Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Municipalités - La décentralisation, au centre des débats du Biel Murr aux élus municipaux : « Prenez l’argent par la force, nous vous soutiendrons »

Très attendu notamment par les élus locaux invités chacun à titre individuel, le premier congrès des conseils municipaux nouvellement élus s’est transformé hier en un véritable plébiscite en faveur du chef de l’État. D’ailleurs, les organisateurs n’ont rien fait pour le cacher : dès l’entrée de la salle des congrès au Biel, le slogan affiché sur une immense banderole était très explicite à cet égard : « Les élections municipales, une victoire pour la ligne politique du président de la République », pouvait-on lire en grands caractères sur le portail d’entrée. C’est un message de soutien politique au général Lahoud qu’a voulu communiquer le ministre de l’Intérieur et des Municipalités, Élias Murr, augurant ainsi une pseudo-campagne électorale sur le thème sacro-saint de la décentralisation. M. Murr aura en tout cas réussi à réunir plusieurs milliers d’élus locaux dans une immense salle tapissée de photos du président. Conviés sur base d’un formulaire qu’ils devaient remplir et remettre sur place, au ministère, les membres des conseils et les moukhtars ont été nombreux à répondre à cet appel, ce qui n’a fait que rajouter aux problèmes logistiques et sécuritaires déjà assez compliqués quand il s’agit du déplacement des responsables de l’État. Étaient notamment présents, outre le président qui a inauguré l’événement, l’ancien chef de l’Assemblée, Hussein Husseini, les représentants du mufti de la République, les ministres de la Justice, Bahige Tabbarah, de l’Information, Michel Samaha, d’État, Abdel Rahim Mrad, et Assem Kanso, de l’Industrie, Élias Skaff, de l’Agriculture, Ali Hassan Khalil, de la Défense, Mahmoud Hammoud, ainsi que cheikh Ahmed el-Baba, représentant le mufti de la République et le cheikh Najib Massoud, représentant le cheikh Akl druze. À cette occasion, le chef de l’État a affirmé dans un communiqué publié par le bureau de presse de Baabda que « cette initiative constitue le premier pas vers l’application de la décentralisation administrative qui vise à libérer les pouvoirs locaux des obstacles engendrés par la lourdeur administrative ». Évoquant le thème du congrès, à savoir « la partenariat et la complémentarité entre l’Administration centrale et l’Administration locale », M. Lahoud a mis l’accent sur l’importance d’une coopération désormais incontournable, qui « préludera à une nouvelle ère », a encore précisé le communiqué. Dans une intervention qui semblait directement inspirée des œuvres d’Alexis de Tocqueville, le défenseur par excellence de la démocratie de proximité, M. Murr a pris à son tour la parole pour vanter les bienfaits de la décentralisation administrative et de la liberté de décision des élus locaux, « qui ne sauraient être soumis à qui que soit », a-t-il martelé. « Nous refusons toute atteinte aux prérogatives des municipalités. Ni le pouvoir central, ni le ministère de l’Intérieur, ni celui des Finances, personne, absolument personne n’a le droit d’hypothéquer vos décisions », a insisté M. Murr. Le ministre a en outre encouragé l’indépendance financière et politique des conseils et pris fait et cause pour ceux d’entre eux qui sont en mal de financement, indiquant haut et fort que « personne n’a le droit de disposer de l’argent des municipalités ». Sans jamais le nommer, M. Murr s’en prendra plus d’une fois au ministre des Finances, Fouad Siniora, en dénonçant « la mainmise sur l’argent des municipalités ». Il ira même plus loin en incitant les élus à « se diriger vers l’endroit où se trouve la Caisse » (municipale indépendante) et à prendre « l’argent par la force. Nous vous soutiendrons, ce faisant », a promis M. Murr. Poussant jusqu’au bout la logique démocratique, le ministre a fait un panégyrique de la décentralisation et s’est prononcé en faveur d’une législation moderne et égalitaire. « Nous voulons une loi pour les municipalités et non pas une loi imposée aux municipalités. Et nous refusons toute loi confectionnée à la taille d’une ville ou d’un groupe au sein de cette ville », a-t-il encore dit, dans une allusion on ne peut