Départements souffrant d’une pléthore de fonctionnaires ou, au contraire, d’un manque cruel d’effectifs, incompétence, gabegie...
Actualités - OPINION
Les rapports des organismes de contrôle sont toujours ignorés Réforme administrative : on piétine toujours (photo)
Par ABOU RIZK Tilda, le 31 décembre 2004 à 00h00
Au Liban, la réforme de l’Administration fait penser, en cette fin d’année, au père Noël : on voudrait bien y croire, mais on sait qu’il n’existe pas. À l’instar des années précédentes, 2004 a été placée, tout comme le mandat Karamé qui a débuté en octobre, sous le signe de la réforme. Beaucoup de promesses ont été formulées et l’État a même multiplié les concertations, les études, les accords de coopération, les projets de modernisation. Mais un an plus tard, à l’heure où les officiels présentent la mise en place du médiateur de la République (l’ombudsman) comme une véritable révolution en matière de réforme, le bilan reste toujours tristement négatif.
Départements souffrant d’une pléthore de fonctionnaires ou, au contraire, d’un manque cruel d’effectifs, incompétence, gabegie et lenteur, pour ne citer que cela, restent les traits marquants d’une Administration qui n’arrive pas à se moderniser, en dépit des quelques efforts déployés en ce sens. Sauf que c’est là où le bât blesse : les efforts fournis sont tellement disparates et anarchiques qu’ils ne permettent pas une sérieuse transformation de l’Administration. Ils sont d’autant plus inefficaces qu’ils ne portent pas sur les facteurs à l’origine de la lourdeur et du pourrissement administratifs.
Une politique structurée de réforme attend toujours le bon vouloir des autorités qui ne se décident pas à la mettre en place. Et pourtant, les occasions de lancer sérieusement un processus de réforme n’ont pas manqué. L’État les a toutes ratées. L’année 2004 a officiellement représenté la disparition de l’espoir généré par Paris II.
En juillet dernier, l’Inspection centrale a fait paraître un rapport accablant, énumérant dans le détail un nombre affolant d’irrégularités administratives. Le document aurait pu constituer pour les autorités une base solide pour initier un processus de réforme. Mais pour toute réaction, le gouvernement, que présidait à l’époque M. Rafic Hariri, s’était contenté de réclamer une enquête, sachant que le rapport de l’Inspection était lui-même le résultat d’une enquête. L’affaire n’a plus eu de suites.
Si l’État avait la moindre volonté d’engager une réforme, il aurait au moins commencé par restructurer le ministère de l’Éducation nationale, une véritable caverne d’Ali Baba, avec ses fonctionnaires surnuméraires, où l’on compte, rien que dans le cycle secondaire, un enseignant pour chaque 9 élèves, assurant entre 5 et 14 heures de cours par semaine au lieu des 20 heures requises, selon le rapport de l’Inspection centrale.
Le cabinet Hariri aurait pu être tenu pour responsable de ce laisser-aller si l’équipe Karamé n’avait pas enfoncé le clou en décidant, juste après son entrée en fonction, de payer les arriérés dus aux enseignants contractuels, sans songer parallèlement à régler les problèmes de l’anarchie et du gaspillage au sein du ministère de l’Éducation nationale.
Comble de l’ironie, le Premier ministre, Omar Karamé, qui a fait de la réforme son cheval de bataille pour les quelques mois à venir, a demandé aux membres de son équipe de dépister les irrégularités financières et administratives dans leurs départements, alors qu’il aurait suffi pour cela de revenir aux rapports périodiques des organismes de contrôle.
Le gouvernement aurait tout aussi bien pu compléter les actions susceptibles de paver la voie à une éventuelle réforme. Le recensement des fonctionnaires surnuméraires, que le ministère du Développement administratif avait tenté d’entreprendre, en est une. Sur les 56 départements étatiques qui avaient été sollicités à cette fin par le ministère, seuls 35 ont daigné répondre. L’Éducation nationale, comme on peut s’en douter, n’en faisait pas partie.
Le problème est certes politique, mais une importante part de responsabilité incombe aux autorités administratives, à qui les lois en vigueur donnent suffisamment de pouvoirs pour qu’elles puissent assurer une gestion optimale des départements qu’elles dirigent ou qu’elles contrôlent. La Sûreté générale, réorganisée sur initiative de son directeur, constitue un bel exemple de réforme réussie grâce à une initiative privée au sein même de l’Administration. De nombreux Libanais ayant eu à entreprendre des formalités auprès de ce département attestent de ce succès.
L’Administration libanaise, de par sa structure, porte en elle les rouages de sa propre réforme, qui peuvent être mis en fonctionnement sans attendre le feu vert politique. Elle n’a besoin, pour cela, que de deux instruments : l’esprit d’initiative et le courage.
Tilda Abou Rizk
Au Liban, la réforme de l’Administration fait penser, en cette fin d’année, au père Noël : on voudrait bien y croire, mais on sait qu’il n’existe pas. À l’instar des années précédentes, 2004 a été placée, tout comme le mandat Karamé qui a débuté en octobre, sous le signe de la réforme. Beaucoup de promesses ont été formulées et l’État a même multiplié les concertations, les études, les accords de coopération, les projets de modernisation. Mais un an plus tard, à l’heure où les officiels présentent la mise en place du médiateur de la République (l’ombudsman) comme une véritable révolution en matière de réforme, le bilan reste toujours tristement négatif.
Départements souffrant d’une pléthore de fonctionnaires ou, au contraire, d’un manque cruel d’effectifs, incompétence, gabegie...
Départements souffrant d’une pléthore de fonctionnaires ou, au contraire, d’un manque cruel d’effectifs, incompétence, gabegie...