant d’être connu pour ses installations élaborées et controversées de nus, Tunick était assistant photographe auprès de son père, immortalisant sur papier glacé les soirées et cocktails huppés de New York. Loin des banales photos de société, ses clichés possédaient un humour latent». Le photographe avait ainsi l’œil pour dénicher le détail incongru qui vous transforme une scène apparemment ordinaire en un croquis délicieusement narquois. Cette mise en scène se poursuit dans ses portraits de nus. On peut voir un Noir d’Afrique du Sud à côté d’un poteau de béton sur lequel est peint une sorte de totem, une femme en Antarctique debout sur une pierre d’une plage de galets ; ou un garçon allongé dans une vitrine de magasin d’alimentation… Il s’agit dans tous les cas non pas d’individus mais d’êtres vivants dans ce bas-monde. Mais il faut préciser que Tunick s’est rendu célèbre non pas par ses portraits individuels, mais pour ses nus collectifs. Dans l’Amérique puritaine, il a fait scandale. La ville de New York lui a intenté un procès. Mais il a gagné le droit d’exercer son métier. Ce qui l’intéresse dans tout cela, c’est «le défi de la création sous pression. Et aller au-delà des limites imposées par les mœurs régionales. Créer une tension dynamique entre les corps et le monde extérieur».
Tunick a dénudé des gens à Harlem, dans le fameux Meat Market. Ainsi qu’à Montréal, sur l’esplanade du Musée d’art contemporain, dans les jardins botaniques de Melbourne, à la Biennale de São Paolo, dans une place publique au Chili, à Barcelone, devant l’institut culturel, à Londres avec pour fond la belle façade de la Saatchi Gallery ou aussi à même l’asphalte à Buenos Aires…
Dans une interview accordée à la BBC de Londres (que l’on peut écouter sur le site www.nakedworlddoc.com), il indique qu’après la séance de photo – qui dure 45 minutes, dont trois seulement de nudité – il invite les participants à un café. Ainsi, des rencontres se seraient nouées, avec des mariages et des enfants à la clé. Tunick, qui prend son travail très à… corps, est tout content de joueur le Cupidon.
Maya GHANDOUR HERT
En bref
Né à Middletown, New York, en 1967, Tunick vit et travaille à Brooklyn, New York. Depuis 1992, il a réalisé plus de soixante-cinq installations éphémères et in situ, aussi bien aux États-Unis, au Canada, qu’ailleurs dans le monde. Ses installations les plus récentes se sont déroulées au Baltic de Newcastle (2005), au MOCA de Cleveland (2004), à l’Institut de Cultura à Barcelone (2003), pour la XXVe Biennale de São Paolo (2002), à SITE Santa Fe au Nouveau-Mexique (2001) et à la Kunsthalle de Vienne (1999).
Récemment, près de 8000 volontaires se sont immobilisés devant son objectif à Barcelone. Rassembler autant de personnes pour une œuvre d’art est déjà une gageure. Mais ce qui frappe et étonne dans cette démarche, c’est le fait que ces «mannequins d’un jour» posent en tenue d’Adam, pas moins que cela. Spencer Tunick, photographe US très en vogue actuellement, arrive ainsi à convaincre des centaines, des milliers de personnes, de s’exhiber sans retenue devant son appareil. Mais pas de n’importe quelle manière: tous en même temps, et tous au même endroit! Il photographie ainsi des «paysages» de corps nus, disposés les uns à coté des autres, souvent d’une manière... sans vie. Allant totalement au-delà du nu académique, jamais vulgaire, souvent dérangeant. Toujours avec un souci graphique évident. Le...