Le bouche-à-oreille, très développé dans ce pays, a fait un travail remarquable pour l’événement de taille qui s’est déroulé hier à l’Assembly Hall. En effet, la «masterclass» de Yo-Yo Ma, l’un des plus grands violoncellistes des XXe et XXIe siècles, à trois élèves du Conservatoire national a été passionnément suivie par près de 300 personnes. Avec le concours de...
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MUSIQUE - Le violoncelliste a donné une «masterclass» à trois élèves du Conservatoire national de musique Une conversation avec Yo-Yo Ma
Par GEMAYEL Diala, le 29 juin 2004 à 00h00
Le bouche-à-oreille, très développé dans ce pays, a fait un travail remarquable pour l’événement de taille qui s’est déroulé hier à l’Assembly Hall. En effet, la «masterclass» de Yo-Yo Ma, l’un des plus grands violoncellistes des XXe et XXIe siècles, à trois élèves du Conservatoire national a été passionnément suivie par près de 300 personnes. Avec le concours de l’ambassade des États-Unis au Liban et de l’AUB, cet immense musicien a gratifié tant ses auditeurs que ses jeunes élèves de plus de deux heures de bonheur pur avec, au programme, Haydn et Bach pour le plus jeune étudiant, Sari Khalifé; puis Haydn et Popper pour Jana Sémaan; enfin, Dvorak et Bach pour Nassib Ahmadieh.
Dès le début de son cours magistral, Yo-Yo Ma, en bras de chemise, ses éternelles lunettes rondes sur le visage, donne les trois mots d’ordre de sa méthode de travail: «Contenu, communication, réception.» Et pour transmettre ce processus aux jeunes violoncellistes, extrêmement intimidés, surtout le plus jeune d’entre eux, Yo-Yo Ma sort sa botte secrète: au lieu de faire des remarques prêtes à l’emploi et à appliquer telles quelles, il pose des questions. À un Sari Khalifé médusé et tétanisé, qu’il a longuement applaudi et félicité au préalable pour son interprétation, il demande s’il «aime l’eau gazeuse», ceci pour lui apprendre à jouer légèrement et sans sensation de début ou de fin dans l’œuvre.
Il l’encourage ensuite à jouer un court extrait en le regardant depuis la salle, «pour que tu sortes de ton cercle». Mouvements, mesures, rythme, mélodie: les grands aspects de l’interprétation sont abordés, et à aucun moment le tout jeune homme s’est senti jugé ou écrasé par la virtuosité de son professeur . La «méthode Ma» est miraculeuse et chacun constate combien Sari Khalifé a évolué en moins de 45 minutes.
Rester avec ses idées
musicales
Dans cette «conversation», comme il a lui-même défini la «masterclass», Yo-Yo Ma apprend aux jeunes violoncellistes à tenir compte de la salle, «qui est aussi un instrument». Pendant toute la durée de sa leçon, il arpente les quatre coins de l’espace sans jamais perdre de vue l’interprète sur scène, avant de subitement s’accroupir pour observer attentivement le jeu de mains. Pour expliquer à Jana Sémaan l’articulation des notes et l’expansion des idées dans l’œuvre interprétée, Yo-Yo Ma utilisera les comparaisons d’un frère et d’une sœur dans leur ordre d’arrivée dans une famille, et une discussion avec une amie.
Fredonnant, esquissant des pas de danse, battant la mesure, communiquant avec l’auditoire et surtout jouant de concert avec son élève, Yo-Yo Ma met en application sa conviction: «La musique permet de se demander où l’on est, où l’on va et pourquoi. Tout à fait comme la vie.» Pour résoudre l’aspect de la «communication», il conseille à Jana Sémaan de «ne pas penser à plus de 60%, pour rester avec tes idées et avec ton public».
Rythme
À Nassib Ahmadieh enfin, à qui, en formidable pédagogue, il dit son admiration pour la rapidité maîtrisée de son interprétation du premier mouvement du Concerto en ré mineur de Dvorak, il demande de décortiquer d’une part puis de justifier d’autre part le sens du rythme. Et comme par magie, sans qu’aucune critique n’ait été formulée, le talentueux violoncelliste libanais laisse de côté sa technique de virtuose pour utiliser librement son intelligence et offrir dès cet instant un jeu senti, subjectif et complet. L’aspect de la «réception» de la musique par le public est alors grandement atteint.
Plus qu’un musicien de génie, Yo-Yo Ma a prouvé, lors de cette historique «masterclass» jamais égalée au Liban, n’ayons pas peur des mots, l’étendue de son humanisme, de sa curiosité insatiable pour l’individu, quel que soit son niveau musical et son bagage culturel. Un «honnête homme» selon les caractéristiques du siècle des Lumières, éternellement souriant, éternellement à l’écoute. Un grand moment, un très grand moment de musique.
Diala GEMAYEL
Le bouche-à-oreille, très développé dans ce pays, a fait un travail remarquable pour l’événement de taille qui s’est déroulé hier à l’Assembly Hall. En effet, la «masterclass» de Yo-Yo Ma, l’un des plus grands violoncellistes des XXe et XXIe siècles, à trois élèves du Conservatoire national a été passionnément suivie par près de 300 personnes. Avec le concours de...
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