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Journée nationale du patrimoine Le règne du laisser-faire, laisser-aller

Le troisième jeudi du mois de mai est devenu un rituel : le Liban célèbre la journée nationale du patrimoine et comme tous les ans, les musées et les sites archéologiques étaient ouverts, hier, gratuitement au public. Lancée il y a sept ans par Mme Mouna Hraoui, cette manifestation, qui rallie toutes les associations militantes pour la sauvegarde et la mise en valeur des sites historiques et naturels, a pour objectif de mobiliser les Libanais en faveur du patrimoine mais aussi d’inciter les dirigeants à plancher sur ce sujet complexe qui ne peut être géré que par des dispositions administratives, techniques et institutionnelles. Les différents ministres qui se sont succédé, depuis 1992, à la Culture ont tenté de dépoussiérer une législation datant de 1933. Ils ont peaufiné, sans succès, des projets de loi qui dorment toujours dans les tiroirs des législateurs. Ces derniers s’accommodent avec résignation (ou par intérêt) de l’inconscience ou du lucre qui attaque le paysage à coups de bulldozers et de billets verts. À croire que le goût du massacre reste invincible chez nos gouvernants. Le Liban est fragile. Fragilisé à en mourir par l’exploitation sauvage des carrières de pierres, par la dégradation abusive de sa ligne côtière, de l’extension urbaine non contrôlée qui a accéléré la déforestation, biffé les zones agricoles et mis en péril son héritage historique et naturel. Les carrières de l’extraction de la pierre à l’explosif n’ont pas seulement créé des fissures dans la géologie du terrain et causé la perte des nappes phréatiques, ressources précieuses de vie. La ruée sur les gravats, pour ne citer que quelques exemples, a mis en danger des sites comme Ras Chaqaa et la forteresse de Messaylha. Elle a fait perdre la piste de la voie Antique, à Nahr Ibrahim, qui abonde en temples et en monuments consacrés au culte d’Adonis. Elle a fait disparaître, dans le Wadi d’Antélias, l’abri Bergiy (cité dans l’encyclopédie de la Préhistoire), et Ksar Akil, la grotte du premier homme. Dans toutes les régions du Liban, les concasseurs ont laissé derrière eux une terre empoisonnée et des balafres hideuses qui détruisent la mémoire du Liban et condamnent la beauté de sa nature. Remblaiement. Urbanisation sauvage. Privatisation du littoral. Extraction de sable. Constructions illégales. Dépotoirs et bouches d’égouts se déversant dans la mer... La liste des dégâts est longue. Trop longue pour ce petit pays grand comme un mouchoir de poche, où chacun puise à sa convenance pour tracer un paysage anonyme, d’une uniformisation qui lamine les identités. Malgré les déclarations tonitruantes des dirigeants, aucune mesure n’a été prise pour nettoyer le lit des fleuves et reboiser les zones défigurées par les carrières à ciel ouvert. Aucune législation fondée sur une approche équilibrée entre la conservation du patrimoine et l’aménagement urbain n’a été adoptée. Pis encore, aux abords des ruines archéologiques, particulièrement celles de Tyr, des zones déclarées non-edificanti, ou soumises à des conditions de servitude, sont livrées aux affairistes qui, ivres de spéculations, raflent leur mise dans l’instant sans mémoire du passé ni considération pour l’avenir. Il ne restera bientôt plus aux spécialistes qu’à écrire les annales du massacre du patrimoine historique et naturel. Mais aussi celle du règne du laisser-faire, laisser-aller. May MAKAREM
Le troisième jeudi du mois de mai est devenu un rituel : le Liban célèbre la journée nationale du patrimoine et comme tous les ans, les musées et les sites archéologiques étaient ouverts, hier, gratuitement au public. Lancée il y a sept ans par Mme Mouna Hraoui, cette manifestation, qui rallie toutes les associations militantes pour la sauvegarde et la mise en valeur des sites historiques et naturels, a pour objectif de mobiliser les Libanais en faveur du patrimoine mais aussi d’inciter les dirigeants à plancher sur ce sujet complexe qui ne peut être géré que par des dispositions administratives, techniques et institutionnelles.
Les différents ministres qui se sont succédé, depuis 1992, à la Culture ont tenté de dépoussiérer une législation datant de 1933. Ils ont peaufiné, sans succès, des projets de loi qui...