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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - Une pièce d’Anne-Marie Étienne, mise en scène par Nadine Mokdessi « On ne refait pas l’avenir » : rencontre avec un drôle de type...

Au théâtre Monnot, jusqu’au 13 mars, Nadine Mokdessi présente «On ne refait pas l’avenir», une pièce d’Anne-Marie Étienne, où le rire et la réflexion se combinent pour offrir une heure trente minutes de divertissement sensible et intelligent. Éditeur en vogue, Xavier (Joe Abi-Aad) est un homme pressé, stressé et cynique. Le portable vissé en permanence à l’oreille, il n’a de temps ni d’attention à accorder à quiconque. Cet ambitieux aux dents longues est le prototype de l’homme parfaitement intégré dans son époque. Dynamique, toujours entre deux avions. Insolent, il n’a pas la langue dans sa poche. Et impitoyable: obsédé par les chiffres de vente au détriment de la qualité, pour lui, seule la rentabilité compte. Ses amis, sa compagne, n’arrivent pas à communiquer réellement avec lui et encore moins à le toucher. Mais voilà, dans ce tourbillon qu’est sa vie débarque, un soir, un étranger en blanc: Lucien (Alain Hochar, qui s’est coulé dans son rôle avec un naturel confondant), son ange gardien. Venu en mission spéciale, pour essayer de redresser la situation, Lucien a six mois pour changer les choses. Au départ incrédule et furieux, Xavier va vite se rendre à l’évidence: il n’échappera pas à l’emprise de cet être doté de pouvoirs surnaturels. La rencontre est explosive, car l’ange, loin de faire preuve d’angélisme, va plutôt employer la «méthode nucléaire». Il doit tout faire éclater chez Xavier pour modifier sa vie et faire émerger chez lui des sentiments profondément enfouis, tels que l’amour, l’amitié, la compassion, l’empathie... Sauf que l’ange ne remontera pas là-haut indemne. De cette aventure terrestre, il ne s’en tirera pas sans laisser... quelques plumes. Qui fait l’ange, fait la bête, disait l’autre. Qui de l’être céleste ou de l’homme va transformer l’autre ? On se le demande en voyant le pseudo-Gabriel succomber aux petits plaisirs de la vie sur terre. Finalement, nous sommes tous humains en ce bas monde. Il reste qu’il y a des humains qui ont plus d’humanité que d’autres. Don Quichotte C’est l’année des grands virages pour Nadine Mokdessi. Après dix ans de comédies hilarantes et de vaudevilles régulièrement présentés par son atelier de théâtre, la voilà qui passe à la vitesse supérieure. En fondant, il y a trois mois, sa compagnie Don Quichotte, Nadine Mokdessi entre de plain-pied dans le champ professionnel avec l’objectif de produire des créations scéniques diverses. La première étant On ne refait pas l’avenir, une pièce où le comique de situation – auquel elle avait habitué son public – cède avantageusement la place au registre de la fantaisie subtile et de l’émotion. Ce qui n’a pas changé par contre, c’est le bénévolat et la générosité de cette troupe (metteuse en scène, comédiens et techniciens) qui continuera à reverser la majeure partie des recettes de ses spectacles au profit d’associations caritatives et humanitaires (cette année: Afel, Arcenciel, Irap et la Lebanese Down Syndrome). Mais aussi la fidélité de ses comédiens qui, pièce après pièce, acquièrent sur scène une aisance et une subtilité de jeu indéniables. Du rire et de la morale On ne peut que saluer ici l’interprétation de Joe Abi-Aad, parfaitement crédible dans la peau de Xavier, celle d’Alain Hochar, qui s’est coulé avec naturel et sympathie dans le rôle de l’ange. Nina Haddad Hayek campe, elle, avec beaucoup de sensibilité et de justesse, le rôle de la compagne malmenée. Et enfin Sélim Mouzannar (Joël, l’ami de Xavier) et Josiane Riachi (Ève) parachèvent une distribution au jeu harmonieux. Un très beau décor, signé, comme de coutume, Pierre Abboud, des éclairages au rôle important, dont l’interruption fait office de séparation entre une scène, ou plutôt une séquence et une autre – car la pièce a été montée en plans cinématographiques, par juxtaposition de situations – ainsi qu’un support musical choisi avec soin (ça part d’une sorte de bruitages d’inspiration bouddhiste pour aboutir à de l’orientalo-jazz, en passant par la bande sonore du film In the Mood for Love, ou encore un extrait du groupe libanais qui s’internationalise Blend...) font de cette mise en scène une réussite. Mais le plus important reste qu’en adaptant cette pièce d’Anne-Marie Étienne, inspirée des films de Frank Capra (La vie est belle) et de Wim Wenders (Les ailes du désir), Nadine Mokdessi a voulu offrir à son public du rire certes, mais qui délivre aussi un message. « Tu meurs, tu regrettes quoi ? Tu vis, tu changes quoi?» «Quand on a un pote qui dérive, on le secoue...» «C’est quoi un type bien? C’est un type qui essaye...», etc. À travers les interrogations qui émaillent cette comédie légère, subtile, à l’humour incisif, se profile une réflexion sur le sens de l’existence, sur celui de l’éphémère. Une pièce donneuse de leçon, mais de laquelle on sort le sourire aux lèvres. À voir. Zéna ZALZAL
Au théâtre Monnot, jusqu’au 13 mars, Nadine Mokdessi présente «On ne refait pas l’avenir», une pièce d’Anne-Marie Étienne, où le rire et la réflexion se combinent pour offrir une heure trente minutes de divertissement sensible et intelligent.


Éditeur en vogue, Xavier (Joe Abi-Aad) est un homme pressé, stressé et cynique. Le portable vissé en permanence à l’oreille, il...