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Actualités - REPORTAGE

Reportage - Réduits à l’état de squatters, des Irakiens demandent un logement décent

Réduits à l’état de squatters par l’envolée des loyers qui a suivi la chute du régime de Saddam Hussein, des centaines d’Irakiens menacés d’expulsion manifestent régulièrement dans Bagdad pour demander un logement décent. « Nous voulons des maisons, pas des compensations », « Nous demandons la pitié, ne soyez pas tyranniques comme Saddam Hussein », lisait-on mardi sur les banderoles tenues à bout de bras. Ils étaient plusieurs centaines, accompagnés d’enfants, devant l’une des entrées de la zone verte, le secteur ultraprotégé du centre de la capitale abritant le commandement de la Force multinationale et les bureaux du gouvernement irakien. Parmi eux se trouvait le représentant de 350 familles occupant une prison désaffectée du quartier al-Baladiyah, dans l’est de Bagdad. « Cela fait deux ans que nous vivons paisiblement dans ce complexe, et hier une force mixte irakienne et américaine est venue nous demander de partir d’ici à lundi prochain », explique Mohammed Shinesheil. « Ils ont promis de nous donner entre 500 et 1 000 dollars par famille en échange, dit-il, mais nous demandons au gouvernement de ne pas nous abandonner, nous sommes presque 1 500, dont une majorité d’enfants. » À l’époque de Saddam Hussein, une loi interdisait d’augmenter les loyers pour lutter contre l’inflation galopante. Et le propriétaire qui insistait pour obtenir plus s’exposait à de graves ennuis. Mais avec la chute du régime, les propriétaires ont chassé les locataires récalcitrants. Ces derniers se sont alors rabattus sur des bâtiments officiels pillés après l’invasion américano-britannique en mars 2003 ou endommagés durant la guerre. C’est le cas de Mohammed Yahya, 43 ans, unijambiste et squatter. « Avant la guerre, j’occupais un petit appartement avec ma femme et mes deux enfants, que je louais 25 000 dinars (à peu près dix dollars à l’époque) ». « Dès la chute du régime, le propriétaire m’en a demandé 100 000, mais je vends des cigarettes dans la rue et où trouver l’argent quand je gagne seulement 2 000 à 3 000 dinars par jour ? J’ai refusé de payer et il m’a jeté à la rue », raconte-t-il. Il occupe aujourd’hui une pièce dans l’ex-quartier général des forces aériennes. La seule décoration des murs, noirs de suie, est le poster d’un dignitaire religieux. Pour tout mobilier un lit, une petite télévision et deux chaises. Dans un coin, les toilettes sont cachées par un rideau et une cloison de fortune. Dans l’autre coin, la cuisine se résume à un réchaud à gaz. Le problème est que le gouvernement cherche désormais à réhabiliter de tels bâtiments, et donc à en chasser les occupants. « L’occupation de ces immeubles est un vrai problème », plaide le ministre du Logement dans le gouvernement sortant Omar al-Damloudji. « Cela ne concerne pas seulement des milliers de familles, mais aussi des partis politiques et des associations imaginaires, qui occupent des endroits sans aucune autorisation. » Selon un rapport de l’Onu et de la Banque mondiale datant de 2003, l’Irak connaissait déjà avant la guerre, et son cortège de déplacés, un déficit de logement estimé entre 1 et 1,5 million d’unités. Le responsable rejette « la faute sur l’ex-régime qui s’est occupé d’autre chose que de loger la population », et affirme que les nouvelles autorités « ont lancé l’an dernier un programme de construction de 35 000 appartements dans tout le pays ». Un chiffre qui laisse indifférent Ali Naïm, 30 ans, membre des forces irakiennes. « Mon salaire est de 180 000 dinars par mois (environ 120 dollars) et je devrai choisir entre louer un appartement ou nourrir ma femme et mes enfants. » Un autre squatter, Jabar Kadoum, policier, trouve « bizarre qu’après les élections (du 30 janvier) la première chose que décide le gouvernement est de chasser les pauvres dans la rue, alors que sa tâche est d’améliorer la situation de nos familles ». Kamal TAHA (AFP)
Réduits à l’état de squatters par l’envolée des loyers qui a suivi la chute du régime de Saddam Hussein, des centaines d’Irakiens menacés d’expulsion manifestent régulièrement dans Bagdad pour demander un logement décent.
« Nous voulons des maisons, pas des compensations », « Nous demandons la pitié, ne soyez pas tyranniques comme Saddam Hussein », lisait-on mardi sur les banderoles tenues à bout de bras.
Ils étaient plusieurs centaines, accompagnés d’enfants, devant l’une des entrées de la zone verte, le secteur ultraprotégé du centre de la capitale abritant le commandement de la Force multinationale et les bureaux du gouvernement irakien.
Parmi eux se trouvait le représentant de 350 familles occupant une prison désaffectée du quartier al-Baladiyah, dans l’est de Bagdad.
« Cela fait deux ans que...