Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Éducation - Des pressions auraient été exercées sur certains établissements Tollé après la décision de fermeture des écoles publiques le vendredi

La décision prise il y a quelques mois par le ministre des Affaires sociales, Assaad Hardane, permettant aux commerçants de Saïda d’ouvrir le dimanche et de fermer le vendredi, en avait déjà irrité plus d’un. Depuis quelques jours, c’est la décision du ministre de l’Éducation, Samir Jisr, fixant les jours de congés hebdomadaires dans les écoles publiques à vendredi et dimanche, qui ne cesse de susciter des remous. D’autant que cette décision s’est accompagnée, la semaine dernière, de « pressions » et « d’appels téléphoniques » de la part du responsable de la section de Beyrouth au ministère de l’Éducation, Mohieddine Kechli, proche du mufti de la République, cheikh Mohammed Rachid Kabbani, pour inciter les écoles d’Achrafieh à appliquer ce système. À première vue, tout cela paraît bien dangereux, puisqu’il ouvre la boîte de Pandore confessionnelle et sectaire, loin du modus vivendi consensuel libanais. Cependant, il ne faut pas passer trop vite aux conclusions et réagir instinctivement, surtout quand on a affaire à un phénomène qui pourrait conduire, s’il n’est pas rationalisé, nuancé, clarifié, à certains dérapages. Mais quelle est donc cette nouvelle affaire de congés dans les établissements scolaires publics qui est en passe de donner lieu à une polémique sur fond communautaire ? Pour démystifier l’affaire, il faut d’abord rappeler certaines données de base : avant la guerre, les écoles publiques fermaient le vendredi et le dimanche, dans le respect des traditions religieuses musulmanes et chrétiennes, c’est-à-dire dans l’esprit du pacte de convivialité. Puis, avec les événements de 1975, la pratique qui s’est instaurée de facto après le morcellement du territoire était la suivante : les écoles publiques (quand elles pouvaient ouvrir !) de l’Est fermaient le samedi et le dimanche, et celles de l’Ouest le vendredi et le dimanche. Et cette situation a été vécue depuis sans problèmes. Jusqu’à ce que le mufti de la République appelle, à plusieurs reprises, le ministre de l’Éducation, durant les derniers mois, à faire de sorte que le vendredi soit considéré comme jour de congé dans les établissements scolaires publics. Au terme de plusieurs réunions avec le mufti, le ministre Jisr a finalement pris la décision de retourner au système anté-75. Mais il se défend d’avoir obligé qui que ce soit d’agir dans un sens précis. Et pour cause : il a dans un premier temps invité la direction des établissements concernés, de concert avec les parents des élèves et les instituteurs, à adresser une lettre au responsable de la section régionale à la direction du ministère de l’Éducation, pour fixer avec lui le système de congés des écoles publiques. Avant d’introduire également les hommes de religion dans les cercles de décision. Ainsi, a-t-il mis au point un recours devant le ministère permettant aux établissements de décider, à leur convenance, de leur propre rythme de congés : vendredi-dimanche ou samedi-dimanche. Des pressions Partant, le ministre Jisr a démenti hier, à L’Orient-Le Jour, l’existence de pressions exercées sur qui que ce soit. Pourtant, plusieurs responsables d’établissements publics ont indiqué le contraire, affirmant que certaines écoles préscolaires, primaires et complémentaires d’Achrafieh (pour ne parler que de cette région, mais le même concept peut prévaloir partout) avaient reçu un appel téléphonique la semaine dernière les sommant d’appliquer la décision du ministère de la Justice. Ce qui n’a pas été le cas des écoles secondaires. Explications : si les écoles préscolaires, primaires et complémentaires dépendent de M. Mohieddine Kichli, les écoles secondaires dépendent d’une autre autorité, en l’occurrence du directeur général du secondaire, Waël Tannir. En conséquence de quoi les écoles secondaires n’ont pas appliqué la décision du ministre Jisr. Certaines d’entre elles ont déjà adressé la lettre requise au ministère pour appliquer le système du samedi-dimanche. Du côté des établissements préscolaires, primaires et complémentaires, qui relèvent de l’autorité de M. Kechli, certains ont défié le mot d’ordre du fonctionnaire, refusant de fermer leurs portes vendredi. D’autres ont respecté le mot d’ordre, fermant leurs portes vendredi dernier, sans pour autant ouvrir samedi. Un compromis de transition en attendant d’adresser la fameuse note contestataire au ministre de l’Éducation, et de retrouver le système du samedi-dimanche. Mais certains établissements d’Achrafieh, qui accueillent un nombre important d’étudiants chrétiens et musulmans, se sont pliés aux injonctions et ont fermé leurs portes vendredi pour les ouvrir samedi. Explications de certains professeurs : ne se laisse faire que celui qui cède à la pression. La question se pose de savoir ce qu’ils feront dans les jours qui viennent: décideront-ils de revenir au système de facto de la guerre, ou adopteront-ils la décision Jisr? Toujours est-il que les pressions exercées sur certains établissements ont quelque peu entamé la volonté de M. Jisr de respecter les libertés de chacun. Réaction d’Antoine Najm, qui a longtemps été dans l’enseignement : « Ce qui se produit n’est pas normal, le secrétariat général des écoles catholiques devrait réagir pour empêcher ce processus de prendre son cours. » La Ligue des professeurs des écoles publiques Dans un communiqué publié mardi soir, la Ligue des professeurs du secondaire a réagi au système imposé par la décision Jisr en rejetant le fondement même – communautaire – de la logique employée par le ministre de l’Éducation pour justifier la fermeture des écoles publiques le vendredi. À L’Orient-Le Jour, Ahmed Sanjakdar, président de la ligue, regrette que le débat ait pris une tournure communautaire, avec la participation des autorités religieuses, alors qu’il devrait rester cantonné au secteur éducatif. Selon lui, indépendamment du facteur communautaire, il existe des raisons objectives et logiques qui voudraient que le week-end demeure un congé, quelle que soit la région concernée. Sinon, comment les jeunes Beyrouthins, originaires du Sud par exemple, pourront-ils aller passer du temps dans leurs villages d’origine ? En d’autres termes, c’est dans une optique nationale qu’il faut résoudre la question, et le ministre Jisr devrait « annuler immédiatement sa décision, en attendant que les autorités gouvernementales prennent les mesures appropriées ». Un point de vue à méditer, d’autant que le secteur éducatif public est déjà dans un piètre état. Il n’a vraiment pas besoin qu’on l’achève. Michel HAJJI GEORGIOU
La décision prise il y a quelques mois par le ministre des Affaires sociales, Assaad Hardane, permettant aux commerçants de Saïda d’ouvrir le dimanche et de fermer le vendredi, en avait déjà irrité plus d’un. Depuis quelques jours, c’est la décision du ministre de l’Éducation, Samir Jisr, fixant les jours de congés hebdomadaires dans les écoles publiques à vendredi et dimanche, qui ne cesse de susciter des remous. D’autant que cette décision s’est accompagnée, la semaine dernière, de « pressions » et « d’appels téléphoniques » de la part du responsable de la section de Beyrouth au ministère de l’Éducation, Mohieddine Kechli, proche du mufti de la République, cheikh Mohammed Rachid Kabbani, pour inciter les écoles d’Achrafieh à appliquer ce système.
À première vue, tout cela paraît bien...