Qu’est-ce qu’il dit en effet, le...
Actualités
Point de vue - La main change, mais pas le mot d’ordre 29 mai, la nouvelle capitulation
Par ISSA Jean, le 19 mai 2005 à 00h00
La soumission. Pour beaucoup de gens, des peuplades entières, ça ne pose aucun problème. Au doigt et à l’œil, gratis, ils obéissent. Disponibles comme des corps inertes, « perinde ac cadaver », disent les jésuites. Et, comme des cadavres ou des marionnettes, incapables de voir, de savoir qui les manipule. Totalement indifférents, pourvu que la confortable routine de la docilité ne soit pas dérangée. Le Syrien parti, le « mot d’ordre » reste. C’est donc un double bonheur, pour le maître du perchoir de se trouver, juste à point, juste à temps, un nouveau maître. Qui non seulement lui épargne les affres d’une liberté d’électron dont il ne saurait que faire. Mais aussi, mais surtout, lui permet de conserver en totalité, et même avec bonus, son duché parlementaire.
Qu’est-ce qu’il dit en effet, le président de la Chambre libanaise, le premier représentant du « peuple souverain » ? Qu’il ne faut pas regarder dans sa direction ou lui en vouloir : le maintien absurde des délais, donc de la dangereuse iniquité 2000 est exigée, imposée, par les Franco-Américains. S’il y avait une quelconque loi sensée dans ce pays, un tel aveu de « responsable élu » ne serait pas passé sans censure. Politique et nationale.
Dire une chose, faire son contraire. Tout le monde y prend goût, ces jours-ci. Feltman ne cesse de répéter qu’il ne s’immisce pas. Mais se démène comme un beau diable, en démarchant chaque jour plusieurs pôles, en multipliant les déclarations fleuves sur la « liberté de décision » des Libanais. Empêchés, à la source, de fixer la date de leur chant. Et d’en écrire la partition, composée en 2000 par le chef d’orchestre syrien.
Une loi que la Rencontre de Kornet Chehwane, précisent ses hérauts, rejette toujours catégoriquement comme inique, frappant la coexistence. Donc éminemment, constitutionnellement, illégale. Tout en acceptant de s’y plier. Pourquoi ? Pour appliquer une logique du « moindre mal. » Sans admettre qu’en pathologie, si les conditions s’y prêtent, il faut éradiquer le virus. Se dresser contre, se battre, le combattre, sans se soumettre. Au nouveau maître venu d’outre-Atlantique.
Myopie
Dont les servants sont les mêmes que ceux de l’ancien. Pour la simple raison qu’étant démographiquement les plus nombreux, il est plus intéressant de miser sur eux. En clair, ce que les Américains veulent, et ils le disent, c’est de calmer le jeu, dans cette région sensible, explosive, du monde, du côté de l’islam. Alors, s’ils peuvent durablement s’arranger avec les mahométans libanais, bonjour les droits des chrétiens. Une politique de l’urgence, fruit du 11 septembre, à courte vue. Puisque même réduits comme une peau de chagrin (« et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là »), les chrétiens libanais sont seuls garants en définitive de la stabilité et de la pérennité de ce pays. Et, au-delà, ils constituent, avec les chrétiens d’Orient, l’armature de tout pont solide que l’Occident, l’Amérique, surtout voudrait jeter en direction d’un monde arabo-musulman qui l’inquiète, qui le perturbe.
Mais, il faut le souligner, la courte vue se remarque principalement du côté de ces mêmes chrétiens derechef attaqués de tous côtés. Encore une fois, suicidaires sans le savoir, ils se divisent gravement. La tendance majeure, comme on le constate dans les faits, est de composer, de ne pas se claquemurer dans un complexe de Massada, de combat perdu d’avance. Ce qui signifie en pratique, et on le voit également sur le terrain, que, les rapports de force étant défavorables, on se soumet en gros à un leadership mahométan. En se donnant bonne conscience, dans la mesure où l’on a l’impression de complaire à l’Américain. Et d’en être protégé.
Cette illusion, quelques pôles la dénoncent. On a vu de la sorte se retirer de Kornet Chehwane les « bannis » de Jezzine, Nadim Salem et Simon Karam. Mais aussi Dory Chamoun et Élie Karamé, ce qui n’est pas peu, politiquement. Sans parler des positions pugnaces de Michel Aoun. Qui, manifestement, ne veut pas que les commandes chrétiennes soient cédées à Joumblatt et Hariri.
Le patriarche Sfeir, pour sa part, s’efforce tout aussi manifestement de colmater les brèches. En tentant de renflouer la Rencontre, de la justifier, alors qu’il y a 13 jours, il la tançait encore vertement pour ses dérives laxistes. Il faut espérer que l’actuel coup de barre patriarcal soit donné dans la bonne direction. Pour exiger, absolument, une nouvelle loi électorale, nonobstant la ridicule question des délais. Sinon, le 29 mai, le camp chrétien aurait signé sa capitulation. Et retournerait dare-dare aux fameuses « capitulations », ces conventions qui du XVIe siècle jusqu’en 1923 faisaient de tout chrétien d’Orient un étranger dans son propre pays.
Jean ISSA
La soumission. Pour beaucoup de gens, des peuplades entières, ça ne pose aucun problème. Au doigt et à l’œil, gratis, ils obéissent. Disponibles comme des corps inertes, « perinde ac cadaver », disent les jésuites. Et, comme des cadavres ou des marionnettes, incapables de voir, de savoir qui les manipule. Totalement indifférents, pourvu que la confortable routine de la docilité ne soit pas dérangée. Le Syrien parti, le « mot d’ordre » reste. C’est donc un double bonheur, pour le maître du perchoir de se trouver, juste à point, juste à temps, un nouveau maître. Qui non seulement lui épargne les affres d’une liberté d’électron dont il ne saurait que faire. Mais aussi, mais surtout, lui permet de conserver en totalité, et même avec bonus, son duché parlementaire.
Qu’est-ce qu’il dit en effet, le...
Qu’est-ce qu’il dit en effet, le...