C’est à partir du 2 juillet et sous le thème de «juin» que Nadim Asfar a choisi d’exposer ses photographies à la galerie Fadi Mogabgab. Juin comme ce mois, ce début de saison où tout commence, où tout s’ouvre à de nouvelles couleurs laissant s’épanouir une nouvelle vie.
On pourrait presque effeuiller la quarantaine de photographies de Nadim Asfar et aimer, un peu, beaucoup, passionnément les jasmins, les feuilles de caoutchouc, les roses et les gardénias. Apprécier également les noirs, les blancs, les nuances de chacune de ces deux couleurs, le cadrage, tout ce qui se voit, et le reste. Ce que l’on imagine puis ce que l’on sent. Les impressions, les souvenirs, les histoires, peut-être, qui viennent se glisser presque en douceur mais de manière évidente entre le spectateur et l’image. «Juin est une référence à tout ce qui est asiatique et dont j’ai été très imprégné. C’est aussi, un peu, ce que l’on voit en juin. De la lumière et de la transparence. Une sensualité, la sève. Le système des saisons est un système qui me correspond. C’est normal de vivre en fonction de ça.» Lumière et transparence sont en effet clairs dans le travail de cet artiste, cru 2001 de l’Alba, diplômé en audiovisuel et qui s’est fait connaître grâce au court-métrage Trouble, qui a obtenu cette même année le prix du meilleur court-métrage au Festival Européen. L’année suivante, il remporte le prix du jury au Festival Docudays pour son documentaire intitulé Dans Marie il y a aimer. Le réalisateur, photographe dès l’âge de 15 ans, a par ailleurs présenté ses premières photographies aux Estivales de Deir el- Qamar, en 1998, «sur le thème de l’identité». Enfin, last but not least, Nadim a exposé en 2003 au Salon d’automne à Paris un cliché représentant un jasmin – son thème de prédilection – pour lequel il a raflé le prix d’honneur du jeune artiste plasticien. Une fleur encore présente dans son exposition. «Les jasmins m’ont toujours fasciné, j’en saisissais un, puis un groupe. C’était à chaque fois différent et j’avais à nouveau envie de les refaire.»
Un bouquet de photos
«Je ne fais que reproduire la réalité. J’ai l’impression que tout est très réel. Après, c’est le regard de chacun.» Un regard étonné, fasciné ou séduit par ces fleurs, ces tiges ou ces feuilles qui deviennent, en un clin d’œil et grâce à la magie de Nadim, une danse, un envol d’oiseaux, un couple, un paysage ou une position. Drôles de photos qui n’en sont presque pas, puisque l’artiste n’utilise pas de caméra pour ses prises de vues, mais «impressionne» directement l’objet posé, mis en place, sur le support. À la manière du grand Man Ray qui lança la méthode. «Lorsque je venais d’installer mon laboratoire, c’était comme un jeu. En cadrant une photo et en montrant ce que l’on veut montrer, c’est comme s’il n’y avait rien à côté. Je suis allé à l’extrême du concept. C’est une façon d’abstraire, c’est le noir. Ce que je ne veux pas montrer et qui n’est pas l’essentiel.»
Car l’essentiel est là, au bout du regard. Juste en face. Une composition parfaite, gaie ou plus triste, suivant l’humeur, «étudiée mais simple. Rapide surtout. C’est un travail très instinctif». On peut même y voir un paysage, digne des fascinants tableaux japonais. «Quand j’ai visité le Japon, en 1998, j’ai compris mon travail, poursuit l’artiste, j’ai reconnu ce que je sentais. Dans leur travail, leur façon de voir. Mon travail ressemble à leur calligraphie. Pour les Japonais, ce n’est pas la performance qui compte, mais l’essentiel. Les calligraphes travaillent sur le souvenir et pas sur l’action immédiate qui consiste à reproduire.» Souvenir d’un instant, désir d’un autre. Un peu, beaucoup, passionnément. «Derrière chacune de mes photos se cachent de petits événements, un moment ou le souvenir d’un moment.» L’accrochage des photos – en 30 x 40, 50 x 60 ou 10 x 10cm – prises sur fond noir aura lieu, sur fond noir également. Une surprise que réserve Fadi Mogabgab, qui prend enfin le chemin des vernissages qu’il a toujours voulu éviter. Il s’explique: «De temps en temps, il est bon de franchir le pas et rendre l’espace intérieur accessible à tout le monde. Outre le fait de concevoir des vitrines que les gens regardent de l’extérieur, c’est important aussi qu’ils entrent à l’intérieur et ressentent autre chose, une nouvelle sensation. L’énergie est différente. Être submergé d’œuvres laisse des traces sur le corps. Le rapport est plus intime.» Les deux messieurs se sont compris. Le travail de Nadim Asfar, fascinant, est mis en scène avec beaucoup de subtilité et même un brin d’humour par un Fadi Mogabgab inspiré, comme toujours.
Carla HENOUD
*Jusqu’au 15 août, du mardi au vendredi, de 16h à 19h.
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