« L’apartheid n’était pas une époque calme et tranquille, l’Afrique du Sud n’était pas...
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Des textes, des photos, des enregistrements retracent les pages sombres du passé de l’Afrique du Sud À Johannesburg, un musée de l’apartheid revient sur une histoire « difficile »
le 09 mars 2004 à 00h00
Des propos doctrinaux sur la supériorité de « l’homme blanc », la colère de Winnie Mandela prête au combat avec « des pierres », les doutes de Desmond Tutu : les images et les bruits de l’apartheid – denses, rudes – sont rassemblés dans un musée « en mouvement » à Johannesburg.
« L’apartheid n’était pas une époque calme et tranquille, l’Afrique du Sud n’était pas calme et tranquille. Le musée est un lieu difficile parce qu’il parle d’une histoire difficile », explique son directeur Christopher Till, qui revendique un lieu en perpétuelle évolution pour traduire, après dix ans de démocratie, cette page sombre de l’histoire sud-africaine.
Des textes, des photos, des enregistrements retracent, chronologiquement, la création et la chute d’un système – formellement en place de 1948 à 1991 – fondé sur un principe simple : classer tous les individus suivant leur race et tracer une ligne infranchissable entre les Blancs et les autres.
Un texte, extrait des débats parlementaires de mars 1950 : « L’homme blanc est le maître en Afrique du Sud, et l’homme blanc, de par son origine, de par sa naissance et par la nature même de son rôle, restera le maître en Afrique du Sud jusqu’à la fin. »
Une photo de Steve Biko, martyr de la lutte anti-apartheid mort en détention le 12 septembre 1977, et la réaction du ministre de la Police, Jimmy Kruger : « Je ne suis ni heureux ni désolé. Cela me laisse froid. »
Une vidéo de Desmond Tutu, l’ancien archevêque du Cap, le visage marqué par la souffrance, lors de l’enterrement d’un activiste dans les townships de Soweto : « Seigneur, nous savons que vous êtes là. Seigneur, nous savons que nous serons libres. Mais pourquoi le prix doit-il être aussi élevé ? »
À l’origine de ce musée, une démarche originale : un appel d’offres lancé par le gouvernement pour la construction d’un casino et d’un parc d’attractions, dans la proche banlieue de Johannesburg. Dans le cahier des charges, l’obligation de financer un projet lié au tourisme et à la création d’emplois.
Le consortium retenu a construit le casino et financé la construction du musée, mis sur pied en un temps record de 18 mois et ouvert en 2001.
« En raison du processus original de création de ce musée, nous avons dû accélérer un processus qui aurait pu – en raison de la complexité du sujet – prendre des années, et cela a été très positif », souligne M. Till.
Des matériaux bruts – béton, acier, briques –, des gigantesques photos en noir et blanc et une sorte de cacophonie sonore, accentuée par la hauteur des plafonds, restituent la tension de cette époque.
Le résultat a fait l’objet de critiques.
Certains, à l’image d’Helen Suzman, ancienne député libérale qui fut, pendant des années, la seule voix discordante au sein du Parlement proapartheid, ont déploré le manque de références aux Blancs sud-africains – intellectuels, écrivains – qui ont pris publiquement position contre le régime ségrégationniste.
Mais le musée n’est pas un lieu figé, plaide son directeur, il évolue, s’étoffe, se transforme.
« C’est un travail en mouvement, cela pourrait durer des années », explique M. Till.
Les textes et légendes – quelque 35 000 mots au total – sont en train d’être intégralement revus. Une aile du bâtiment sera consacrée aux travaux de la Commission vérité et réconciliation (TRC).
Si le musée a une dimension cathartique pour les victimes de l’apartheid, il apparaît aussi comme un lieu de mémoire pour une génération qui n’a pas connu la ségrégation érigée en système politique.
« C’est incroyable de voir à quel point, en un laps de temps si court, les enfants n’ont même plus une vague idée de ce à quoi cela (l’apartheid) ressemblait », explique le directeur du jeune musée, qui accueille en moyenne 350 visiteurs par jour.
Des propos doctrinaux sur la supériorité de « l’homme blanc », la colère de Winnie Mandela prête au combat avec « des pierres », les doutes de Desmond Tutu : les images et les bruits de l’apartheid – denses, rudes – sont rassemblés dans un musée « en mouvement » à Johannesburg.
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