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Actualités - interview

Le général compte proposer un programme de réformes économiques et politiques Aoun : « Il est encore possible de respecter les échéances électorales »

PARIS, de notre envoyée spéciale, Sibylle RIZK Alors que la date de son retour au Liban (le 7 mai en principe) après quinze années d’exil approche de plus en plus, tout le monde guette les moindres mouvements du général Michel Aoun. Ses rencontres avec des loyalistes à Paris sont interprétées par certains opposants comme un début de revirement, des opposants qui n’hésitent cependant pas à le visiter à leur tour. Bref, tout montre que l’ancien Premier ministre sera l’un des pôles de la vie politique libanaise de l’après-domination syrienne. Une position qu’il compte parfaitement assumer puisqu’il prévoit déjà un véritable programme pour « réformer » le système libanais, d’où l’intérêt de voir le général tenir un discours qui ne tourne plus autour de l’occupation syrienne du Liban. De passage à Paris, L’Orient-Le Jour a été à la rencontre de Michel Aoun, l’occasion d’avoir avec lui une discussion à bâtons rompus pour répondre à plusieurs questions intéressant la crise libanaise actuelle. Pensez-vous qu’il y a encore une possibilité de respecter les échéances pour les élections législatives ? Il ne reste plus beaucoup de temps pour former un gouvernement, voter une loi électorale et convoquer les électeurs, mais c’est possible si la volonté politique existe. Pour ma part, je ne crains pas les conséquences d’un report du scrutin sur le résultat des élections, en revanche, les répercussions pourraient être négatives pour l’économie, qui est déjà en crise. Comment réagissez-vous aux tergiversations du pouvoir ? Il y a six mois, toute la classe politique était sous la férule syrienne, les gants n’ont pas changé en si peu de temps. Ces manœuvres ne sont pas saines. C’est un jeu qui ne prend pas en considération les intérêts du pays. La Syrie est en train de se retirer et les Libanais s’enfoncent dans la politique politicienne, alors que de grandes responsabilités attendent tout le monde. Êtes-vous favorable à des manifestations et à une grève générale pour forcer la main au pouvoir ? Les manifestations populaires doivent être le recours ultime. Nous avons déjà perdu beaucoup de temps. Je préfère d’autres méthodes tout aussi démocratiques, car les manifestations ne changeront pas la majorité parlementaire : il est possible d’obtenir une majorité à la Chambre en obtenant le ralliement de certains « repentis ». Il s’agirait juste d’une alliance pour deux mois, le temps de constituer un gouvernement et d’organiser les élections, mais il n’y a pas consensus à ce sujet au sein de l’opposition. Quelle loi électorale a votre préférence ? Il faut choisir l’un des deux systèmes en vigueur dans le monde, soit un scrutin uninominal majoritaire, soit un scrutin de liste à la proportionnelle. À court terme, je préfère le caza. Chercherez-vous à composer des listes uniques ? Pas nécessairement, cela dépendra du découpage électoral. Si nous sommes contraints à des alliances, elles seront artificielles, car nous n’avons pas de programme commun. Le Liban est encore une démocratie primitive, de ce point de vue. Vous avez annoncé votre retour pour le 7 mai, avez-vous obtenu des garanties de la part du pouvoir ? Je ne crois pas qu’il soit dans l’intérêt du pouvoir d’aboutir à une situation de confrontation et ce n’est pas davantage mon souhait. Mais j’insiste sur la date de mon retour. Il faudra que les obstacles soient levés d’ici là. Et s’ils ne le sont pas ? Je suis optimiste. Pratiquement, savez-vous où vous allez résider ? J’ai trois ou quatre propositions, je me déciderai à la dernière minute. Que répondez-vous à ceux qui vous accusent d’entente avec le pouvoir ? Je crois être à l’abri des accusations, surtout de celles qui émanent de gens récemment passés à l’opposition. Quelle différence y a-t-il entre certains loyalistes et certains opposants si ce n’est leur position concernant la prorogation du président Lahoud ? De toute façon, je n’ai besoin de personne pour revenir au Liban, je compte sur mes propres forces. Avez-vous des ambitions présidentielles ? Libérer le pays est plus important que de le présider. C’est mission accomplie. Mon ambition est de transformer le Courant patriotique libre en parti. Nous voulons proposer un programme de réformes économiques et politiques, et lutter contre la corruption qui est devenue partie intégrante du système libanais. Nous avons aussi le projet de créer une société laïque. La laïcité doit devenir une revendication populaire. Cela prendra le temps qu’il faudra. Quand le retrait syrien sera achevé, aurez-vous encore un contentieux avec Damas ? Craignez-vous que la Syrie cherche à maintenir ses réseaux de renseignements au Liban ? Non, sauf sur la question des détenus libanais en Syrie. Je ne crois pas qu’il soit dans l’intérêt de Damas de chercher à revenir au Liban. Car tant qu’elle l’occupe, le Liban est le ventre mou de la Syrie. Si elle cherche à y provoquer des troubles, le feu s’étendra jusque chez elle. Le Liban, lui, est immunisé. Si les Syriens se trompent, cette fois ce sera fatal. Que répondez-vous à ceux qui accusent certaines parties libanaises de faire le jeu des États-Unis ? C’est de la pure imagination de la part de gens qui cherchent des justifications à leur position politique prosyrienne. Les intérêts sécuritaires syriens seront saufs tant que ceux du Liban seront respectés. Les Américains n’ont pas besoin du Liban s’ils veulent s’en prendre à la Syrie. Le Hezbollah souhaite garder ses armes au nom de la défense contre Israël, qu’y répondez-vous ? La responsabilité de la défense du Liban incombe à l’État libanais et pas à une partie de la population. Tous les Libanais sont exposés aux mêmes menaces. Le Hezbollah rendra ses armes lorsqu’il en sera convaincu, il ne s’agit pas de le forcer, mais de le persuader que son intégration politique est sa meilleure protection. Le dialogue se poursuivra, discrètement, à l’abri des médias.

PARIS, de notre envoyée spéciale, Sibylle RIZK
Alors que la date de son retour au Liban (le 7 mai en principe) après quinze années d’exil approche de plus en plus, tout le monde guette les moindres mouvements du général Michel Aoun. Ses rencontres avec des loyalistes à Paris sont interprétées par certains opposants comme un début de revirement, des opposants qui n’hésitent cependant pas à le visiter à leur tour. Bref, tout montre que l’ancien Premier ministre sera l’un des pôles de la vie politique libanaise de l’après-domination syrienne. Une position qu’il compte parfaitement assumer puisqu’il prévoit déjà un véritable programme pour « réformer » le système libanais, d’où l’intérêt de voir le général tenir un discours qui ne tourne plus autour de l’occupation syrienne du Liban.
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