plus claire au Premier ministre et à ses alliés au sein du conseil municipal de Beyrouth. « Nous refusons également toute loi qui défavorise les uns pour bénéficier aux autres », a encore souligné M. Murr. Dans un message adressé à ses adversaires politiques, l’intervenant a rappelé les principaux enjeux du dernier scrutin « qu’il a qualifié de haut niveau démocratique qui a traduit fidèlement les intentions des électeurs », des élections qui auront servi entre autres « à déterminer le poids politique de chacun, et à dissiper bien des illusions », a-t-il ajouté dans un symbolisme clair envers le scrutin du Metn – qui a été défavorable à l’opposition chrétienne – et celui de Saïda qui a marqué l’échec du Premier ministre. Le président du conseil municipal de Beyrouth, Abdel Monehm Ariss, interviendra à son tour pour dénoncer indirectement « la tutelle » exercée par l’État sur les élus locaux, et « l’occultation » qui a été faite des accords de Taëf. « À tous ceux qui ont eu crainte, par le passé, de voir la décentralisation conduire à des divisions politiques, nous leur rappelons que Taëf a déjà tranché cette question en confinant la décentralisation dans les domaines administratif et développemental », a indiqué M. Ariss, espérant qu’une loi moderne sur cette question puisse bientôt voir le jour dans un proche avenir. Évoquant le projet d’amendement de la loi sur les municipalités, le président de l’Union des municipalités du Kesrouan, Nohad Naufal, a affirmé que ce projet n’a pas rempli son objectif, « certains de ses articles ayant dévié vers une centralisation aiguë ». Pour M. Naufal, la transmission de ce texte aux commissions parlementaires n’a pas arrangé les choses, puisque les modifications apportées par les députés ont porté atteinte à son objectif ultime. Abondant dans le sens du ministre Murr en soulignant que personne ne peut minimiser l’importance de l’expérience démocratique des municipales, le président du conseil municipal de Saïda, Abdel Rahman el-Bizri, qui n’était pas prévu initialement au programme, a pris la parole pour remercier le ministre de l’Intérieur d’avoir assuré le climat de liberté nécessaire pour la tenue de ce scrutin. Plusieurs autres responsables locaux et représentants d’organismes internationaux ont également défilé à la tribune pour discuter des problèmes relatifs au gouvernement local. Jeanine JALKH Le « pèlerinage » du Biel Coincés dans une longue file qui s’est formée dès la Quarantaine, les citoyens, dont plusieurs élus qui n’ont jamais pu parvenir à destination, ont passé trois bonnes heures à leur volant, sous un soleil cuisant, avant de comprendre qu’il ne s’agit pas du dernier passage du Premier ministre irakien, mais tout simplement d’un congrès sur les municipalités (mal) organisé par le ministère de l’Intérieur. Le secteur du Normandie était quadrillé par les forces de l’ordre, pris d’une paranoïa à la mesure de « l’ampleur » de l’événement. Tous les parkings environnants ont été fermés au public pour l’occasion, et la marche à pied s’imposait, notamment pour les journalistes qui, comme il se doit dans notre République « évoluée », ont été bousculés et insultés par les agents de l’ordre, avant d’aller remplir leur mission. Délivrés de la chaleur de l’extérieur et heureux de se retrouver enfin dans une ambiance climatisée, les participants n’ont pas pu profiter pendant longtemps de ce luxe. Dès que le ministre de l’Intérieur, qui était parmi les premiers à parler, eut fini son intervention, les organisateurs ont coupé l’air conditionné, laissant suinter les quelques personnes encore présentes. Dernière faille à relever au niveau de l’organisation de cet événement exceptionnel, le discours des intervenants étrangers que les organisateurs n’ont même pas pris la peine de traduire, estimant sans doute suffisant le nombre de polyglottes présents dans la salle.

Très attendu notamment par les élus locaux invités chacun à titre individuel, le premier congrès des conseils municipaux nouvellement élus s’est transformé hier en un véritable plébiscite en faveur du chef de l’État. D’ailleurs, les organisateurs n’ont rien fait pour le cacher : dès l’entrée de la salle des congrès au Biel, le slogan affiché sur une immense banderole...